REPORTAGE - Depuis la mi-février, plusieurs dizaines de migrants, venus principalement d'Albanie et de Macédoine, ont établi un campement de fortune dans le parc Valmy, derrière le Stade des Alpes. Cette occupation, initiative de l'Assemblée des locataires, mal logé-e-s et sans logement, visait à dénoncer les expulsions sans relogement et à exiger la réquisition des hébergements vacants. Deux mois après pourtant, la situation semble au point mort et le camp Valmy voit ses effectifs gonfler au fil des semaines, au point d'atteindre la centaine ces derniers jours. Sur place, les demandeurs d'asile, dont une majorité de familles avec enfants, dorment sous des tentes et survivent dans des conditions précaires. Un quotidien fait de solidarité et “système D”.
Un jeudi de la mi-mars. Derrière l'entrée Est du Stade des Alpes, le parc Valmy, bande de verdure jouxtant l'avenue éponyme, à deux pas des berges de l'Isère, s'anime à la tombée de la nuit.
Comme presque tous les soirs depuis un mois, une partie des habitants du camp se sont installés sur des chaises en plastique et rondins de bois, disséminés autour du brasero artisanal.
Le feu apporte une lumière et une chaleur bienvenues, alors que la fraîcheur de ces ultimes soirées d'hiver hérisse gentiment les poils. On discute, on plaisante, on rigole même parfois. Des instants de répit unanimement appréciés, au milieu d'un quotidien aussi incertain que morose.
« Le Samu ne vient plus ici »
Cette fois-là pourtant, Viktor* se tient à l'écart des joutes verbales, visiblement inquiet : sa fille de deux ans pleure dans ses bras, elle traîne depuis la veille une fièvre de 39 °C. Le paracétamol n'a pas fait baisser sa température et, ici, personne n'est médecin. Le père de famille macédonien sollicite donc l'aide de Raphaël. Membre de l'Assemblée des locataires, mal logé-e-s et sans logement, ce dernier vit depuis le début de l'occupation sur le camp, dont il est devenu une sorte d'intendant et référent officieux.
Dans un monde “normal”, en cas de crainte ou d'urgence, on appelle le 15. Problème : « Le Samu ne vient plus ici », s'indigne Raphaël. Reste les urgences mais Viktor craint de « ne pas réussir à [se] faire comprendre », sa maîtrise du français se limitant à quelques mots.
Heureusement, la fièvre se stabilise et après discussion, décision est prise d'emmener la fillette à Médecins du monde le lendemain matin.
Finalement, tout sera bien qui finit bien mais – cet exemple l'illustre parfaitement – sur le camp, même les situations les plus banales peuvent s'avérer problématiques.
Des conditions de vie précaires, sans eau courante ni électricité
Comme la plupart des autres familles présentes, Viktor, sa femme et ses enfants dorment depuis bientôt deux mois sous la tente, dans le parc Valmy. Tout est parti d'une action émanant de l'Assemblée des locataires, mal logé-e-s et sans logement, née au début de l'hiver 2015 et regroupant des locataires précaires, des personnes à la rue et des membres de divers collectifs et associations.
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