FOCUS – Déterminé à faire entendre sa voix lors des élections municipales, le Parti animaliste a choisi de s’allier à la liste d’Éric Piolle. Quant au Mouvement hommes animaux et nature, il a rejoint la liste du candidat Alain Carignon. Objectif commun de ces ralliements à des listes électorales grenobloises : montrer aux citoyens que la question animale est aujourd’hui éminemment politique. De son côté, la candidate divers droite Mireille d’Ornano avait déjà pris bien plus tôt fait et cause pour les animaux.
La cause animale s’invite dans la course des municipales à Grenoble. En témoigne ce (faux) bureau de vote installé par l’association L214 rue Félix-Poulat, ce samedi 7 mars de 14 h 30 à 16 h 30.
L’occasion de découvrir, à l’aide de bulletins géants, les candidats aux élections municipales engagés ou non pour la cause animale.
L’observatoire Politique & Animaux a en effet recensé les candidats engagés (ou non) à réduire la souffrance animale via les compétences municipales. En l’occurrence, parmi les candidats à la mairie de Grenoble, seuls Éric Piolle et Mireille d’Ornano ont signé l’engagement « Une ville pour les animaux ».
Mireille d’Ornano, défenseuse de la cause animale
L’ancienne députée européenne Front national Mireille d’Ornano, aujourd’hui candidate sans étiquette, a toujours défendu la cause animale, de même qu’elle a conduit de nombreux combats pour l’écologie.
Elle est ainsi notamment connue pour son action contre le trafic d’animaux au Parlement européen.
Membre de la Commission Environnement, santé publique et sécurité alimentaire, elle a également été rapporteur de l’avis de la Commission environnement sur le rapport d’initiative « Secteur apicole européen ». Et a tenté durant des années de faire interdire tous les pesticides toxiques pour les abeilles et la santé humaine. Elle a ainsi demandé, sans succès, l’interdiction sans délai des néonicotinoïdes à l’Union européenne.
Sur Grenoble, Mireille d’Ornano prévoit des actions pour le « bien-être humain et animal ». Notamment par la création de zones dédiées aux chiens, où ils pourront se déplacer librement ou faire leurs besoins. Elle trouve en revanche qu’il ne faut pour le moment pas imposer trop de repas végétariens dans les cantines, dans une logique de progressivité.
Le Parti animaliste a rejoint la liste d’Éric Piolle à Grenoble
Éric Piolle, le maire sortant, a quant à lui fait le choix de s’allier à un parti défendant les animaux : le Parti animaliste (cf. encadré). Engagée dans la campagne des municipales depuis avril 2019, Sandra Krief, est ainsi désormais sur la liste de Grenoble en Commun où elle compte porter les valeurs de son parti.
Parmi les mesures intégrées au programme d’Éric Piolle, « la création d’une délégation à la protection animale et à la biodiversité au sein du conseil municipal » ou encore le fait de « permettre aux personnes âgées dans les Ehpad d’accueillir leurs animaux domestiques, comme dans d’autres structures d’accueil, d’urgence par exemple ».
Le rapprochement a eu lieu au début de l’automne. « L’existence du parti animaliste va permettre de franchir un cap dans la prise en compte de la condition animale et du bien-être des animaux », estime Éric Piolle.
Selon le maire-candidat, les mesures du Parti animaliste viennent conforter une politique alimentaire visant à développer les repas végétariens et végétaliens. Une démarche plus respectueuse des êtres vivants… dans la mesure où on ne les mange pas. Éric Piolle a également signé la charte du parti animaliste. L’objectif aujourd’hui : intensifier les mesures dans ce domaine au niveau local. « Nous sommes un des éléments de la biodiversité en interaction avec l’ensemble des espèces animales », rappelle-t-il.
Une sensibilité tardive à la cause animale
Si le maire exprime aujourd’hui le désir de s’engager pour la cause animale, d’aucuns pourront toutefois juger cet engagement pour le moins tardif, voire opportun en cette période électorale, le maire s’étant jusque-là peu préoccupé de cette cause.
En 2014, seul l’engagement 43 de son programme intitulé « Ramener des animaux en ville » abordait cette question, et uniquement vue sous l’angle de la biodiversité (implantations de ruches, nichoirs pour petits oiseaux…). Et l’action de la municipalité dans ce domaine s’est surtout cantonnée à cette approche, avec un soutien apporté à la Ligue de protection des oiseaux et à France nature environnement (ex-Frapna) Isère.
