FOCUS. Tram et bus seront gratuits le mardi 18 et le mercredi 19 mars à Grenoble, le temps de laisser retomber le nuage de pollution qui plombe la région depuis une dizaine de jours. Mais après ? Alors que les mesures d’urgence, prévues dans les textes, peinent à se mettre en place, les actions de fond n’existent, elles, tout simplement pas.
L’épisode de pollution se poursuit et devrait durer jusqu’au jeudi 20 mars. Le constat posé, les traditionnelles recommandations émises, que fait-on pour tenter de juguler les polluants majoritairement émis par le trafic routier ? Comme réduire la vitesse maximale sur autoroute ne servait pas à grand-chose, les pouvoirs publics ont enclenché une (petite) vitesse : pousser à la gratuité dans les transports en commun. A Grenoble, tram et bus du SMTC seront donc gratuits ces mardi 18 et mercredi 19 mars. Après plus de dix jours de pollution et une première gratuité mise en place un peu en catastrophe vendredi 14 mars, les mesures ne courent pas les rues. La gratuité des transports en commun est d’ailleurs la seule mesure préconisée par les services préfectoraux. Et si elle est actée par le SMTC, les autres collectivités ne semblent guère pressées de l’appliquer. Une gratuité inscrite dans les textes « Le Conseil général, aujourd’hui inactif face à la pollution, doit également rendre gratuites les lignes TransIsère jusqu’à la fin réelle de l’épisode de pollution », pointe le conseiller général Olivier Bertrand. Contacté ce lundi, le département n’avait, en soirée, toujours pas fait connaître sa position. « Ces mesures de gratuité, on les demande depuis très longtemps, souligne l’élu d’Europe Écologie Les Verts. Elles sont pourtant prévues dans les engagements du SMTC mais n’ont jamais été appliquées ! ». Une première donc ? En cette période pré-électorale, difficile de ne pas voir derrière ce coup d’accélérateur une manœuvre purement politique, loin des convictions environnementales. D’autant que la France est, en la matière, un bien piètre élève… L’écotaxe ? Suspendue. Augmenter la fiscalité du diesel ? C’est peu dire que le gouvernement freine des quatre fers face aux constructeurs automobiles. Le projet de zones à faible émission, interdites aux véhicules les plus polluants ? Enterré. « On est pratiquement les derniers de la classe européenne », résume Olivier Bertrand. De fait, la France est dotée du plus gros parc de véhicules diesel et ne compte aucune des zones à trafic limité qui se développent partout en Europe. « La France est toujours dans les effets d’annonce. En attendant, la réglementation européenne s’est structurée. Et aujourd’hui, on est en contentieux avec la Commission européenne quant aux seuils de dépassement de la qualité de l’air. L’Europe nous demande une obligation de résultats. Faute de quoi, on devra payer des amendes. »*La gratuité inscrite dans les habitudes
« Il faut un ensemble de mesures dont la gratuité, continue Olivier Bertrand. Mais pour être significative, cette mesure doit être inscrite dans les habitudes ». D’autant que la pollution est loin d’être un phénomène exceptionnel. 2013 a ainsi connu 45 jours de pics de pollution. Les mesures d’urgence n’y suffiront donc pas. Que faire ? Harmoniser les prix de l’essence et du diesel ? Entériner une bonne fois pour toutes la taxe poids lourds qui permettra également de financer les futures structures de transports en commun ? Développer le tram-train, histoire d’élargir la question des transports en commun par-delà les frontières grenobloises ? Bref, troquer la voiture pour un autre mode de transport, moins polluant ou plus collectif… Faire une croix sur les projets autoroutiers ? C’est ce que répètent les élus écologistes. « Il faut abandonner les projets d’élargissement de l’A480 et de prolongation de l’A51, insiste Olivier Bertrand. C’est totalement ahurissant de créer une seconde vallée du Rhône en plein Grenoble, avec un lot de camions supplémentaires qui se traduira par une hausse de la pollution ! ». Patricia Cerinsek * La Commission européenne poursuit la France pour non-respect des valeurs-limites de particules fines PM 10 (dont le diamètre est inférieur à 10 micromètres). La pollution atmosphérique pourrait coûter à la France une amende de 11 millions d’euros et 240 000 euros de pénalités par jour jusqu’à ce que la qualité de l’air s’améliore.Grenoble : du mieux mais peut mieux faire Grenoble, ville la plus polluée de France ? Le cliché a la vie dur. La capitale des Alpes pointe en réalité à la onzième position, loin derrière Paris (premier), Antibes (deuxième) ou Lyon (troisième), selon un classement établi en 2012 par l’OMS (Organisation mondiale de la santé). Malgré une situation géographique particulière liée à la “cuvette”, la pollution attisée par des conditions anti-cycloniques tenaces reste finalement contenue. Il y a même un mieux depuis quelques années. Léger toutefois. « Depuis 2008, les émissions de dioxyde d’azote ont baissé de 25% et les émissions de particules fines de 10 à 15% », fait ainsi remarquer le maire Michel Destot dans un communiqué. « Sur les grands boulevards, les jours de pic d’émission de particules fines ont été diminués de plus de la moitié entre 2007 et 2013 ». De même, selon lui, la part des transports en commun est passée de 17 à 20% et la pratique du vélo a été multipliée par deux, entre 2002 et 2010. Isolation thermique de l’habitat, biomasse… « le plan d’action Facteur 4 lancé en 2008 nous a déjà permis de baisser de 17% les émissions de gaz à effet de serre sur notre territoire quand l’objectif affichait – 20 % d’ici 2020 », ajoute le premier magistrat.
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