FOCUS – A partir de janvier 2015, la communauté d’agglomération grenobloise deviendra une métropole réunissant 49 communes, soit 440 000 habitants. Cette métropolisation, qui s’effectue dans le cadre d’une modernisation de l’action publique territoriale, implique un transfert des compétences des communes à la métropole. Un défi à relever pour la majorité d’Eric Piolle, alors que l’opposition grenobloise met en doute ses capacités à y parvenir.
Économie, emploi, énergie, logement, transport… Nombreux sont les domaines dans lesquels un transfert de compétences sera effectué de la commune à la métropole. Censée dynamiser l’économie de l’agglomération grenobloise, en donnant une meilleure visibilité à ses centres urbains et en la rendant plus rayonnante aux échelles nationale et internationale, la métropolisation devrait lui permettre d’accroître son attractivité.
Les inquiétudes de l’opposition grenobloise
Oui mais voilà, cette métropolisation ne s’effectue pas sans craintes de la part de l’opposition. A commencer par l’équipe UMP-UDI de Matthieu Chamussy qui a clairement exprimé ses appréhensions envers la majorité d’Eric Piolle. Celle-ci ne saurait tirer tous les bénéfices de cette opportunité que constitue la métropolisation, à cause de son défaut de leadership. Et de citer en exemple sa volonté d’abandonner l’A380 ou sa méfiance à l’égard du système économique mondial.
Matthieu Chamussy enfonce le clou. « Les décisions de la majorité montrent que le rôle de leadership que la ville de Grenoble devrait suivre dans l’intercommunalité est abandonné. » Le conseiller municipal UMP-UDI et société civile déplore, par exemple, la décision de ne plus faire de Grenoble une étape du Tour de France alors que, d’après lui, les retombées économiques du passage des cyclistes dans sa ville sont dix fois supérieures à son coût. « Ce n’est pas pour rien que deux-cents collectivités sont candidates chaque année pour accueillir une étape du Tour de France », assure-t-il.
Autre critique de l’élu d’opposition : les « messages transmis par les acteurs publics grenoblois n’encouragent pas l’implantation d’entreprises sur le territoire métropolitain ». Un frein à l’attractivité, donc. Plus largement, l’opposition grenobloise dénonce le fait que Grenoble – qui a une fonction de centralité dans l’intercommunalité de par sa taille et son économie – ne donne pas l’impulsion qui permettrait à la future métropole d’être dynamique.
Une « fausse polémique »
Interrogé sur le Tour de France, Yann Mongaburu, conseiller municipal de la majorité délégué à l’intercommunalité et président du Syndicat mixte des transports en commun de l’agglomération grenobloise, n’a pas voulu entrer dans une « fausse polémique ». Celui-ci s’est borné à rappeler que d’autres évènements « tout aussi populaires et importants » étaient organisés à Grenoble.
Et l’élu de répondre aux critiques adressées par l’opposition, en affirmant que la majorité ne conçoit pas la métropolisation comme « une extension de la ville-centre » mais comme une occasion de « co-construire avec les autres communes de la métropole ».
« Notre désir est d’assurer un meilleur service public en nous appuyant sur les politiques publiques les plus performantes menées dans n’importe quelle commune de la métropole pour créer un aménagement plus respectueux des besoins sociaux au sein d’une métropole solidaire », précise-t-il. Une mutualisation des compétences au niveau intercommunal à même, selon lui, de rendre plus efficaces les politiques publiques de l’énergie, de l’eau, du transport, de l’emploi et de l’économie.
En matière d’économie, Yann Mongaburu estime que la nouvelle équipe municipale majoritaire ne soutient pas seulement le secteur industriel. Entendez, contrairement à ce qui se faisait avant… Ce rejet de la « mono-activité économique » viserait ainsi à garantir le développement des « secteurs culturels, du tourisme, de la montagne, du logement, qui font vivre un tissu économique local en rendant le territoire plus fort ».
Vers un scrutin au suffrage universel ?
L’opposition de gauche n’a pas manqué non plus de faire entendre sa voix. A l’image de Paul Bron, conseiller municipal du groupe Go citoyenneté, qui a demandé officiellement au maire de Grenoble la tenue d’un conseil municipal extraordinaire sur la métropole. Objectif ? Évoquer l’organisation du transfert des compétences communales à l’intercommunalité.
Ce dernier s’interroge plus particulièrement sur les répercussions de la métropolisation sur les salariés et les entreprises de l’agglomération. Et s’inquiète de l’éloignement des centres de décisions des citoyens qui ne favoriserait pas la proximité entre gouvernants et gouvernés. Sans compter l’élaboration collective défendue par la liste d’Eric Piolle lors des élections municipales.
« Le conseil municipal constitue déjà un lieu de débat dans lequel les questions liées à la métropolisation sont traitées » affirme Yann Mongaburu, pour qui la majorité a pour but d’assurer la proximité entre la société civile et les acteurs publiques au sein de la métropole. D’après lui, ce qui est faisable à l’échelle communale l’est aussi à l’échelle intercommunale. Et « pour rendre la métropole en interaction directe avec ses concitoyens », la majorité d’Eric Piolle a la solution : organiser un scrutin au suffrage universel pour l’élection des décideurs de politiques publiques de la métropole.
La métropolisation apporte donc son lot d’incertitudes. Notamment celle du devenir de l’échelon communal : ne sera-t-il plus que l’exécutant des décisions de la métropole ? Comment réagiront les habitants et les représentants des petites communes comme Vizille, Champagnier ou Mont-Saint-Martin ?
Si bon nombre de questions restent pour l’heure en suspens, le débat est en tout cas bel est bien lancé.
Simon Challemet
La métropolisation, c’est quoi ?
La communauté d’agglomération grenobloise, qui réunit 49 communes et 440 000 habitants, prendra en janvier 2015 le statut de « métropole de droit commun », déjà porté par Bordeaux, Lille, Nantes, Strasbourg, Rennes, Rouen et Toulouse. La naissance de métropoles montre la volonté de l’État de moderniser l’action publique territoriale dans le but de rationaliser les dépenses publiques et de clarifier les compétences de chaque administration locale.
La métropolisation entraînerait également une mutualisation des services et leur distribution plus harmonisée sur le territoire de l’intercommunalité. Le statut de métropole permet à cette dernière d’exercer des compétences étatiques, régionales ou départementales si l’État, les régions et les départements concernés ont donné leurs accords préalables.
La métropole sera dirigée par le conseil communautaire, composé des représentants élus de chaque commune et dont l’un d’eux sera élu Président.