DÉCRYPTAGE – Plusieurs élus de la Métropole grenobloise se mobilisent contre la baisse des dotations de l’État. Alors qu’une journée d’action était organisée le samedi 19 septembre au niveau national, ceux-ci dénoncent dans un communiqué de presse commun la « mise en danger des communes ». Explications.
Les élus de la métropole grenobloise se mobilisent contre la baisse des dotations de l’État. © Wikipedia
Plusieurs milliers d’élus de tous bords politiques ont participé, le 19 septembre dernier, à une journée d’action pour protester contre la baisse de 30 % des dotations de l’État, à l’appel de l’Association des maires de France.
Entamée en 2014, cette diminution doit représenter, sur trois ans, une baisse de 11 milliards d’euros pour les collectivités territoriales, dont 7,1 milliards pour les communes. Les « collectivités font d’ores et déjà des efforts de gestion important » et « modernisent chaque jour les services publics locaux », estiment Christophe Ferrari, président de Grenoble-Alpes Métropole, Eric Piolle, maire de Grenoble, ainsi que plusieurs autres élus locaux dans un communiqué de presse commun en date du 19 septembre (cf. liste des signataires en encadré).
Des services publics menacés ?
Ce manque à gagner inquiète certains maires de l’agglomération qui craignent que cela ne pèse sur la qualité des services publics locaux. « La réduction des dotations au bloc communal fait courir un risque », estime Christophe Ferrari, également maire de Pont-de-Claix.
Christophe Ferrari, président de la Métro. © Paul Turenne – placegrenet.fr
« Tout ce qui fait la qualité de vie et le lien social sera mis à mal : crèches, écoles, cantines, centres d’action sociale, logements, transports, équipements sportifs et culturels, collecte et gestion des déchets, entretien des espaces verts, cimetières, accueil du public, voirie… », expliquent les élus. Avant d’ajouter qu’« elle entraîne déjà partout une baisse importante de l’investissement public qui est alimenté à 70 % par les collectivités locales. Moins d’investissement, ce sont des carnets des commandes moins remplis pour toutes les entreprises de nos territoires, et donc du chômage en plus ».
Un cercle vicieux ouvertement dénoncé par le maire de Grenoble : « En dépit de déclarations ambitieuses, le gouvernement préfère mener une politique récessionniste mortifère qui place toute l’économie locale dans une situation intenable ».
Comment compenser cette diminution ?
Pour compenser cette baisse des dotations de l’État, certains communes ont pris le parti d’augmenter la fiscalité locale. À Grenoble, le maire Eric Piolle s’est lui engagé à maintenir le taux d’imposition. Et pour cause, les impôts locaux de la capitale des Alpes comptent parmi les plus élevés de France par an et par habitant. La taxe d’habitation s’élève ainsi à 30 %, contre 10,32 % au niveau national, selon une récente étude du Forum pour la gestion des villes et des collectivités territoriales. Quant à la taxe sur le foncier bâti, elle est de 38 %, contre 18,90 % au niveau national.
Des chiffres que ne conteste pas Hakim Sabri. L’adjoint à la ville de Grenoble en charge des finances reconnaît que « Grenoble a des taux d’imposition parmi les plus élevés et une dette importante ». « Ce sont des leviers avec lesquels on ne peut jouer mais il n’est pas exclu de revisiter l’offre de service public, comme fermer des piscines vétustes et revoir les subventions accordées aux associations », ajoute l’élu.
Jouer sur la masse salariale
Au-delà, ce sont surtout les communes de moindre envergure qui seront les plus touchées, à l’image de Pont-de-Claix. Pour son maire, Christophe Ferrari, jouer sur la masse salariale des communes et intercommunalités ne suffira pas.
Eric Piolle, maire de Grenoble, et Hakim Sabri, adjoint aux finances. © Paul Turenne – placegrenet.fr
« Cette baisse brutale des dotations […] ne peut être compensée par les seuls efforts de mutualisation et de rationalisation de l’action publique », estime-t-il. Et pour cause, la part des dotations dans le budget de l’intercommunalité n’a cessé d’augmenter : elle représente désormais jusqu’à 41 % des recettes et constitue une part essentielle des ressources des communes.
Un point de vue plus ou moins partagé par Hakim Sabri. « C’est un poste important dans les dépenses de la ville. Or on ne peut pas agir sur la masse salariale. Même si on le voulait, on ne pourrait pas. Du coup, pour pouvoir en supporter la charge, on essaie de mutualiser les services », rappelle-t-il.
Une baisse à relativiser ?
Cette diminution des ressources, redoutée par les élus locaux, serait pourtant à relativiser selon le gouvernement. Marylise Lebranchu, la ministre de la Décentralisation et de la Fonction publique, a récemment rappelé que la baisse des dotations ne représenterait pour les communes « qu’une diminution de 1,84 % » de leurs recettes annuelles de fonctionnement, « soit en moyenne 28 euros par habitant ».
À Grenoble, les dotations de l’État ont baissé de 2,62 millions d’euros entre 2012 et 2014 et la commune iséroise a perçu 42,31 millions d’euros en 2014, selon les chiffres fournis par le ministère de l’Économie et des Finances. La mairie ne contredit pas ces chiffres mais Hakim Sabri tient à rappeler que la Ville va perdre 5,8 millions d’euros par an entre 2015 et 2017. « Les communes se seraient trouvées en difficulté sans cette baisse des dotations globales de fonctionnement, mais celle-ci vient accentuer les difficultés auxquelles elles sont confrontées. Des communes vont être dans le rouge et seront mises sous tutelle », présage-t-il.
De son côté, l’Association des maires de France maintient son appel à la mobilisation jusqu’à son congrès de la mi-novembre. Sa pétition lancée sur Internet a déjà recueilli plus de 40.000 signatures.
Maïlys Medjadj
Liste des signataires de l’appel du 19 septembre :
- Christophe Ferrari, président de Grenoble-Alpes Métropole, maire du Pont-de-Claix
- Eric Piolle, maire de Grenoble, coprésident du groupe RCSE
- Francie Mégevand, maire d’Eybens, coprésidente du groupe RCSE
- Jacques Nivon, maire de Champ-sur-Drac, président du groupe ADIS
- Jean-Paul Trovéro, maire de Fontaine, président du groupe CCC
- Denis Roux, maire de Noyarey, président du groupe des non-inscrits – société civile
- Raphaël Guerrero, maire de Jarrie, vice-président aux finances de Grenoble-Alpes Métropole
Une réunion publique pour comprendre le budget 2016 de Grenoble
Le Rassemblement citoyen de la gauche et des écologistes de Grenoble organise, ce jeudi 24 septembre, à partir de 20 heures dans la salle de la Maison des habitants du centre ville, une réunion publique autour du budget 2016 de la Ville de Grenoble. Son thème : “Que faire face à la politique d’austérité du gouvernement qui vise à casser le service public à Grenoble comme dans d’autres communes ?”
Les élus de la majorité municipale souhaitent expliquer à cette occasion « les mécanismes financiers mis en place par le gouvernement et qui auront des impacts très négatifs sur l’emploi local et le service public communal ».