Après le lycée des Eaux-Claires, ce sera le lycée Vaucanson qui sera le théâtre de la "Nuit de la résistance" jeudi 21 mars. © Jules Peyron - Place Gre'net

Deuxième « Nuit de la résis­tance » pour les profs, élèves et parents gre­no­blois oppo­sés à la réforme du lycée

Deuxième « Nuit de la résis­tance » pour les profs, élèves et parents gre­no­blois oppo­sés à la réforme du lycée

REPORTAGE – Malgré la pluie, mal­gré le froid, une tren­taine de per­sonnes dis­cutent autour d’un buf­fet, à peine abri­tées sous un cha­pi­teau, devant le lycée des Eaux-Claires. La plu­part sont pro­fes­seurs, mais on croise aussi quelques élèves ou parents d’é­lèves, tous venus pro­tes­ter contre les réformes gou­ver­ne­men­tales de l’Éducation natio­nale. De 17 heures à 21 heures, ils par­ti­cipent à la « Nuit de la résis­tance » qui se tient pour la deuxième fois ce jeudi 14 mars.

Après le lycée des Eaux-Claires, ce sera le lycée Vaucanson qui sera le théâtre de la "Nuit de la résistance" jeudi 21 mars. © Jules Peyron - Place Gre'net

Après le lycée des Eaux-Claires, ce sera le lycée Vaucanson qui sera le théâtre de la « Nuit de la résis­tance » jeudi 21 mars. © Jules Peyron – Place Gre’net

« Je ne sais pas quoi dire aux élèves, j’ai honte ! », se désole Véronique Kawski, pro­fes­seure d’é­co­no­mie au lycée Aristide-Bergès. Face à la réforme du lycée, cette syn­di­quée Sud Éducation se sent impuis­sante : « Le gou­ver­ne­ment fait de l’im­pro­vi­sa­tion totale et, à ce point-là, c’est de l’in­cons­cience ». Les pro­fes­seurs qui par­ti­cipent, ce jeudi soir, à la deuxième « Nuit de la résis­tance » dénoncent ainsi un cruel manque d’information.

« On n’a même pas les moyens de s’a­che­ter une imprimante ! »

« Ça va trop vite et c’est trop com­pli­qué pour les parents. La plu­part de mes élèves de ter­mi­nale ne se sont pas encore ins­crits sur Parcoursup parce qu’ils n’ont pas com­pris com­ment ça marche », raconte Ludovic Dutrey, pro­fes­seur au lycée pro­fes­sion­nel Jacques-Prévert.

Le ministre de l'éducation national, Jean-Michel Blanquer, dans le viseur des professeurs contestataires. © Jules Peyron - Place Gre'net

Le ministre de l’Éducation natio­nale, Jean-Michel Blanquer, dans le viseur des pro­fes­seurs contes­ta­taires. © Jules Peyron – Place Gre’net

Il ajoute, désa­busé : « Dans le clip du gou­ver­ne­ment en faveur de la réforme du lycée pro­fes­sion­nel, on voit une élève avec un casque de réa­lité vir­tuelle sur la tête. Mais la réa­lité, c’est qu’on n’a même pas les moyens de s’a­che­ter une impri­mante ! » Ce déca­lage entre le dis­cours du gou­ver­ne­ment et la réa­lité du ter­rain, beau­coup de pro­fes­seurs pré­sents sur place le constatent.

Jean-Christophe Barraud, pro­fes­seur d’Histoire-géo­gra­phie au lycée Vaucanson, n’est pour sa part même pas fon­da­men­ta­le­ment opposé à la réforme : « Après tout, si on met les moyens der­rière, pour­quoi pas ? Mais il n’y a pas les moyens ! Le gou­ver­ne­ment annonce que les lycéens vont pou­voir choi­sir entre douze spé­cia­li­tés. Mais tech­ni­que­ment, c’est impos­sible. Au lycée Mounier, par exemple, il n’y en aura que quatre. »

Des élèves avec plus de choix, ou enfer­més dans des parcours ?

La réforme du lycée d’en­sei­gne­ment géné­ral, por­tée par le ministre de l’Éducation natio­nale Jean-Michel Blanquer, signe la fin des séries L, ES, et S dès la ren­trée 2019. La classe de seconde connaît peu de chan­ge­ments majeurs mais en pre­mière et ter­mi­nale, les élèves devront choi­sir des spé­cia­li­tés en plus d’un tronc com­mun où n’ap­pa­raissent par exemple plus les mathématiques.

L’objectif de ce nou­veau sys­tème ? Spécialiser les élèves dans cer­tains domaines en pré­vi­sion de leur vie pro­fes­sion­nelle. Il s’a­git de « don­ner aux élèves une plus grande liberté dans le choix des ensei­gne­ments qui les pas­sionnent », selon le gou­ver­ne­ment. Ou « d’en­fer­mer les lycéens dans des tubes et faire en sorte qu’ils n’en sortent plus », de l’a­vis d’un pro­fes­seur pré­sent jeudi soir devant le lycée des Eaux-Claires.

