Hébergement d'urgence : à quelques semaines de l'hiver la pression monte à Grenoble pour les associations

Hébergement : la pres­sion monte

Hébergement : la pres­sion monte

REPORTAGE VIDÉO – A quelques semaines de l’hi­ver, plus d’un mil­lier de per­sonnes sont à la rue. Une situa­tion qui sus­cite l’in­di­gna­tion d’asso­cia­tions et d’ha­bi­tants de Grenoble, qui inter­pellent les pou­voirs publics sur l’hé­ber­ge­ment d’ur­gence, tandis que le conseil géné­ral affirme de son côté ne plus pou­voir faire face. État des lieux avant la réunion pré­vue ce mardi à la préfecture.

Hébergement d'urgence : à quelques semaines de l'hiver la pression monte à Grenoble pour les associations

© Joël Kermabon

« Nous sommes en colère face à une situa­tion de plus en plus insup­por­table » s’in­digne Jo Briant, porte-parole de la coor­di­na­tion isé­roise de soli­da­rité des étran­gers migrants (Cisem), à l’o­ri­gine du ras­sem­ble­ment de ven­dredi devant le conseil géné­ral. Une cen­taine de per­sonnes se sont ainsi réunies pour aler­ter l’o­pi­nion publique et venir en sou­tien de la délé­ga­tion qui a ren­con­tré Brigitte Périllié, vice-pré­si­dente du conseil géné­ral délé­guée à l’en­fance en dan­ger, la famille et l’é­ga­lité femme-homme.
« Tous les jours, de nom­breuses per­sonnes – fran­çaises comme étran­gères – y com­pris des familles avec enfants, sont dehors à Grenoble parce qu’elles n’ont pas de solu­tions d’hé­ber­ge­ment, pas de toit ». Plus de mille per­sonnes, dont cer­taines fra­giles ou malades, dor­mi­raient ainsi dans les rues de Grenoble et de l’ag­glo­mé­ra­tion. Parfois la peur au ventre.

Hébergement d'urgence : à quelques semaines de l'hiver la pression monte à Grenoble pour les associations

© Joël Kermabon

« Aujourd’hui, des femmes vivent cachées dans la rue avec leurs enfants parce qu’elles ont peur de se les faire prendre », témoigne ainsi une res­pon­sable de la Maison des Femmes, asso­cia­tion qui s’at­tache à pro­mou­voir l’autonomie des femmes. Et celle-ci de déplo­rer l’ab­sence de réponse adap­tée concer­nant le droit au loge­ment de celles-ci et, en par­ti­cu­lier, leur droit à l’hébergement.
Un constat alarmant
« Actuellement, quand des per­sonnes à la rue télé­phonent au 115 (ndlr : le numéro de l’ur­gence sociale), dans 99% des cas, on leur répond qu’il n’y a aucune place, même pour une nuit », dénonce Jo Briant. Une situa­tion qui n’a rien d’é­ton­nant alors que 500 places d’hébergement ont été fer­mées cet été dans le département.
Le foyer Adoma de la rue Jules Vallès a notam­ment été muré pour empê­cher tout squat. A Grenoble, seules deux struc­tures d’hé­ber­ge­ment sont désor­mais ouvertes toute l’an­née : le Centre d’ac­cueil inter­com­mu­nal de 64 places, rue Henri Tarze, et le centre d’hé­ber­ge­ment « Mimosa », rue Verlaine. Une struc­ture de 150 places « où les gens s’en­tassent dans des condi­tions de pro­mis­cuité et d’in­sa­lu­brité dra­ma­tiques », pré­cise Jo Briant.

Baisse de 70% du bud­get consa­cré à l’hébergement
Simone Targe, membre de la Cisem, confirme : « Ce bâti­ment, qui res­semble plus à un camp en dur qu’à un foyer, ne compte que deux cui­si­nières, des douches cas­sées, un WC pour plu­sieurs dizaines de per­sonnes et sou­vent bou­ché. Sans comp­ter les fils élec­triques à nu. Non seule­ment l’en­semble est vrai­ment cras­seux, mais en plus il est dan­ge­reux ! » Et la situa­tion ne cesse de s’ag­gra­ver, à en croire Jo Briant, du fait du désen­ga­ge­ment crois­sant de l’État et du conseil général.
« Dans le cadre de sa mis­sion de pro­tec­tion de l’en­fance, le conseil géné­ral n’ac­cueille plus que qua­rante familles avec des enfants de moins de trois ans. Cela signi­fie que le nombre de familles accueillies a été divisé par trois en un an ! », s’in­digne Simone Targe.

