FOCUS – Les professeurs du lycée Emmanuel-Mounier de Grenoble ont fait valoir leur droit de retrait ces lundi 11 et mardi 12 février, suite à l’agression violente d’un de leurs collègues quelques jours plus tôt. Un enseignant en Lettres a en effet été agressé, le vendredi 8 février à 16 h 30, par trois personnes cagoulées alors qu’il attendait le tram. Une agression qui choque l’établissement tout entier et suscite depuis plusieurs jours de nombreux témoignages de soutien. Un rassemblement est ainsi prévu ce mercredi matin à partir de 7 h 45 devant le lycée.
« C’est absolument inédit, et on se serait bien passé de cette grande première », déplore Lionel Vernet, proviseur du lycée Emmanuel-Mounier de Grenoble. Vendredi 8 février à 16 h 30, l’un des professeurs de l’établissement a en effet été brutalement agressé par trois individus cagoulés alors qu’il attendait le tramway. Le lundi suivant, ses collègues indiquaient exercer leur droit de retrait et l’ont renouvelé sur la journée du mardi 12 février.
Emmanuel-Mounier n’en est pas un lycée “mort” pour autant : « Lundi matin, nous avons accueilli les élèves pour leur expliquer la raison de ce droit de retrait, et également pour évaluer s’ils se sentaient choqués par la situation, de manière à pouvoir les diriger vers une cellule d’écoute », explique Lionel Vernet. Une cellule mise en place par les services de santé du rectorat de Grenoble, qui s’adresse naturellement tout autant aux professeurs.
L’accueil des élèves dans ce contexte particulier a aussi été l’occasion, lundi comme mardi matin, d’échanger avec eux. « Les cours ne sont pas dispensés mais, malgré tout, des élèves sont présents sur la base du volontariat avec des enseignants, avec des familles, pour discuter et voir comment nous pouvons lutter contre ce fléau qu’est la violence », décrit le proviseur de l’établissement.
Un professeur délibérément pris pour cible ?
Le droit de retrait doit prendre fin à compter du mercredi 13 février au matin. Non sans un temps d’accueil convivial entre 7 heures et 8 h 30, avec du café ou du thé. Et ceci, explique encore Lionel Vernet, « pour dire à nos élèves qu’on les accueille avec la plus grande bienveillance et qu’évidemment nous sommes tous unis contre la violence ». Un message qui sera par ailleurs indiqué sur la façade de l’établissement à l’aide d’une banderole.
Et quand le proviseur parle des élèves, ce n’est pas sans une certaine fierté. Trois d’entre eux ont ainsi mis fin à l’agression et ont même tenté de courser les agresseurs. « Ils ont eu une action particulièrement courageuse et civique », souligne Lionel Vernet. Qui ajoute que d’autres élèves ont, de leur côté, immédiatement porté secours au professeur. Hospitalisé un temps, celui-ci a pu rentrer à son domicile, naturellement très choqué.
Reste à savoir si ce professeur de Lettres était pris délibérément pour cible. À cela, le proviseur du lycée Mounier n’a pas de réponse. Mais il refuse de toute manière de hiérarchiser les actes de violence. « Il y a deux hypothèses : soit c’est tombé absolument au hasard et c’est horrible, soit ce professeur a été ciblé et c’est horrible aussi », juge-t-il. Pour le reste, l’enquête est évidemment entre les mains de la police.
Le soutien du rectorat, de la Région et des syndicats
L’agression d’un professeur au sortir de son établissement n’en demeure pas moins un acte marquant. La rectrice de l’Académie de Grenoble Fabienne Blaise a immédiatement fait savoir le soutien de l’ensemble des services du rectorat à l’établissement. De même que le Conseil régional Auvergne-Rhône-Alpes, par la voix de la conseillère régionale Sandrine Chaix, notamment en charge de la formation continue et de l’apprentissage.
Le Snes a, lui aussi, exprimé son soutien dans un communiqué. Un soutien qui s’adresse également à un autre professeur du collège Doisneau de l’Isle‑d’Abeau, agressé par un parent d’élève dans sa salle de cours, lui aussi le 8 février. « Cette violence, qui grandit toujours, traduit la dégradation de l’image de l’École et des enseignants entretenue par les décisions politiques contre les personnels et leurs représentants », écrit le Syndicat national des enseignements de second degré.
Des soutiens de personnalités politiques… et des parents d’élève
Mais les réactions sont également politiques. Premier à s’exprimer, sans surprise, l’ancien maire de Grenoble et candidat déclaré aux municipales de 2020 Alain Carignon. Pour qui « l’agression sauvage et organisée dont a été victime un enseignant du lycée Mounier est significative du climat d’insécurité qui règne dans l’agglomération ».
Via son compte Facebook, le conseiller régional d’opposition Stéphane Gemmani témoigne également de son soutien au professeur agressé ainsi qu’à l’ensemble des personnels de l’établissement. Et appelle à « trouver en responsabilité des solutions à cette impasse qu’est cette violence gratuite ».
Enfin, si la municipalité de Grenoble n’a pas officiellement réagi à l’agression, Lionel Vernet souligne que le maire Éric Piolle l’a assuré par téléphone de tout son soutien. Des messages qui viennent s’ajouter aux nombreux témoignages directs ou indirects de solidarité, en particulier des familles et parents d’élève. Un rassemblement de soutien est d’ailleurs prévu ce mercredi matin à partir de 7 h 45 devant le lycée. De quoi donner sans doute un peu de réconfort à une équipe éducative ébranlée par cette agression particulièrement inquiétante.