FOCUS – Le département de l’Isère continue de s’inscrire dans la programmation culturelle nationale « Japonisme 2018 ». Le musée départemental de l’Ancien Évêché accueille ainsi l’exposition « Montagne et paysage dans l’estampe japonaise » jusqu’au 31 mars 2019. Une jolie manière de redécouvrir cet art qui nous est devenu si familier mais qui suscite toujours autant de fascination pour l’archipel.
La nouvelle exposition du Musée de l’Ancien Évêché impressionne d’emblée.
La première des œuvres exposées à la vue du spectateur est la plus fameuse : « Sous la vague au large de Kanagawa » (Vers 1829 – 1833), du maître de l’estampe Hokusai.
L’œuvre s’insère dans un ensemble dédié à la thématique « Montagne et paysage dans l’estampe japonaise », que l’on pourra apprécier jusqu’au 31 mars 2019 au musée départemental.
À l’image de l’art de l’estampe en général, ce qui émeut d’abord, c’est que cette grande vague devenue si familière n’en demeure pas moins profondément attachée à la culture nippone. Au loin, le mont Fuji, point culminant du Japon considéré comme sacré, paraît aussi inébranlable que la mer semble démontée.
Les frêles embarcations lovées aux creux des vagues traduisent à merveille l’un des principes issus de la spiritualité bouddhique : la vie terrestre s’incline face à la force de la nature.
La mode de l’estampe paysagère
L’exposition « Montagne et paysage dans l’estampe japonaise » s’organise essentiellement autour du travail de deux maîtres de l’estampe : Hokusai et Hiroshige.
Le premier a donné ses lettres de noblesse à l’art de l’estampe paysagère. Le second lui a fait suite et a continué de sublimer ce genre déjà en vogue. En traitant pour eux-mêmes les sites naturels, les deux artistes sont en accord avec les centres d’intérêt de leurs contemporains.
Les Japonais découvrent leurs paysages entre le début du XVIIe siècle et la fin du XVIIIe siècle, grâce à l’établissement de routes qui rendent la circulation plus aisée.
Une forme de tourisme se développe dont Hokusai rend compte dans sa série Cinquante-trois étapes du Tôkaidô. L’artiste y relate les scènes de vie qui agitent les relais ponctuant la route qui relie Edo (l’actuelle Tokyo) à Kyôto. Ces estampes possèdent un caractère quasi-documentaire qui ajoute à leur intérêt purement esthétique. Ce sujet très à la mode chez les éditeurs sera repris par Hiroshige dans ses Cinquante-trois relais de la route du Tôkaidô.
L’art de la série
Outre le grand raffinement de ces xylogravures – gravures sur bois –, on découvre leur mode de production, très lié aux facteurs économiques inhérents à l’édition. De fait, les artistes produisent leurs gravures en série. Une façon de maintenir l’intérêt comparable à la stratégie du feuilleton dans la littérature populaire.
Au sujet des Trente-six vues du mont Fuji (vers 1831), réalisées par Hokusai, une publicité défendait ainsi l’intérêt de cet art sériel, non sans pertinence : « Ces images dévoilent que le mont Fuji présente un aspect différent selon les lieux. Elles montrent qu’il n’est pas semblable vu depuis la plage de Shirahama ou contemplé depuis l’îlot de Tsukudajima, et cela sera utile à ceux qui étudient la peinture de paysage. »
Ce dernier argument témoigne de la grande popularisation du paysage en tant qu’objet de gravure à part entière. Hokusai, en outre, faisant figure de modèle en la matière, il n’est pas étonnant que son style, qui mêle l’épure au raffinement des couleurs, se soit répandu de la sorte.
Adèle Duminy
Infos pratiques
Exposition du 8 décembre 2018 au 31 mars 2019
2 rue Très Cloîtres, à Grenoble
Entrée libre