ÉVÉNEMENT – Les coulisses du collectif citoyen Alternatiba Grenoble sont en effervescence. Et pour cause, un cycle de conférences, débats, films et exposition débute dès ce mardi 8 septembre, en préambule au « Village des alternatives », qui se tiendra le 26 septembre en plein cœur de ville. L’enjeu de l’événement : susciter une mobilisation citoyenne face au défi du changement climatique.
« Les thématiques ne sont pas très drôles mais l’événement va être festif et ludique ! » C’est l’un des messages que Charlotte Combeau, coordinatrice globale et responsable des partenariats au sein du collectif citoyen Alternatiba Grenoble, aimerait faire passer à propos du village des alternatives. Né à Bayonne en 2013 (cf. encadré en fin d’article), le mouvement Alternatiba est « un processus de mobilisation de la société face au défi du changement climatique ».
Le premier village des alternatives à Bayonne en 2013 a réuni 12 000 personnes. © Alternatiba
Charlotte est notre guide pour comprendre comment va s’articuler le village éphémère qui ouvrira ses portes de 9 heures à 20 heures le 26 septembre. « L’idée d’Alternatiba est de mettre en valeur ce qui existe, les solutions et modes de vie alternatifs. Nous souhaitons que les gens puissent s’en saisir », appuie Charlotte. « Nous ne sommes pas juste là pour dire “attention, on est en danger” et c’est tout. »
Un village des artisans du changement
L’épicentre du village se situera en lieu et place du kiosque du jardin de ville pour se déployer sur les places de Gordes, Grenette et Saint-André. Un point central animé puisque, pendant toute la journée, le kiosque sera le théâtre d’un “speed dating” un peu particulier, comme l’explique Charlotte.
Le kiosque du Jardin de ville : épicentre du village des alternatives. © Alternatiba Grenoble
« Nous allons laisser la parole aux alternatives locales concrètes toutes les trente minutes. Jeux, témoignages et interviews se succèderont. » Autour de cette animation centrale, elle y tient, « le village des alternatives est une mobilisation à un instant t qui sort d’un modèle de foire bio ou de forum des associations. Il n’y aura que des acteurs qui vont proposer des activités ludiques et pratiques. »
C’est d’ailleurs un jeu de piste qui fera office de fil conducteur pour le visiteur et lui facilitera la découverte de l’ensemble du site. Son nom : le jeu de la cocotte (!), du nom des petites cocottes en papier confectionnées par les enfants.
« Les personnes pourront se procurer des petites cocottes partout dans le village. Elles vont les inviter à aller sur l’un des huit gros pôles thématiques, où nous leur proposerons des activités ciblées », explique Charlotte.
A l’issue de chaque activité réalisée, la cocotte sera tamponnée et au bout de quatre stands visités, une surprise vous attend !
Les huit pôles thématiques répartis sur le Jardin de ville et aux alentours. © Alternatiba Grenoble
La Métro n’est pas en reste puisqu’elle organise, elle aussi, son jeu de piste “Un pas pour demain. « Le terrain de jeu s’étendra sur toute l’agglomération avec une remise des prix prévue en fin de journée ». Grenoble-Alpes métropole sera d’ailleurs très présente sur l’événement.
Et Charlotte de préciser : « Nous avons une collaboration concrète sur le pôle Déchet-récupération-recyclage. Nous allons mettre en place une brigade de tri et, pour cela, nous avons fait une formation chez eux. Nous contribuons aussi à la mise en place des poubelles trieuses qu’ils installeront en public. »
Le prix libre… tout un concept
Si des surprises seront distribuées tout au long de cette journée, l’un des concepts voulu pour l’événement est d’ores et déjà une surprise en soi. Outre l’accès au village libre et gratuit, l’originalité réside dans la pratique du prix libre sur tous les points de vente du site. Cela comprend le marché paysan sur le pôle Agriculture-alimentation-santé, les livres, la buvette et les coins restauration.
Espace restauration au village des alternatives de Bayonne en 2013. © Alternatiba
Une démarche solidaire dans le but de rendre les produits accessibles à tous et d’éviter la discrimination par l’argent, mais pas seulement. « Il n’y aura pas de prix sur les assiettes. Des personnes seront là pour accompagner et expliquer la valeur des choses dans une démarche pédagogique », précise Charlotte. « La personne qui commande l’assiette propose un prix et la démarche pédagogique se poursuit… Mais je n’en dis pas plus ; sinon ça va casser l’approche ! » Chaque surprise en son temps !
