FOCUS – Le passage de la tempête Eleanor sur la région se solde par un lourd bilan humain et de fortes perturbations sur le réseau routier du département. Des difficultés augmentées par la conjonction entre fortes pluies et fonte des neiges. Vendredi 5 janvier, les choses reviennent lentement à la normale, font savoir le Département et la préfecture.
Ce début d’année en Isère a été tumultueux et meurtrier. La tempête Eleanor a ainsi causé, jeudi 4 janvier, la mort d’une personne dans sa maison inondée à Crêts-en-Belledonne et la disparition d’un sapeur-pompier dans les gorges du Breda. Le corps d’un agriculteur enseveli sous la neige a également été retrouvé en Savoie, tandis que la veille, en Haute-Savoie, un skieur était tué par une chute d’arbre.
À ce lourd bilan humain s’ajoutent d’importantes difficultés matérielles, notamment sur le réseau routier du département. C’est pourquoi le préfet de l’Isère Lionel Beffre et le président du Conseil départemental Jean-Pierre Barbier étaient présents vendredi 5 janvier au PC Itinisère, où se gèrent les interventions des équipes du Département en cas de signalement d’incidents.
Conjonction entre fortes pluies et fonte des neiges
Et les signalements ont été nombreux durant le passage de la tempête Eleanor. « Le PC reçoit environ 6 000 appels par an… et en a reçu 120 hier », résume Jean-Pierre Barbier. Le département a en réalité été victime de la conjonction de deux éléments : de fortes pluies et un redoux occasionnant la fonte des neiges.
Conséquence ? « Coulées de boue, éboulements, avalanches et inondations statiques », décrit le Département. Le haut niveau de l’Isère au cœur même de Grenoble témoigne par ailleurs de ce cocktail détonnant.
Le responsable du PC Itinisère Olivier Latouille l’assure toutefois : la situation de crise est en passe de se résoudre. « Jeudi, on avait une trentaine de routes fermées suite à la tempête. Ce vendredi matin, on en était à 24, et en milieu de journée à 18 », explique-t-il.
Avant d’ajouter que les coupures ont avant tout affecté des routes secondaires. « Cela n’a pas perturbé plus que cela la vie économique… mais causé des soucis aux gens qui ne pouvaient plus quitter ou accéder à leurs habitations. »
Un exemple de route demeurant coupée ? Olivier Latouille cite le cas de la montée du Col d’Ornon. « Ce sont 2 000 mètres cubes d’eau qui sont tombés. Aussi, c’est un expert géologique qui va intervenir pour donner son avis », explique le responsable Itinisère.
Et Jean-Pierre Barbier d’insister : si la conjonction de deux phénomènes, eau et fonte des neiges, a surpris par sa virulence, les points à risque dans le département étaient pour leur part parfaitement connus des agents, permettant des interventions rapides.
Une centaine d’agents mobilisés durant la tempête
Des agents, le Département en avait mobilisé plus d’une centaine au plus fort de la tempête, auxquels s’ajoutaient encore gendarmes et sapeurs-pompiers. Et si Jean-Pierre Barbier déplore les décès survenus sur le territoire de l’Isère, il s’estime heureux qu’aucun accident mortel n’ait eu lieu sur les routes. « C’est une grande inquiétude : des rochers qui tombent sur une route départementale. Si une voiture se trouve dessous, elle est ensevelie… »
Le président du Département rappelle par ailleurs des règles de sécurité de base : « Les panneaux “arrêts interdits”, ce n’est pas pour faire joli ! Quand on reste cinq ou dix minutes pour faire des photos, on a plus de chances de se prendre un bloc que quand on passe avec son auto… Il ne faut pas paniquer, on peut rouler normalement, mais il faut respecter la signalisation ! »
« Rouler normalement », c’est bien le message que veut faire passer de son côté le préfet. « Il fallait que les personnes en vacances ne se précipitent pas pour partir. Compte tenu des conditions de circulation, ça aurait été une vraie catastrophe. Mais les choses reviennent à la normale et la vie reprend son cours : ils pourront partir tranquillement samedi », se réjouit Lionel Beffre. Et celui-ci de saluer, pour conclure, l’engagement de tous ceux qui, sur le terrain, se sont mobilisés pour faire en sorte que la vie de chacun soit « la moins perturbée possible ».
Florent Mathieu
COULÉE DE BOUE À CLAIX : LA ZONE À RISQUES DE TROP ?
Avant même le passage de la tempête Eleanor, de fortes pluies ont provoqué une coulée de boue meurtrière à Claix, où une femme a trouvé la mort dans son domicile au chemin de Jayères, le samedi 30 décembre. Des dizaines d’habitations ont alors été évacuées et leurs habitants pris en charge pendant plusieurs heures au gymnase de la Bâtie.
Dans un communiqué publié le 3 janvier, le maire de la commune Michel Octru indique que la maison « nécessitera une expertise approfondie ». Tandis que l’habitation située à proximité sera, de son côté, réintégrée par ses habitants à court terme.
Mais le jour même de l’accident mortel, Michel Octru confiait à nos confrères de France Bleu que la maison, centenaire se trouvait bel et bien sur un secteur non constructible. « Ce signalement a été respecté, puisqu’il n’y avait pas de construction engagée sur ce secteur. Mais, de là à dire « Messieurs-dames, vous allez évacuer parce qu’il y a un risque », non, ce n’était pas quelque chose d’envisageable », déclarait-il ainsi.
Les zones à risques en question
Un accident qui remet sur le tapis la problématique des habitations et des constructions sur des zones à risque ? Le préfet de l’Isère Lionel Beffre dit vouloir « éviter toute polémique dans ce type de situation », mais concède que la question « met en lumière la difficulté avec les phénomènes naturels, dans un certain nombre d’endroits du département ».
« Je sais qu’on est tenté de vouloir construire, qu’il s’agisse des citoyens ou des élus. Mais il faut respecter les risques et les aléas ». Et le préfet d’insister sur le cas de la Métropole grenobloise, avec la présence du Drac et de l’Isère, et sa forte densité de population. « Il faut pouvoir être en capacité de poursuivre le développement économique, mais aussi de faire attention aux phénomènes naturels qui, nous le voyons, ne cessent pas, voire s’accélèrent ! »
La question des zones inondables étant évidemment au centre de cette préoccupation, le président du Département Jean-Pierre Barbier espère de son côté la création de « quatre ou cinq syndicats hydrauliques qui géreraient l’ensemble du département, et surtout l’ensemble du bassin versant ». Des syndicats qui permettraient « de bien analyser toutes les situations et d’être dans la prévention. Mais on ne peut pas se prévenir contre tout, et il y aura des interdictions ! », prévient-il.