FOCUS – Le site Point d’eau de Grenoble est appelé à déménager d’ici 2021. Devenu trop petit, et situé au cœur d’un quartier refait à neuf, le centre d’accueil de jour pour les personnes sans-abris emménagera dans un nouveau local situé 300 mètres plus loin, chemin de Halage. Un déménagement qui a pu susciter des inquiétudes, mais donne surtout beaucoup d’espoir et de dynamisme à l’équipe de la structure.
« Déménager ? On en a tous fait un jour ou l’autre l’expérience. C’est une épreuve physique, une épreuve psychique, qui peut susciter du stress, être vécue comme une contrainte qui bouscule et dérange. » En quelques mots, Philippe Mouy, bénévole auprès de Point d’eau, résume les inquiétudes que le déménagement annoncé du site d’accueil de jour situé rue Blanche-Monnier à Grenoble peut susciter.
C’est pourtant bien l’optimisme et le dynamisme qui prédominaient durant la soirée d’information sur ce déménagement, organisée le 22 mai dernier. Car si la municipalité grenobloise a prié Point d’eau de quitter son emplacement actuel, dernière « verrue » de parpaing au sein d’un quartier refait à neuf, c’est pour mieux travailler avec sa direction sur un nouvel emplacement. À la fois plus spacieux et permettant de répondre aux besoins actuels de la structure.
Un futur local chemin de Halage
Invité au soir du 22 mai, le maire de Grenoble s’est réjoui, peut-être avec un certain soulagement, du dynamisme de l’équipe de Point d’eau. « Regarder ce déménagement comme une opportunité qui répond aux besoin de s’agrandir (…), c’est cela qui donne chaud au cœur et donne cette énergie positive dont on a tant besoin », a ainsi déclaré Éric Piolle. Qui se passe volontiers de la création d’une Zad à deux pas du quartier Île-Verte.
Manon Gatto, chargée de mission chez Point d’eau, le souligne : la situation n’est (quasiment) plus tenable dans le local rue Blanche-Monnier. « Nos locaux sont devenus trop petits et insalubres. Ils ont été prévus pour trente personnes, on en accueille maintenant à peu près 120 par matinée ! », explique-t-elle. De quoi rêver d’un Point d’eau « plus grand, plus accueillant, plus adapté et encore plus dynamique », ainsi que le fait sa présidente Marie-Françoise Rostaing.
Après bien des atermoiements administratifs, le site faisant des va-et-vient entre « inondable » et « non-inondable », l’emplacement du futur nouveau Point d’eau est acté. Un terrain situé Chemin de Halage, le long de l’Isère, à 300 mètres à peine de la rue Blanche-Monnier. Que l’on ne s’y trompe pas : malgré cette grande proximité, déménager un local situé au même endroit depuis 25 ans ne sera pas une sinécure. Et d’autant plus lorsque tout est à construire.
Point d’eau : l’hygiène, mais pas seulement
Mais au fait, dans quelle catégorie placer Point d’eau ? « On nous met dans la case hygiène, qui ne représente qu’une petite partie de nos activités, même si elle est très importante », note le directeur de la structure Richard Diot. L’espace d’accueil de jour pour les personnes sans-abris propose en effet un service de douche, largement à saturation : entre 25 et 30 douches tous les matins… avec seulement trois cabines à disposition. Et les files d’attente qui vont avec.
Les autres missions de Point d’eau ? L’accès aux droits, à travers des accompagnements ou la mise en place d’une boîte postale, une domiciliation administrative indispensable pour rétablir les droits des personnes. Mais aussi la « remobilisation » des plus précaires, à travers des ateliers de toutes sortes (couture, cuisine), des sorties en forêt et, plus prosaïquement, selon les profils des cours de français.
Enfin, la question de la santé joue un rôle important dans l’activité de Point d’eau. Qu’il s’agisse, là encore, de rétablir l’accès à ses droits via l’obtention d’une carte Vitale ou de la CMU, ou à travers des consultations organisées avec des partenaires. Des praticiens de santé bénévoles œuvrent à remettre les personnes sur les rails car, rappelle l’éducatrice Candice Mengue, « s’occuper de sa santé ne va pas de soi pour les personnes en précarité ».
Un déménagement fixé en 2021
Autant d’activités qui devraient bénéficier de beaucoup plus d’espace et de confort dans le nouveau local, qui n’existe pour le moment qu’à l’état de plans. Des bureaux, une salle de consultation en bonne et due forme et dignement équipée… et même un espace spécifiquement réservé aux chiens, ou encore une bagagerie, là aussi plus spacieuse. Et qui a bénéficié d’une campagne de financement participatif via la plateforme solidaire Les petites pierres.
« L’idée c’est bien de redonner une place aux services », insiste Richard Diot. Et peut-être d’en voir émerger de nouveaux, selon les propositions qui pourraient par la suite voir le jour. Le déménagement, l’occasion de se dépasser ? « Cela vient nous bousculer, nous pousser un peu. C’est un élément moteur de la démarche : ça fait du bien et ça nous fait avancer », estime le directeur.
Les sept salariés de Point d’eau, auxquels viennent s’ajouter des services civiques, des stagiaires et près de quarante bénévoles, ont encore un peu de temps devant eux. Si la mise en place d’un projet de construction cohérent pour les nouveaux locaux a représenté beaucoup de temps et d’énergie, le déménagement à proprement parler est fixé pour sa part à 2021. Soit encore quelques mois pour les sans-abris à faire la queue en attendant de pouvoir prendre une douche.