Hébergement d'urgence : à quelques semaines de l'hiver la pression monte à Grenoble pour les associations

© Joël Kermabon

Yvon Sellier du col­lec­tif La Patate chaude évoque même une baisse de 70 % du bud­get consa­cré à l’hé­ber­ge­ment sur un an. Un chiffre que ne conteste pas Brigitte Périllié : « Auparavant, nous com­pen­sions les failles de l’État. Mais compte tenu de l’aug­men­ta­tion des charges et de la façon dont l’État a limité nos capa­ci­tés à faire évo­luer nos recettes, nous avons dû nous recen­trer sur ce qui est de notre com­pé­tence, à savoir, la pro­tec­tion de la mère iso­lée avec enfant de moins de trois ans. » Et de sou­li­gner que dans ce cadre, le conseil géné­ral va même au-delà de son obli­ga­tion d’ac­com­pa­gne­ment social, en pre­nant en charge leur héber­ge­ment.
Avoir un toit, un droit constitutionnel
« Comme le disait madame Duflot, que les pou­voirs publics lui donnent la liste des bâti­ments vacants ! » tem­pête la res­pon­sable de la Maison des femmes, pour qui des solu­tions d’hé­ber­ge­ment com­plé­men­taires peuvent être trou­vées à Grenoble. « De nom­breux bâti­ments sont vides » et pour­raient être uti­li­sés, tout comme les « nom­breux ter­rains aban­don­nés » que compte l’agglomération.

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© Joël Kermabon

Pour rap­pel, l’État et les col­lec­ti­vi­tés locales ont le devoir absolu de pro­po­ser un toit à chaque per­sonne, selon le Code de l’ac­tion sociale et la Convention euro­péenne des droits de l’Homme. « Il est impor­tant que le conseil géné­ral et la pré­fec­ture entendent notre cri, notre colère » déclare Jo Briant, dénon­çant la non-appli­ca­tion de la loi du 5 mars 2007.
D’après Simone Targe, le pro­blème vient clai­re­ment d’un manque de volonté poli­tique : « Si toutes les com­munes de l’ag­glo­mé­ra­tion gre­no­bloise accep­taient d’a­gir, des solu­tions seraient pos­sibles pour ces mille per­sonnes à la rue. »
40 à 50 per­sonnes de plus par semaine

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« Les sommes ne sont jamais suf­fi­santes car plus on accueille de gens et plus il y en a », déplore de son côté Brigitte Périllié. D’autant que 70 % des per­sonnes à la rue seraient sans papier et n’au­raient donc pas voca­tion à res­ter sur le ter­ri­toire au yeux de l’État. « Chaque semaine, ce sont 40 à 50 per­sonnes de plus qu’il nous faut accueillir. Comment fait-on ? Il faut aussi que ces asso­cia­tions recon­naissent et admettent que nous sommes à un point de satu­ra­tion et que nous ne pou­vons pas déve­lop­per des accom­pa­gne­ments et des héber­ge­ments à l’in­fini. Nous sommes limi­tés tant en terme d’or­ga­ni­sa­tion que de moyens. »
Ce mardi, une délé­ga­tion sera reçue par Richard Samuel, le pré­fet de l’Isère. Une réunion à laquelle n’a pas été convié le conseil géné­ral, ce que regrette Brigitte Périllié : « Nous pré­fé­rons tra­vailler avec la pré­fec­ture. Encore fau­drait-il qu’elle nous invite autour d’une table, ce qu’elle n’a pas fait depuis long­temps. » Quant aux asso­cia­tions, elle espèrent a minima qu’une solu­tion par­tielle puisse être rapi­de­ment trou­vée. « Nous deman­dons que des fonds soient déga­gés pour héber­ger la nuit ceux qui sont dehors sans aucune autre solu­tion », affirme Jo Briant. Et d’a­jou­ter, phi­lo­sophe : « Il n’est pas besoin d’es­pé­rer pour entre­prendre ! »
Véronique Magnin et Muriel Beaudoing
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