Côté végétarisme, rien d’avant-gardiste. La Ville de Grenoble a ainsi attendu l’initiative du lundi vert – jour par semaine sans viande ni poisson lancé en janvier 2019 au niveau national par Laurent Bègue, professeur à l’Université Grenoble-Alpes – pour proposer des repas végétariens dans les cantines. Pas mieux que les autres, donc.
Éric Piolle a, par ailleurs, mis très longtemps à se positionner par rapport à la présence de cirques avec animaux, contrairement à certains maires qui les interdisaient sur leur commune. Et ce malgré les pétitions qui ont circulé durant des années sur Grenoble pour le lui demander. Celui-ci s’est ainsi contenté, sous la pression des associations, de faire voter en conseil municipal en juillet 2018 un vœu interpellant l’État sur la condition animale. Vœu qui est d’ailleurs resté pieux, dans la mesure où le Grand cirque avec animaux de Saint-Pétersbourg, s’est installé sans être inquiété début décembre 2019 sur le parking d’Alpexpo… au grand dam des défenseurs de la cause animale.
Le Mouvement hommes animaux et nature allié à Alain Carignon
Le Mouvement hommes animaux et nature (Mhan) créé en 1996 a, lui, déjà participé aux élections législatives de 2004. Aujourd’hui, il espère, en rejoignant la liste Société civile, apporter des changements considérables à la Ville de Grenoble en matière de cause animale. C’est Josiane Hirel, militante associative de terrain engagée pour la cause animale, qui représente le Mhan sur la liste d’Alain Carignon afin de faire porter la voix des animaux.
Les « hommes », les « animaux » et la « nature » étant « indissociables », le Mhan veut agir pour garantir un équilibre entre ces trois éléments. L’objectif : protéger la biodiversité et instaurer une relation d’égalité à l’égard des êtres vivants.
En tant que bénévole sur le terrain, Josiane Hirel affirme avoir pris conscience de la misère humaine et animale. « Aujourd’hui, il est urgent d’agir, de penser et de vivre autrement », affirme-t-elle.
La candidate de la liste d’Alain Carignon déplore de grandes souffrances dans le monde d’aujourd’hui : « insécurité, saisons décalées, souffrance animale, abattoir, élevages intensifs, abandon… ».
Des objectifs locaux pour les animaux
Le Mhan a créé une liste de propositions au sein du Collectif de la Société Civile. Ainsi, prévoient-ils notamment la « création d’un fichier des maltraitances et abandons ». Mais aussi d”« associer le monde du handicap à la protection animale » en créant du lien social.
Josiane Hirel souhaiterait notamment multiplier les centres occupationnels pour enfants handicapés, dédiés à la création de « petites maisons ». Ces dernières accueillent les chats errants afin de les nourrir, de garantir leur suivi, de leur apporter des soins et de les stériliser et ainsi d’éviter leur prolifération. De quoi valoriser en outre les créations des enfants handicapés.
Lise Gaeta
Plus de 5 000 adhérents au Parti animaliste en France
Créé en 2016, le parti animaliste a tout de suite pris part aux élections législatives. Le parti n’a, depuis, cessé de grandir pour finir par prendre une place non négligeable sur l’échiquier politique. Sa co-fondatrice et co-présidente, Hélène Thouy, évoque ainsi le résultat de son parti aux élections européennes, lequel a recueilli « 2,7 % des voix ». Un chiffre encourageant, montrant qu’il existe un électorat sensible à la cause animale.
Pour ces municipales, le parti animaliste, qui regroupe aujourd’hui plus de 5 000 adhérents, est bien sûr de la partie. Sur des listes autonomes à Toulouse ou au Havre, par exemple. Mais aussi sur des listes d’alliances, comme à Grenoble où il a rallié la liste d’Éric Piolle, Grenoble en commun.
Se présentant comme monothématique et transversal, le parti animaliste a constitué un grand spectre d’alliances. La question animale est « transpartisane », explique Hélène Thouy, et doit « toucher toutes les sensibilités politiques […], dans la mesure où il y a des volontés politiques. Évidemment sous réserve de respecter la charte des valeurs du parti animaliste ».
Malgré une « quasi-absence de médiatisation » et de « faibles moyens », ce jeune parti pourrait tirer son épingle du jeu, juge sa co-présidente. Qui rappelle que « six Français sur dix indiquent que leur choix de vote sera influencé par le positionnement des candidats sur la question animale »1L’enquête menée les 12 et 13 novembre 2019 par l’Ifop à la demande de L214 montre que 72 % des Français trouvent important que, dans leur commune, les candidats aux élections municipales de mars 2020 s’engagent sur des mesures concrètes en matière de protection animale.