Les bibliothécaires en lutte lors de l'annonce de la montée à Paris d'une délégation à l'occasion du Salon du livre. © Joël Kermabon - Place Gre'net

Les biblio­thé­caires de Grenoble en lutte réagissent au “droit de réponse” de la Ville

Les biblio­thé­caires de Grenoble en lutte réagissent au “droit de réponse” de la Ville

EN BREF – Suite à la publi­ca­tion de l’ar­ticle de Place Gre’net sur « les col­la­bo­ra­teurs occa­sion­nels béné­voles » dans le réseau des biblio­thèques, la Ville de Grenoble a demandé un “droit de réponse”, que nous avons publié, mal­gré plu­sieurs réserves sur le fond et la forme. C’est désor­mais le col­lec­tif des biblio­thé­caires de Grenoble en lutte qui réagit

de manière cin­glante sur les réseaux sociaux… au droit de réponse de la Ville.

Les bibliothécaires en lutte lors de l'annonce de la montée à Paris d'une délégation à l'occasion du Salon du livre. © Joël Kermabon - Place Gre'net

Bibliothécaires en lutte lors de l’an­nonce de la mon­tée à Paris d’une délé­ga­tion pour le Salon du livre. © Joël Kermabon – Place Gre’net

« Rarement droit de réponse de la mai­rie n’aura sus­cité autant de ques­tions, d’er­reurs, de confu­sions et d’in­for­ma­tions contra­dic­toires ! À croire qu’il a été écrit par un‑e étudiante‑e sta­giaire non rémunéré‑e… ou un‑e chargé‑e de com” béné­vole ! »

Ainsi démarre la lettre des biblio­thé­caires de Grenoble en lutte, en ligne sur leur page Facebook.

Force est de consta­ter que le texte envoyé par la Ville de Grenoble en droit de réponse à l’ar­ticle de Place Gre’net a piqué au vif le col­lec­tif de biblio­thé­caires. « […] les biblio­thé­caires de Grenoble en lutte ont décidé – béné­vo­le­ment – de faire un droit de réponse au “droit de réponse” de la Ville ». L’adverbe « béné­vo­le­ment » fai­sant allu­sion au sujet ayant entraîné la polé­mique, à savoir, l’encadrement du béné­vo­lat dans les biblio­thèques. Lequel a fait l’ob­jet d’une conven­tion récem­ment votée en conseil muni­ci­pal à Grenoble.

Le recours à des béné­voles « mino­ri­taire et excep­tion­nel » selon le collectif

Dans son “droit de réponse” auto­pro­clamé, le col­lec­tif des biblio­thé­caires en lutte épingle nombres d’as­ser­tions conte­nues dans celui de la Ville, pour ensuite les démon­ter. Ainsi la Ville y affirme-t-elle : « La biblio­thèque muni­ci­pale recourt à des col­la­bo­ra­teurs béné­voles depuis de nom­breuses années : c’est un fait. »

Les biblio­thèques de Grenoble en lutte. © Séverine Cattiaux

Une asser­tion lar­ge­ment à nuan­cer, selon le col­lec­tif. « Oui c’est un fait, rétorque-t-il, tout à fait mino­ri­taire et excep­tion­nel… » Le rédac­teur du texte de la Ville de Grenoble se serait donc emmêlé les pin­ceaux ? Oui, selon eux, de même que les auteurs de la délibération.

Et les biblio­thé­caires en lutte de rela­ter, par le menu, les pra­tiques en vigueur aujourd’­hui dans les bibliothèques.

Pour le col­lec­tif, nul doute que « la mai­rie fait une grande confu­sion entre usa­ger-e‑s béné­voles et par­te­naires asso­cia­tifs béné­voles ». Et de regret­ter au pas­sage que la Ville ne daigne consul­ter les biblio­thé­caires avant de rédi­ger et faire voter ses déli­bé­ra­tions : « Si les élu-e‑s pre­naient le temps de nous ren­con­trer, on pour­rait leur expli­quer la dif­fé­rence. »

Novlangue épin­glée

La Ville de Grenoble écrit ensuite dans son droit de réponse : « La Ville n’a pas sup­primé une dizaine de postes au sein des biblio­thèques : six départs ne sont pas recon­duits. » Le col­lec­tif de dénon­cer la péri­phrase : « Notez la nov­langue, on ne “sup­prime pas” des postes à la Ville, on “ne les recon­duit pas”. »

Les ani­ma­tions autour du livre en dehors des mis­sions des bibliothécaires ?

Arrive ensuite le sujet cen­tral de la polé­mique. Dans son “droit de réponse”, la Ville réfute toute idée selon laquelle des béné­voles pren­draient la place de biblio­thé­caires. « Les acti­vi­tés pro­fes­sion­nelles sont confiées à des biblio­thé­caires pro­fes­sion­nels », assène l’auteur du texte.

