ENTRETIEN : A l’occasion de la fin de la cinquième édition du Mois de l’accessibilité, Stéphane Gemmani, conseiller municipal de la ville de Grenoble en charge du dossier, dresse un premier bilan. Celui-ci revient notamment sur l’expérience Inovaccess et la généralisation du dispositif. De la mise aux normes des écoles aux solutions innovantes envisagées pour optimiser le mobilier urbain, l’élu délégué à l’accessibilité, à la prévention et à la préconisation sociale nous présente ses actions pour simplifier la ville aux personnes en situation de handicap.
Organisé depuis 2009, le Mois de l’accessibilité est l’occasion pour la ville et les associations de sensibiliser le public à la question du handicap. Cette cinquième édition a‑t-elle été une réussite ?
On peut dire que cette cinquième édition est une réussite puisque plus de 75 manifestations ont été organisées sur Grenoble, sans compter les autres communes qui nous ont rejoints. Mon ambition n’a jamais été que cela reste propre à la ville. Dès la deuxième édition, d’autres communes de l’agglo nous ont d’ailleurs rejoints, comme Seyssinet, Echirolles et Saint-Martin‑d’Hères. Bourgoin-Jallieu a également organisé quelque chose, de même qu’une ville en Algérie (Tamanrasset, ndlr). On voit donc que l’initiative fait des petits, tout simplement parce que le concept est intéressant. Cependant, nous sommes toujours inquiets par rapport aux prochaines éditions. Quand j’ai initié le Mois de l’accessibilité en 2009, mon budget est en effet resté le même par rapport à celui de mon prédécesseur. Et il n’a pratiquement pas bougé depuis.
Sur quoi vont porter les efforts de la commune en matière d’accessibilité ces prochaines années ?
Même si nous sommes très en avance par rapport à d’autres villes, il reste encore énormément à faire. Cette année, j’ai voulu travailler sur tout ce qui était lié à l’enseignement et à l’apprentissage. L’objectif est de mettre en accessibilité le plus d’écoles possible. Cela va se faire par paliers. Nous avons déjà fait en sorte qu’au moins une école par secteur soit totalement accessible et nous adaptons progressivement les autres établissements.
La contrainte liée au handicap physique est évidemment la plus lourde car il faut intervenir sur la structure du bâtiment, ce qui coûte extrêmement cher. Pour autant, il faut aussi s’intéresser aux autres handicaps, notamment visuels, auditifs et mentaux. On peut ainsi d’ores et déjà mettre en place certains dispositifs peu onéreux, en attendant de mettre les bâtiments en accessibilité.
D’autres projets en cours ?
Oui, dans le même ordre d’idée, nous travaillons depuis le début de mon mandat avec l’école d’architecture et de design de Grenoble pour optimiser le mobilier urbain existant et l’adapter aux différents types de handicap. Nous travaillons, par exemple, sur des systèmes de potelets sonores pour que les personnes déficientes visuelles puissent avoir des repères dans la ville. Nous faisons cela en gardant toujours à l’esprit la contrainte du coût, de façon à pouvoir généraliser les dispositifs dans l’ensemble de la ville. Cela nous pousse aussi à adapter plutôt qu’à remplacer. Une douzaine d’autres projets de ce genre sont à l’étude et seront expérimentés prochainement.
Le projet Inovaccess, qui a duré trois ans, se termine en même temps que cette cinquième édition du mois de l’accessibilité. Pouvez-vous nous rappeler en quoi il a consisté ?
L’objectif initial était de
savoir comment aider les entreprises à répondre à la loi (datant de 1987 et modifiée en 2005 ndlr) qui stipule qu’au moins 6% des salariés doivent être en situation de handicap. L’intérêt était de se servir de la loi pour intégrer la question du handicap dans le monde de l’entreprise. Aujourd’hui, 80% des personnes en situation de handicap n’ont pas suivi d’études supérieures, non pas parce qu’elles n’en ont pas les capacités, mais parce qu’elles pensent ne pas trouver d’emploi. Rendre les entreprises accessibles permet donc d’ouvrir le champ de la formation à ces personnes. C’est aussi l’occasion pour elles de sortir d’une certaine forme d’exclusion, par le biais de l’emploi. Ce qui a motivé ce projet, c’est donc la volonté de faire des personnes en situation de handicap des salariés à part entière.
Pouvez-vous d’ores et déjà en dresser un bilan ?
Pour moi, l’expérience est réussie. J’ai donc fait acter la généralisation du projet à l’ensemble du territoire grenoblois lors du conseil municipal du 27 juin 2012. Nous ne serons plus sur de l’expérimentation, mais sur la durée, avec un plan pluriannuel et des moyens différents de ceux mis en place jusqu’à présent. Passer d’une expérience menée sur un quartier à une véritable politique à l’échelle de la ville demande toutefois du temps. Et si la plupart des solutions ont été trouvées, il reste encore quelques points à préciser. Les rencontres Inovaccess du 15 et 16 octobre, qui clôturent d’ailleurs le Mois de l’accessibilité, sont l’occasion de présenter nos résultats à d’autres villes, de façon à ce que l’expérience porte ses fruits ailleurs. Encore une fois, le but n’est pas de garder les résultats pour nous, mais d’en faire bénéficier le plus grand nombre.
Propos recueillis par Valentin Dizier
Inovaccess kesako ?
Projet pilote initié en 2010, Inovaccess visait à trouver des solutions innovantes favorisant l’emploi des personnes en situation de handicap.
L’expérience à été menée sur l’ensemble du secteur 1.
Cette zone d’emploi très dense est particulièrement représentative car elle inclut les entreprises technologiques de la Presqu’île, le quartier des affaires d’Europole et des secteurs d’activité plus traditionnels, notamment dans sa partie Berriat/Bouchayer-Viallet.
Trois partenaires se sont associés pour mener à bien le projet : la ville de Grenoble, l’Association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées (Agefiph) et le Fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique (FIPHFP). Le bilan de l’expérience est présenté en ce moment, dans le cadre des rencontres Inovaccess des 15 et 16 octobre.
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