Il est donc évident que le village s’inscrira dans une démarche d’éducation populaire. « Nous sommes sensibles à cela et l’idée c’est que les personnes qui vont venir soient actrices de ce qui va se passer », confirme la jeune militante. Acteurs, les visiteurs le seront de façon certaine en se rendant à l’un des ateliers du “faire soi-même” ou à un atelier créatif.
Les 38 tonnes lors du festival Fort en Son 2015. © Joël Kermabon – placegrenet.fr
« Bon nombre d’activités vont également questionner sur la place et le sens de l’argent. » Ainsi, sur le pôle Finance – Économie sociale et solidaire, une « alternati-banque » sera mise en place pour repenser les échanges. Le « Papomo » pour Parlement populaire mobile répondra, quant à lui, à la thématique du pôle Politique-citoyenneté-démocratie.
Cet avant goût du programme, qui sera beaucoup plus riche le jour J, promet donc une belle ambiance.
Quoiqu’il manque un peu de son, non ? Eh bien, ce n’est pas une mais quinze fanfares qui déambuleront dans la ville et le village ce jour-là ! Une chance que Les 38 tonnes de Grenoble soient champions du monde 2014 et organisent donc le concours international de fanfares à domicile du 25 au 27 septembre… Il aurait été dommage de s’en priver. A vos bouchons d’oreilles tout de même !
Un cycle de conférences pour entrer dans la danse
Pendant que les trompettes se préparent, l’ambiance est studieuse et calme en amont. Car Alternatiba c’est aussi un cycle de conférences, de ciné-débat et d’exposition en préambule du village. Du 8 au 25 septembre, ce ne sont pas moins de dix-sept événements sur seize dates qui inviteront chacun à la découverte, la réflexion et l’échange.
Premier village des alternatives à Bayonne en 2013. © Alternatiba
L’ensemble de la programmation est répartie dans différents lieux de l’agglomération. L’entrée est gratuite, sauf pour les projections dans des salles de cinéma qui conservent leur tarif. Un chapeau sera proposé lors de l’intervention de comédiens.
Si nous devions retenir une seule date, ce serait celle du 10 septembre car elle marque le lancement officiel d’Alternatiba Grenoble. Pour l’occasion, la Ville de Grenoble organise l’exposition « sacrée croissance ».
La journaliste d’investigation Marie-Monique Robin, à l’origine de ce travail, devrait être présente lors du vernissage. Rendez-vous à la Maison de l’international à 18 heures. Le vernissage sera suivi de la projection du documentaire éponyme diffusé sur Arte fin 2014. Cela se passera à la salle Juliet Berto à 21 heures.
Affiche d’Alternatiba Grenoble 2015. DR
La date retenue pour planter le village à Grenoble n’est pas un hasard. En ligne de mire du mouvement, la Cop 21 qui aura lieu à Paris fin 2015 et qui devrait aboutir à un accord international pour tenter de maintenir le réchauffement climatique en deçà de 2 °C. Le 26 septembre est aussi la date à laquelle arrive à Paris le Tour Alternatiba, parti le 5 juin de Bayonne. Souvenez-vous, il avait fait escale à Grenoble le 2 juillet dernier.
« Nous en faisons un événement de masse qui, pour nous, est un point de départ », explique Charlotte. « Nous aimerions sensibiliser les gens qui ne le sont pas encore et nous n’avons pas envie que ça retombe comme après Copenhague », précise-t-elle en référence à la Cop 15 de 2009.
Car, si une mise en œuvre à l’échelle de la politique et de l’économie internationales est nécessaire, elle ne peut pas être dissociée d’une prise de conscience et d’un changement de comportement individuels et citoyens.
La jeune militante déplore aussi que les initiatives citoyennes ne soient pas assez reprises par les médias nationaux. « On compte sur les villages Alternatiba pour les valoriser au niveau national et que ça ne soit pas un effet de mode dû à l’échéance 2015 ».
Bienvenue aux bénévoles !
On l’imagine, les bénévoles du collectif ont à présent les pieds dans les starting-blocks. C’est dans le cadre d’une année de réflexion sur son parcours dans l’animation socio-culturelle que Charlotte, la trentaine, a décidé en novembre 2014 de rejoindre le collectif Alternatiba Grenoble, créé deux mois plus tôt. « C’est un collectif de bénévoles et volontaires avec une organisation horizontale, où chacun peut endosser le rôle qui lui convient ».
