DECRYPTAGE – Échirolles est la première ville en France à avoir élaboré une cartographie des émissions d’ondes électro-magnétiques, afin de mieux connaître l’impact de la téléphonie mobile. Dans cette commune, pas de charte signée avec les opérateurs, ni de collectif de riverains en grogne contre les antennes-relais, mais un comité consultatif qui entend informer les habitants et jouer son rôle d’instance de concertation.
mise en place à Échirolles grâce à l’aide du Centre de recherches et d’information indépendant sur les rayonnements électromagnétiques non ionisants (CRIIREM). Une première en France qui résulte d’un important travail de concertation, de dialogue et d’information. Services de la ville, opérateurs, associations et habitants participent ainsi autour d’une même table à un comité consultatif qui traite les demandes d’installation d’antennes.
Si la cartographie n’est pas tout à fait terminée, le document offre déjà un bon aperçu des émissions d’ondes dans la ville. Et confirme l’impact de la téléphonie mobile sur les espaces publics. « Nous avons aussi relevé des taux d’émission dans les habitations, où il y a un impact cumulé », souligne-t-on au service développement durable d’Échirolles. Ondes intra-muros, wi-fi, micro-ondes s’ajoutent aux champs électromagnétiques émis par les téléphones portables, brouillant ainsi les « responsabilités ».
Marge de manœuvre étroite
En ce qui concerne les antennes, la ville a fixé ses règles : pas d’installation sur le domaine public, ni à moins de cent mètres des écoles et des crèches, comme le stipule le décret de 2002. Mais la marge de manœuvre des collectivités est étroite. Car la loi, en France, ne dit pas grand-chose. Pour les opérateurs de téléphonie mobile, pas d’obligation d’informer. Pas non plus de seuils de puissance à respecter, le décret de 2002 se bornant à fixer les valeurs limites à 41 et 61 volts par mètre (V/m). Soit les niveaux parmi les plus élevés en Europe.
Difficile dans ce contexte de contraindre les opérateurs… Échirolles a bien essayé de limiter la puissance des antennes relais à 0,6 V/m, comme le recommande une résolution du Conseil de l’Europe. Mais elle a finalement dû faire machine arrière, les opérateurs ayant grincé des dents. Faute de pouvoir aller plus loin, la ville a abandonné l’idée de signer une charte et s’en est remise à un autre texte qui a valeur légale en France : le code des postes et des communications électroniques. Lequel fixe la barre à 3 V/m.
Cohérence territoriale
Désormais, Échirolles y voit un peu plus clair. Sur ses dix-sept antennes relais, deux affichent des puissances bien trop élevées, entre 7 et 10 V/m. Et le travail de concertation du comité consultatif semble porter ses fruits. Orange, qui a installé avec Bouygues Télécom une antenne sur le pylône d’EDF dans la zone d’activités de Comboire, prévoit ainsi de « ré-azymuter » son installation. Comprenez de la réorienter.
Quant au second site « sensible », le toit d’un copropriété de l’avenue Casanova, il doit encore faire l’objet d’une seconde campagne de mesures, effectuées cette fois-ci par un organisme agréé par le Comité français d’accréditation (COFRAC). De quoi rassurer les opérateurs qui ne voient pas d’un bon oeil le CRIIREM, jugé trop partisan.
Tandis que la communauté scientifique est toujours divisée sur la question de la nocivité des ondes, les opérateurs continuent de déployer leur réseau à marche forcée. Après la 2 G et la 3G (*), Échirolles a vu arriver quatre antennes 4G, permettant de télécharger encore plus vite. Et la 5 G est dans les cartons. Alors que la technologie avance vite, très vite, le débat public fait du surplace. De même que la cohérence territoriale. Car la question des ondes implique une coordination intercommunale, les champs électro-magnétiques ne s’arrêtant pas aux frontières administratives. Une évidence que répète depuis trois ans la ville d’Échirolles, sans visiblement être entendue…
Patricia Cerinsek
(*) La 2G est la deuxième génération de téléphones mobiles (norme GSM en Europe) qui permet de communiquer mais aussi de transmettre des messages textes type SMS ou multimédia type MMS. La 3G (norme UMTS en Europe) propose un plus haut débit de transmission permettant l’accès à l’Internet haut débit ou de transmettre des données vidéo.
Connaître quartier par quartier les émissions d’ondes électro-magnétiques dans la ville. Voilà ce que va permettre la cartographie