CRITIQUE – La comédienne Fabienne Courvoisier nous fait la lecture du Petit traité d’éducation lubrique de Lydie Salvaire jusqu’au dimanche 8 avril au Midi/Minuit, au 38 de la rue saint-Laurent. On s’y délecte d’une langue qui vise moins à nous dévergonder qu’à nous amuser de la manière la plus lettrée et la plus fine qui soit.
« Si le premier devoir de l’éducation religieuse consiste à éviter l’enfer à son prochain, le premier devoir de l’éducation lubrique consiste à l’y précipiter. » Ainsi s’ouvre le Petit traité d’éducation lubrique commis, en 2008, par Lydie Salvayre, l’auteure tout à fait respectable de Pas Pleurer, qui lui valut le Prix Goncourt en 2014.
On trouve le Petit traité d’éducation lubrique de Lydie Salvayre en vente à la librairie Les Modernes, 6 rue Lakanal, à Grenoble.
Au Midi/Minuit, jusqu’au dimanche 8 avril, la comédienne Fabienne Courvoisier entreprend, avec succès et malice, de rendre toute la saveur de ce petit texte espiègle. Car, à l’écoute de ce traité, on est davantage guetté par les secousses du rire que par les tourments de l’enfer. Le rire est parfois embarrassé c’est vrai. Rien de plus normal, au regard du sujet qui occupe ce traité.
Mais la lubricité qu’on entend nous enseigner est si bien enrobée d’érudites saillies, que c’est surtout à la beauté de la langue et à la finesse de l’esprit que l’on s’attache. En optant pour une tenue sobre – de celle que pourrait porter n’importe quelle conférencière – et pour une attitude, de même, plutôt docte quoiqu’enjouée, Fabienne Courvoisier installe une distance propre à dissiper la gêne.
Quand lubricité rime avec lettré
Le spectacle est tout de même à déconseiller aux enfants, aux pudibonds, aux religieux ou à ceux qui ne souhaitent pas étendre outre mesure leur vocabulaire. Sur ce dernier point, la comédienne fait d’ailleurs preuve d’une grande pédagogie, en accord avec son rôle, en ajoutant au texte de Lydie Salvayre un petit lexique qui tombe à pic. L’avancée du traité respecte, lui aussi, des impératifs didactiques.
Points par points, eux-mêmes déclinés en de nombreux sous-points, l’enseignement lubrique prodigué prend des allures de récit à tiroir. Dont le contenu réserve quelques surprises. Parmi elles, on appréciera que soit convoqué Heidegger, pour justifier le concept du voilement-dévoilement indispensable à l’érotisme. Ou encore Saint Thomas d’Aquin, pour prouver que tous les hommes de foi ne condamnaient pas, avec le même courroux, la pédication (coït anal). Pour sa part, il la qualifiait de « grâce fraternelle » et elle « ne constitu[ait] pas [à ses yeux] le plus grave des péchés de luxure ».
Pour en savoir davantage sur ces références érudites et sur les conseils et remarques, plus pragmatiques, dispensés par l’auteure via l’excellente Fabienne Courvoisier, on ne peut que vous conseiller de vous rendre au Midi/Minuit séance tenante.
Adèle Duminy
Infos pratiques
38 rue Saint-Laurent à Grenoble
Petit Traité d’éducation lubrique
De Lydie Salvayre
Lecture par Fabienne Courvoisier
Du mercredi 4 au dimanche 8 avril
20 h 30 tous les soirs, excepté le dimanche, à 17 heures