REPORTAGE – Environ 200 personnes se sont réunies, vendredi 10 février, place Notre-Dame à Grenoble, pour réclamer « Justice pour Théo », le jeune homme d’Aulnay Sous-Bois, victime de graves violences policières, le 2 février dernier.
« La police mutile, la police assassine » scandent environ 200 personnes aux alentours de 18 heures 30, place Notre-Dame, à Grenoble.
Dans les rangs, la colère populaire est palpable : « Théo doit être la dernière victime de violences policières. Que Justice soit faite ! » clame une manifestante au microphone, ensuite applaudie par la foule.
Pour les manifestants, « l’affaire Théo » est loin d’être un cas isolé, les noms d’Adama Traoré et Jean-Pierre Ferrara, revenant ainsi à plusieurs reprises lors du rassemblement. L’objectif de ce dernier : dénoncer des violences et des humiliations policières plus globales. « Si on veut que la police reste républicaine, il faut la surveiller et dénoncer les injustices », estime Manuel, un quadragénaire membre de La France Insoumise.
« Police partout, Justice nulle part »
« Police partout, Justice nulle part » scandent les manifestants, inquiets de l’avenir des institutions publiques. Pour eux, ce rassemblement est l’occasion de questionner la place de la police dans une société démocratique. « La police est censée être exemplaire, elle n’est pas supposée faire justice elle-même. C’est dangereux pour la démocratie, d’autant plus que leurs pouvoirs vont être renforcés », estime Hugo, un jeune étudiant qui fait référence au projet de loi sur la légitime défense.
Certains manifestants considèrent que les forces de l’ordre s’acharnent davantage sur les « jeunes des cités » : « C’est toujours le même public qui est ciblé, souvent des minorités qui ne sont pas assez représentés », estime Hugo.
Enfin, la quasi-totalité des personnes présentes place Notre-Dame se disent « choquées » et « scandalisées », par les conclusions de l’enquête de l’Inspection générale de la police nationale (IGPN) : « Et quoi, la matraque aurait glissé toute seule dans ses fesses ? » s’indigne un jeune manifestant.
Un rassemblement transformé en « manifestation sauvage »
Aux alentours de 19 heures, le slogan « Tout le monde déteste la police » résonne. Un petit groupe de jeunes commence à s’agiter et à lancer des pétards place Notre-Dame. En dépit de l’absence d’autorisation préalable de la préfecture, le groupe se dirige en direction de la place Grenette.
Par effet de foule, une partie des manifestants suit la tête du cortège. « Arrêtez les gars, on va perdre l’autorisation de la préfecture pour la prochaine manifestation », crie un jeune homme, qui tente de stopper la manifestation sauvage.
19 heures 30 : Débordements et vitrines saccagées
Malgré ses efforts, le groupe d’environ une centaine de personnes se dirige place Victor Hugo, où ont lieu de premiers débordements aux alentours de 19 heures 30. En tête du cortège, des jeunes hommes cagoulés dégradent des distributeurs de banque, à l’aide de bouteilles en verre.
À hauteur du cours Berriat, les « casseurs » s’attaquent désormais aux magasins : cette fois-ci, la vitrine d’une compagnie d’assurance est totalement brisée. Tout comme celle d’une agence bancaire. Suite à ces actes de vandalisme, plusieurs personnes quittent le cortège.
Reportage : Joël Kermabon et Anaïs Mariotti.
Des forces de police discrètes
De nombreux camions de police étaient postés à plusieurs endroits de la ville. Probablement pour ne pas envenimer une situation déjà tendue, les forces de l’ordre se sont pourtant fait très discrètes lors de ce rassemblement. La foule s’est dispersée à hauteur du quartier Saint-Bruno, sans aucune interpellation visible.
Alors que les tensions montent partout en France, la famille de Théo avait lancé un appel au calme, le 7 février dernier. La sœur du jeune homme, toujours hospitalisé, avait déclaré pour le Parisien : « Ce n’est pas seulement Théo qui attend, ce n’est pas seulement sa famille qui attend. Toute la France attend que les personnes en uniforme respectent leur travail. »
Avant d’ajouter : « La Justice est là pour faire son travail et elle le fera car face à des actes comme ça, il n’y a pas le choix, il faut agir. On demande à tous ceux qui créent des incidents, d’attendre dans le calme, et de faire confiance à la Justice. »
Anaïs Mariotti