FOCUS – Depuis le 1er janvier 2015, la communauté d’agglomération Grenoble Alpes-Métropole, organisée autour de la ville de Grenoble, a accédé au statut de métropole. Avec ses 49 communes totalisant près de 440 000 habitants et des compétences élargies, elle devient la première intercommunalité de la région Rhône-Alpes. Non sans soulever un certain nombre de questions dont s’est emparée l’opposition.
Cette fois, ça y est ! Le passage en métropole est effectif. Et ce depuis le 1er janvier 2015. Les élus des 49 communes composant la nouvelle collectivité territoriale voient certaines de leurs compétences transférées à Grenoble-Alpes Métropole.
Plus précisément, la métropole se substitue aux communes dans l’exercice de six grands domaines de compétences, dites obligatoires. Passent ainsi sous sa houlette – en plus des compétences qu’elle exerce déjà – la politique locale de l’habitat, le développement et l’aménagement économique, social et culturel, l’aménagement de l’espace métropolitain, la protection et la mise en valeur de l’environnement et du cadre de vie, la politique de la ville et la gestion des services d’intérêt collectif.
Trois autres compétences, non obligatoires, devront également être reconnues d’intérêt métropolitain par les conseillers communautaires, courant 2017. Notamment les équipements culturels, socioculturels, éducatifs et sportifs, les opérations de création et d’aménagement d’espaces et enfin la gestion des cimetières et sites cinéraires. Pour finir, la métropole pourra exercer, par l’intermédiaire de conventions, certaines compétences du conseil général, du conseil régional et de l’État.
Les communes conserveront, quant à elles, la compétence des écoles, de la police municipale, des espaces verts, du sport, de la propreté urbaine, de l’action sociale, de la culture, de la santé et enfin de l’état civil.
Sur le papier, c’est une véritable opportunité offerte à l’agglomération pour gagner en visibilité et jouir d’une attractivité nationale et internationale accrue. C’est aussi le vœu d’une collectivité au service de ses habitants, plus compétitive, plus forte et plus solidaire, à co-construire avec les citoyens en réduisant la fracture sociale et les inégalités territoriales. Mais un certain nombre de questions se posent.
Quelles implications pour les agents de la ville ?
Quid des personnels travaillant pour les services chargés de la mise en œuvre des compétences transférées à la métropole ? Marie-José Salat, conseillère municipale du groupe Rassemblement de gauche et de progrès, a notamment interpellé la majorité sur ce sujet, lors du conseil municipal du 15 décembre dernier.
Un sujet sur lequel Maud Tavel, adjointe au personnel à la ville de Grenoble, s’est évertuée à dissiper les craintes : « des rencontres régulières en direction des services ont été organisées conjointement avec les services des ressources humaines de la ville et de la Métro. Ces rencontres ont levé un certain nombre d’inquiétudes, notamment sur la rémunération, les conditions de travail et la couverture sociale des agents ».
De fait, si le transfert des personnels va se faire en plusieurs temps, 99 postes ont d’ores et déjà été transférés à la métropole depuis ce 1er janvier. « Il est important de signaler que le temps que nous avons pris pour aller à la rencontre des agents et répondre au maximum à leurs questions a permis d’aboutir à un vote favorable des instances paritaires que nous n’avions pourtant pas l’obligation réglementaire de consulter » se félicite l’élue. Tout en précisant que, bien sûr, d’autres rencontres seront organisées pour accompagner les personnels, tout au long des processus de transfert dans les mois à venir.
Une opposition de gauche consensuelle…
Pour l’opposition de gauche, dans ses grandes lignes, le passage en métropole fait globalement consensus. A l’image de Paul Bron, conseiller municipal Go citoyenneté, pour qui « la métropole constitue une chance pour le développement du territoire », même si l’élu déplore « qu’il n’existe pas encore un véritable projet d’agglomération, un réel projet métropolitain ».
En cause, selon lui, l’absence d’union des partenaires concernés, la sensation que la construction métropolitaine « se fait à minima, presque à reculons et que c’est une métropole des services ». Et de regretter l’absence de démarche participative, le manque d’information des citoyens, des associations et des agents des services.