Animation à la biblio­thèque Alliance avant sa trans­for­ma­tion en tiers-lieu © Séverine Cattiaux – Place Gre’Net

Ni ras­suré, ni convaincu, le col­lec­tif ren­voie la Ville aux termes mêmes de sa déli­bé­ra­tion qui sus­citent son trouble : « La déli­bé­ra­tion indique que les usa­ger-e‑s béné­voles pour­ront par­ti­ci­per à l’a­ni­ma­tion de clubs lec­teurs, à l’ac­cueil d’au­teurs, etc. dans les biblio­thèques. Donc, si l’on confie ces ani­ma­tions à des col­la­bo­ra­teurs béné­voles, c’est que la mai­rie ne les consi­dère pas comme des acti­vi­tés pro­fes­sion­nelles de biblio­thé­caires ? Est-ce que l’é­quipe muni­ci­pale pour­rait nous expli­quer en quoi consiste notre métier alors ?  »

Un droit de réponse qui se contredit ?

« Non la Ville de Grenoble ne fait pas appel à des col­la­bo­ra­teurs béné­voles pour les relais lec­ture ni pour un “tiers lieu” et n’a rien voté en ce sens », affirme le “droit de réponse” de la Ville. Une nou­velle affir­ma­tion éton­nante pour le col­lec­tif qui pointe les contra­dic­tions de la Ville :

« Eh ho, les col­la­bo­ra­teurs béné­voles de la com”, il faut accor­der vos vio­lons […] La biblio­thèque “tiers-lieu” […] de l’Alliance, ampu­tée de la moi­tié de son per­son­nel, accueillera-t-elle oui ou non des col­la­bo­ra­teurs béné­voles pour des ate­liers et des ani­ma­tions ??? Les quatre col­lègues de cette biblio­thèque [tiers-lieu] ne pour­ront plus pro­po­ser autant d’a­ni­ma­tions qu’au­pa­ra­vant, c’est cer­tain. »

Le col­lec­tif vigi­lant vis-à-vis de tout « sala­riat masqué » 

« Nous com­pre­nons que cette déli­bé­ra­tion sus­cite des ques­tion­ne­ments », recon­nais­sait la Ville vers la fin de son droit de réponse. Une phrase sai­sie au bond par le col­lec­tif : « Ben, c’est le moins que l’on puisse dire !!! Cela découle peut-être de la façon dont la muni­ci­pa­lité gère « le dos­sier biblio­thèque » depuis juin 2016 : auto­ri­ta­risme, opa­cité, prise de déci­sions arbi­traires et revi­re­ments en tout genre […] »

Lundi 25 septembre 2017, devant l'hôtel de Ville de Grenoble, las après plus d'un an de lutte, et suite au refus du maire de donner suite à la demande de votation citoyenne, le collectif Touchez pas à nos bibliothèques organise l'enterrement et la crémation des trois bibliothèques Prémol, Alliance et Hauquelin ainsi que celle de la participation citoyenne.© Séverine Cattiaux - Place Gre'net

Le 25 sep­tembre 2017, mobi­li­sa­tion des col­lec­tifs Touchez pas à nos biblio­thèques et Bibliothèques de Grenoble en lutte devant l’hô­tel de Ville de Grenoble. © Séverine Cattiaux – Place Gre’net

Et le col­lec­tif de ter­mi­ner sa mis­sive sur une envo­lée plus tein­tée de doute et de colère que de lyrisme : « Dans un contexte de baisse de dota­tions de l’État, d’aus­té­rité bud­gé­taire et de volonté de la muni­ci­pa­lité de Grenoble d’or­ga­ni­ser un ser­vice public dégradé, on peut légi­ti­me­ment s’in­quié­ter de l’in­té­rêt sou­dain porté aux usa­ger-e‑s béné­voles. Ne sera-t-il pas ten­tant, dans l’a­ve­nir de rem­pla­cer des agent-e‑s (en biblio­thèque et dans les autres ser­vices) par des béné­voles pour faire des éco­no­mies et pré­sen­ter cela comme un for­mi­dable pro­jet de démo­cra­tie par­ti­ci­pa­tive inno­vant ? »

Encore plus sur ses gardes, depuis la mis­sive de la Ville, le col­lec­tif des biblio­thé­caires en lutte pré­vient : « Si l’on confie à des béné­voles des mis­sions (ate­liers, ani­ma­tions) dévo­lues aux biblio­thé­caires, pour­quoi ne pas à terme rem­pla­cer les seconds par les pre­miers ? Il ne fau­drait pas que le recours au béné­vo­lat se trans­forme en sala­riat mas­qué. Nous res­te­rons donc vigi­lant-e-es. »

Séverine Cattiaux

Séverine Cattiaux

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