FIL INFO – Orphée Cugat, chercheur grenoblois spécialisé dans les microsystèmes magnétiques, est l’un des quatre lauréats 2019 de la médaille de l’innovation, a annoncé
le CNRS le 12 septembre dernier. Cette distinction récompense depuis 2011 des personnalités dont les recherches ont conduit à des innovations marquantes, notamment sur le plan technologique.
« En réduisant l’échelle, certaines forces de répulsion magnétiques surpassent la gravité ou la tension de surface », s’enthousiasme Orphée Cugat, chercheur grenoblois au Laboratoire de génie électrique (G2Elab)*. Pour avoir su tirer parti de cette étonnante propriété des forces magnétiques, ce directeur de recherche du Centre national de la recherche scientifique (CNRS), expert des milli- et microsystèmes magnétiques, est l’un des quatre lauréats 2019 de la médaille de l’innovation (cf. encadré).
Sa nomination par le CNRS, rendue publique le 12 septembre dernier, le récompense pour avoir inventé des systèmes magnétiques exploitant la miniaturisation, toujours croissante, des technologies. À son actif – excusez du peu – le dépôt de pas moins de douze brevets.
Orphée Cugat recevra sa distinction le 12 décembre prochain lors d’une cérémonie à Paris. Ce, aux côtés de trois autres « as de l’innovation » français : Ane Aanesland, Vance Bergeron et Livio de Luca.
« La miniaturisation décuple les forces magnétiques »
Orphée Cugat ne perd jamais l’innovation de vue. À Grenoble, son groupe a d’abord développé des moteurs et générateurs miniaturés, puis des systèmes originaux en lévitation. Et désormais des applications pour les technologies médicales.
Son équipe est à l’origine de la start-up Enerbee qui développe une bouche d’aération connectée. Celle-ci est en effet capable de récupérer assez d’énergie lors de sa rotation pour alimenter des capteurs intégrés de qualité de l’air.
Dans le domaine de la santé, la start-up en incubation MagIA offre, quant à elle, des diagnostics en quinze minutes pour détecter simultanément les hépatites B et C, et le VIH ou virus du Sida. « Là aussi, la miniaturisation décuple les forces magnétiques qui capturent alors rapidement les marqueurs des pathologies ciblées », explique-t-il.
« J’ai la débrouille dans le sang »
Une chose est sûre, le scientifique, d’abord formé comme ingénieur généraliste aux Arts et Métiers, est comme un poisson dans l’eau dans son laboratoire. Il préfère ainsi explorer de nouvelles applications plutôt qu’endosser l’habit d’entrepreneur et lancer lui-même une start-up. Comment se définit-il ? « J’ai la débrouille dans le sang. J’expérimente, j’invente, mais je ne laboure pas trop longtemps dans le même sillon », assume-t-il.
Sa fibre chercheuse ne date pas d’hier. « Lors de mon post-doctorat en Irlande, il nous arrivait de récupérer du matériel dans les bennes de l’université pour construire nos propres instruments », se souvient-il.
Un état d’esprit qu’il partage avec son collègue et ami Jérôme Delamare jusque dans leur passion commune pour le ski alpin. « On fait de la recherche hors-piste en commando », s’amuse Orphée Cugat. Qui ajoute, filant la métaphore : « Nous sommes sans cesse en quête d’un nouveau champ de poudreuse vierge. »
VM
* G2Elab : CNRS-Grenoble INP-UGA
La médaille de l’innovation, un podium de référence pour les chercheurs
Distinction créée en 2011 sous l’impulsion du ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, la médaille de l’innovation honore chaque année les scientifiques dont les recherches ont conduit à une innovation marquante. Ce sur le plan technologique, thérapeutique ou social. Son objectif ? Valoriser la recherche française issue de l’enseignement supérieur et de la recherche ou du monde industriel.
Trois scientifiques des laboratoires de la délégation CNRS Alpes ont déjà reçu la médaille de l’innovation : le physicien Jean-Pierre Nozières (Spintec – CNRS-CEA-UGA) en 2017, le chercheur en informatique médicale Philippe Cinquin (TIMC – CNRS-Grenoble INP-UGA) en 2013 et le physicien Alain Benoît (Institut Néel – CNRS) en 2012.
Ce podium s’additionne au palmarès de l’ensemble des Talents CNRS Alpes (médailles d’or, d’argent, de bronze et de cristal). Et témoigne « de l’excellence scientifique du sillon alpin », se réjouit le CNRS.