Dans une logique constructive, le groupe a ainsi fait des propositions à Éric Piolle et Christophe Ferrari. Notamment l’organisation de conseils thématiques de territoire, la constitution de groupes d’action métropolitaine ou bien encore que la compétence “éducation” puisse relever, à terme, de la métropole.
… mais très remontée à droite
Les élus UMP-UDI et société civile ont la dent plus dure. A l’exemple de Matthieu Chamussy qui a pointé l’absence de convocation de son groupe à des débats préliminaires, lors du délibéré du conseil municipal sur la métropole. « Vous avez réussi l’exploit de ne travailler qu’entre vous, lentement, et tout ça en étant incapables de produire une prospective financière » a‑t-il ainsi dénoncé.
Et de poursuivre sur sa lancée : « il est tout de même hallucinant que les communes transfèrent à la métropole des compétences sans qu’aucune évaluation financière n’ait été entreprise. Parce que, derrière tout cela, il y a la question fiscale et les habitants ont le droit de savoir ce que vous préparez ! ».
Il ne restait à Richard Cazenave, conseiller municipal du même groupe, qu’à enfoncer le clou. Celui-ci a fustigé la majorité, lui reprochant notamment de tourner le dos aux grands dossiers qui permettraient, selon lui, d’accroître l’attractivité du territoire. Et de citer pêle-mêle les autoroutes A51 et A480, les nanotechnologies, le TGV et les pôles de compétitivité.
« Allez-vous continuer d’éteindre un à un les autres moteurs de notre attractivité ? Les musiciens du Louvre, le Palais des sports, le Tour de France, le Théâtre municipal ? » Le groupe a également interpellé la majorité sur ses objectifs de bonne gestion, évoquant « des dépenses de fonctionnement de 30 % supérieures à la moyenne des villes comparables ».
Pas d’alignement des communes sur la ville-centre
Pour Christophe Ferrari, le président de Grenoble-Alpes Métropole, il ne faut pas oublier que les travaux préliminaires ont été menés au pas de charge. « A peine sortis de la fusion de trois intercommunalités – l’ancien périmètre de la Métro, le Sud grenoblois et les Balcons sud de Chartreuse – il nous a fallu agir dans un délai extrêmement court pour un passage en métropole programmé au 1er janvier 2015 », a‑t-il expliqué devant les élus grenoblois.
« Nous avons travaillé sur la mise en cohérence d’une métropole qui ne doit pas être la superposition d’un échelon intercommunal et, d’autre part, d’un échelon communal, qui reste, pour beaucoup d’aspects, la première cellule démocratique de notre pays ».
Une conception partagée par Yann Mongaburu, adjoint à l’intercommunalité à la ville de Grenoble, pour qui l’intercommunalité n’est pas non plus l’alignement des communes sur la ville-centre. « C’est un espace où nous construisons ensemble les politiques de solidarité entre les habitants de l’agglomération ».
Quoi qu’il en soit, tout ne n’est pas joué le 1er janvier, comme le rappelle le président de la Métro. « La réalité de la fabrication de notre métropole collectivement sera un processus de construction qui se fera dans le temps et, justement, en prenant le temps ».
Joël Kermabon
Le type d’intercommunalité le plus abouti
« On ne construit pas sur rien ! » déclarait Yann Mongaburu, adjoint à l’intercommunalité, lors du conseil municipal du 15 décembre dernier. En effet, la métropole conserve le statut d’établissement public de coopération intercommunal (EPCI) qui est déjà le sien avec l’actuelle Métro. Ce dernier autorise les communes membres à conduire des projets de développement économique, social, culturel et éducatif de leur territoire pour en améliorer la cohésion et la compétitivité. Le tout dans une optique de développement durable et solidaire.
Les EPCI permettent, notamment, de gérer ensemble des services publics locaux que certaines municipalités ne pourraient fournir à leurs administrés et de mener des politiques publiques, comme le logement ou les déplacements, non pertinentes à l’échelle de la commune. En s’appuyant sur ce statut complété par de nouvelles compétences, la métropole représente – selon le souhait du législateur – la forme la plus élaborée de coopération intercommunale parmi toutes les différentes formes d’intercommunalité existantes.