DÉCRYPTAGE – Rompre l’isolement des migrants qui arrivent en France, les soutenir dans leur long parcours jusqu’à l’obtention du droit d’asile ou d’un titre de séjour… Telle est la mission qu’acceptent d’endosser des citoyens qui décident, un jour, de devenir leur parrain ou marraine. Un engagement officialisé à Grenoble, lors d’une cérémonie de parrainage républicain. Rencontre avec ces citoyens engagés.
« Il y a des jours où il me dit : « J’en ai marre, je repars en Géorgie. » Mais il n’a aucune attache là-bas. Toute sa famille est ici, son ex-femme, ses trois enfants, ses parents aussi… », raconte Pierre, parrain de ce Géorgien, demandeur d’un titre de séjour depuis… 2008. Titre qu’il n’a toujours pas. En attendant, il n’a pas le droit de travailler et demeure sans domicile fixe…
Pierre ne l’a, durant toutes ces années, jamais perdu de vue. Il a aussi fait preuve de patience pour lui venir en aide. « On ne s’est vraiment compris qu’au bout de deux ans ! Il m’a alors fait confiance et a bien voulu me montrer ses documents. » Car le filleul ne parlait pas français. Dévouement encore du parrain qui n’a pas hésité à consacrer une partie de ses week-ends à emmener son filleul et ses trois enfants passer des moments un tant soit peu agréables, en famille, dans des endroits plus sympathiques que… la rue.
Le parrainage républicain implique différentes formes d’accompagnement selon les circonstances, les besoins des filleuls, les possibilités des parrains et marraines, mais aussi leurs affinités. « Le parrainage, c’est un accompagnement d’un demandeur d’asile, d’un débouté du droit d’asile ou de tout migrant ayant besoin de protection, à trois niveaux : dans les démarches administratives, sur le chemin de l’intégration et sur le plan affectif », rappelle Patricia L’Écolier, présidente de l’Association de parrainage républicain des demandeurs d’asile et de protection (Apardap). Cette association créée en 2008, qui agit depuis les années 2000 sous forme de collectif, coordonne les démarches de parrainages républicains en Isère.
« 250 parrains et marraines sont actuellement actifs »
Depuis une dizaine d’années, un millier de parrainages républicains de demandeurs d’asile ou de migrants ayant besoin de protection a été réalisé en Isère. « 250 parrains et marraines sont actuellement actifs », indique Patricia L’Écolier. C’est l’Apardap qui met en relation les futurs parrains et marraines avec les demandeurs d’asile ou de protection, que l’association surnomme les « accueillis ». « Nous les mettons en contact selon leurs points communs – un même métier, des mêmes goûts… – quand c’est possible. »
Deux à trois fois par an, l’association organise des cérémonies de parrainage dans les mairies de la région. « Ce sont essentiellement les mairies de gauche qui acceptent d’organiser des cérémonies. On a un peu de mal avec les communes dirigées par les élus LR [Les Républicains]. Et on ne contacte pas les mairies non républicaines… », déclare Simone Targe, l’un des piliers de l’Apardap.
Au nombre des parrains et marraines actifs en Isère : le maire de Grenoble. Adepte du parrainage républicain, Eric Piolle s’est engagé auprès de filleuls dès 2003. Le 23 mars dernier, la Ville de Grenoble a organisé avec l’Apardap une cérémonie particulièrement importante, durant laquelle 55 parrainages ont été “officialisés”. A cette occasion, Eric Piolle a co-parrainé un jeune demandeur d’asile.
Les cérémonies de parrainage n’ont pas de valeur juridique, mais leur portée symbolique est très forte. Les parrains, marraines et filleuls se voient en outre délivrer une carte de parrainage, dûment signée par les élus et estampillée du sceau de la commune. « Le tout premier papier pour ces demandeurs d’asile… », souligne Simone Targe.
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