Ludovic, Julien, Judith et Xavier, tous profs et tous mobilisés contre la réforme du lycée. © Jules Peyron - Place Gre'net

Ludovic, Julien, Judith et Xavier, tous profs et tous mobi­li­sés contre la réforme du lycée. © Jules Peyron – Place Gre’net

Face à la com­plexité de ces réformes, dif­fi­cile de mobi­li­ser. « Les gens ne sont plus moti­vés par les grèves », regrettent cer­tains, qui jettent la pierre à « un mode d’ac­tion syn­di­cale archaïque ». Alors on ima­gine de nou­veaux moyens d’ac­tions, comme ces « Nuits de la résis­tance », où les syn­di­cats sont en sou­tien mais en retrait pour ne pas avoir un effet repous­soir. La pre­mière de ces « nuits » (qui ne dure qu’entre 17 heures et 21 heures) a eu lieu le 7 mars devant le lycée Stendhal. Et une troi­sième se tien­dra devant le lycée Vaucanson, le 21 mars prochain.

Des élèves en sou­tien des professeurs

Xavier Lecocq est l’un des orga­ni­sa­teurs du jeune Collectif 38 des per­son­nels pour la défense du ser­vice public d’é­du­ca­tion, à l’i­ni­tia­tive de ces ras­sem­ble­ments noc­turnes. Il en explique la rai­son d’être : « On ne veut pas être cor­po­ra­tistes. Le but c’est d’a­voir des parents d’é­lèves et des lycéens avec nous. Les Nuits de la résis­tance per­mettent de com­mu­ni­quer avec eux et de leur expli­quer ce qui se joue. »

Esteban et Romane, tous les deux élèves en seconde au lycée des Eaux-Claires, sont venus soutenir leurs professeurs. © Jules Peyron - Place Gre'net

Esteban et Romane, en seconde au lycée des Eaux-Claires, sont venus sou­te­nir leurs pro­fes­seurs. © Jules Peyron – Place Gre’net

Dans les faits, la petite foule de ce jeudi soir est lar­ge­ment com­po­sée de pro­fes­seurs. Pour autant, quelques élèves sont là, comme Romane et Esteban, venus « en sou­tien des profs ».

Tous les deux élèves de seconde, ils se décrivent comme « les cobayes » de cette réforme du bac­ca­lau­réat et pointent eux aussi du doigt le manque d’in­for­ma­tion : « Les profs ne savent pas si ce qu’ils nous apprennent sera dans le pro­gramme de l’an­née pro­chaine », déplorent-ils. Au milieu des ensei­gnants en colère face au dis­cours du gou­ver­ne­ment, le mes­sage de Romane est lim­pide : « Je ne sais pas où je vais ».

Jules Peyron

JP

Auteur

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

A lire aussi sur Place Gre'net

Palais de justice de Grenoble. © Joël Kermabon - Place Gre'net
Meurtre d’une jeune Lyonnaise dans le Val d’Aoste : le sus­pect, jugé à Grenoble, accepte son extra­di­tion vers l’Italie

EN BREF - Le jeune Italien de 21 ans soupçonné d'avoir tué sa compagne, une jeune Lyonnaise de 22 ans retrouvée morte poignardée le 5 Lire plus

Le groupe Zoufris Maracas. © Nicolas Baghir
Festival Magic Bus 2024 : une édi­tion sous le signe de l’i­ti­né­rance dans huit lieux de l’ag­glo­mé­ra­tion grenobloise

ÉVÈNEMENT - La 23e édition du festival Magic Bus organisée par l'association Retour de scène aura lieu du 27 avril au 4 mai 2024 à Lire plus

Alouette des champs. © Christian Aussaguel
Auvergne-Rhône-Alpes : la LPO alerte sur la « dis­pa­ri­tion inquié­tante » des oiseaux des milieux agricoles

FLASH INFO - La LPO Auvergne-Rhône-Alpes s'alarme, dans un communiqué publié le 9 avril 2024, de la "disparition inquiétante" des oiseaux des milieux agricoles. Un Lire plus

Alpes Insertion conteste vivement le reportage (et ses méthodes) de Cash Investigation à son endroit
Alpes Insertion conteste vive­ment les pro­pos tenus dans le repor­tage de Cash Investigation

DROIT DE SUITE - Après un reportage accablant de Cash Investigation sur Fontaine Insertion en janvier 2024 et un rassemblement syndical devant ses locaux en Lire plus

Mobilisation pour des aménagements sécurisés. Crédit Collectif pour l'aménagement cyclable de la Combe de Gières
Piste cyclable dans la combe de Gières : les élus éco­lo­gistes du Département sou­tiennent la péti­tion citoyenne métropolitaine

FLASH INFO - Le groupe Isère écologie et solidarités (IES) au Département a appelé, jeudi 18 avril 2024, à signer la pétition citoyenne métropolitaine pour Lire plus

Échirolles : un bus de la Tag tou­ché par plu­sieurs tirs d’arme à feu, les conduc­teurs exercent leur droit de retrait

EN BREF - Un bus de la ligne C7 a été visé par plusieurs tirs d'armes à feu au niveau du terminus Comboire, à Échirolles, Lire plus

Flash Info

Les plus lus

Agenda

Je partage !