Charlotte Combeau et le collectif Alternatiba Grenoble. DR
Un peu plus d’une centaine de personnes sont recensées au sein du collectif, actives de façon très différentes. Selon les disponibilités, compétences et envies de chacun, qui participe aux réunions, qui aux échanges de mails, tenues de stand etc. Une équipe d’une vingtaine de personnes s’active particulièrement. « Il y a des retraités mais aussi des salariés à plein temps avec des enfants. Des mamans qui travaillent trouvent beaucoup de temps pour Alternatiba ! », s’étonne-t-elle.
Ce qu’ils préparent ardemment depuis des mois va enfin voir le jour. Cependant le besoin de renfort est permanent. « Pour le jour J, du vendredi soir au dimanche matin mais aussi pour les jours d’avant », précise Charlotte. Un formulaire de pré-inscription des bénévoles est disponible en ligne sur le site.
Forte de son expérience, elle tient à rassurer les bonnes volontés : « Certaines personnes, en arrivant, pensent qu’elles ne savent rien faire mais en fait tout le monde sait faire des choses et est le bienvenu ».
Delphine Chappaz
Alternatiba Grenoble, entre subventions et financement participatif
Nous l’avons compris, Alternatiba fonctionne surtout grâce aux bénévoles qui donnent beaucoup de leurs temps mais pas seulement. Le collectif a mis en place des partenariats organisationnels multiples. Et puisque le nerf de la guerre reste encore le financement, elle a pu bénéficier de la collaboration et de subventions de la part de la Ville de Grenoble et de la Métro.
Répartition du budget prévisionnel pour le financement du Village des Alternatives. © Alternatiba Grenoble
En parallèle de cette aide financière, le collectif a choisi de mettre en place un financement participatif sur la plateforme de la Nef. « Ce qui est très avantageux c’est que la Nef nous versera l’argent récolté, même si l’objectif n’est pas atteint », précise Charlotte Combeau du collectif.
Aujourd’hui, la barre des 50 % des 10.000 euros espérés est en passe d’être atteinte. L’appel au financement participatif court jusqu’au 13 septembre.
ALTERNATIBA : DEUX ANS DE MOBILISATION DÉJÀ
Alternatiba signifie « alternative » en basque. Car c’est à Bayonne qu’est né, le 6 octobre 2013, ce mouvement citoyen lors d’un rassemblement de 12 000 personnes dans le premier village des alternatives de la sorte. A l’origine du mouvement : l’association Bizi qui signifie « vis ! »… en basque évidemment.
Parrainé par le diplomate Stéphane Hessel puis, après son décès, par sa femme Christiane Hessel, le collectif Alternatiba encourage alors la création d’autres villages des alternatives dans la perspective de la Cop 21 qui se tiendra à Paris fin 2015. Appel entendu puisqu’en 2014 une dizaine d’autres villages en France et en Europe ont été implantés et le mouvement continue d’essaimer avec force. « Ils [collectif basque Alternatiba, ndlr] sont devenus moteurs et proposent tout un accompagnement pour l’organisation des autres Alternatiba », explique Charlotte Combeau, membre d’Alternatiba Grenoble. Par exemple, un kit méthodologique est disponible sur leur site internet.
Alternatiba Bayonne, le 6 octobre 2013. © Alternatiba
En parallèle de ce soutien logistique, le mouvement basque est l’organisateur du Tour Alternatiba. Principe : parcourir 5.637 km en 187 étapes sur six pays européens à la rencontre de dizaines de milliers de personnes autour des alternatives au changement climatique. Ceci également dans la perspective de la Cop21, pendant laquelle Alternatiba prévoit d’organiser le « Village mondial des alternatives » et auquel participeront des membres d’Alternatiba Grenoble. Arrivée du tour prévue le 26 septembre à Paris.
Petit frère de son aîné basque, Alternatiba Grenoble a vu le jour en septembre 2014. L’antenne locale est dans la lignée directe de l’appel de 2013 . « Le collectif pour une transition citoyenne, les amis du Zeybu et le collectif Roosevelt ont voulu faire un Alternatiba à Grenoble au sortir de la première journée de la transition qui a eu lieu en septembre 2014 », précise Charlotte Combeau.
Alternatiba Grenoble est porté administrativement, légalement et économiquement par l’association Santé- Environnement en Rhône-Alpes, mais le collectif n’est pas constitué lui-même en association.