FOCUS – Après avoir recensé 326 arbres abattus en deux ans et demi à Grenoble, Les Républicains de l’Isère – notamment les membres du collectif Grenoble, le changement – ont lancé une pétition demandant l’établissement d’un moratoire. L’occasion pour ces derniers de rappeler l’engagement 41 pris par l’équipe d’Éric Piolle durant sa campagne, qui promettait à l’époque « de planter 5 000 arbres d’ici 2020 ».
« Ça a commencé par plus d’une vingtaine d’arbres boulevard Clémenceau et, depuis, on n’a de cesse de voir des arbres abattus pour être remplacés par on ne sait quoi », retrace François Tarantini, le secrétaire départemental adjoint de la fédération Les Républicains de l’Isère et membre du collectif Grenoble, le changement.
Ce sont d’ailleurs des habitants sympathisants de ce collectif et résidents de différents quartiers de Grenoble qui, ne restant pas plantés comme des souches, ont recensé quelque 326 arbres abattus « sans plus d’explications » [liste non exhaustive communiquée par le collectif, ndlr] selon Grenoble, le changement, en seulement deux ans et demi.
« C’est sûr que, là, bizarrement on n’a vu personne dans les arbres pour empêcher qu’ils soient coupés », ironise Brigitte Boer, une membre du collectif. Cette dernière faisant allusion aux actions choc des écocitoyens qui s’étaient installés dans les arbres du parc Paul Mistral afin de les protéger lors de la construction très polémique du stade des Alpes, en 2003.
Une pétition pour réclamer un moratoire
Une surveillance citoyenne dont se félicite le secrétaire départemental puisque, déplore-t-il, « les pratiques de la municipalité dans ce domaine sont aussi, comme partout, à l’opposé de ses déclarations ». Autant de raisons pour lesquelles le collectif a mis en ligne une pétition sur le site de la Ville, dans le but de porter la question devant le conseil municipal.
Celle-ci demande en substance « un moratoire sur l’abattage d’arbres sauf danger imminent certifié par un avis public du directeur des espaces verts de la Ville, la plantation immédiate d’arbres de variétés rares anciennes et locales sur tous les emplacements réservés à cet effet dans nos rues et sur nos places. »
Pour étayer leur démarche, les opposants se livrent à quelques calculs et avancent des chiffres. « La municipalité Destot avait produit un solde négatif de 343 arbres en six ans. Comme on le voit, dans la lutte pour la “bétonisation”, Éric Piolle prend nettement l’avantage […] Il pourrait parvenir au double du résultat s’il persiste ! », persifle François Tarantini.
Le collectif rappelle en outre que Grenoble ne compterait plus que 14,6 m2 d’espaces verts par habitant, contre 31 m2 en moyenne pour les villes de tailles comparables. Et signale au passage que cela ne va pas aller en s’arrangeant puisque que le parc Hoche risque d’être amputé après la vente d’une parcelle à un promoteur privé souhaitant y construire un hôtel.
L’occasion aussi pour le collectif de rappeler l’héritage que doit la municipalité à Alain Carignon avec une vingtaine d’hectares de réserve foncière en espaces verts : extension de Bachelard, les parcs Pompidou, Alliance, Valérien Perrin, de Marliave, place Lavalette, square Génin…
Enfin, se livrant à un exercice de mémoire, Grenoble, le changement se souvient également de l’engagement numéro 41 d’Éric Piolle de planter « 5 000 arbres d’ici 2020 de variétés rares, anciennes et locales », alors que la municipalité ne planterait, selon les termes du collectif, « que des cure-dents ».
Plus d’arbres plantés que coupés selon la municipalité
Serait-ce l’arbre qui cache la forêt ? Force est de constater que, dans leur dénombrement, les opposants sont loin du compte. Il suffit en effet de se connecter sur le site de la Ville pour apprendre qu’entre 2014 et 2016, 1 205 arbres vieillissants ou malades ont été coupés tandis que 1 813 ont été plantés sur la même période, soit un différentiel… positif de plus de 600 arbres.
Quant aux diverses raisons de ces coupes, la Ville s’en explique aussi sur son site. Elles peuvent être imprévisibles quand il s’agit d’arbres abîmés suite à un accident de circulation ou brûlés suite à des incendies de voitures. D’autres abattages sont en revanche programmés.
C’est le cas des 166 arbres sacrifiés pour la réhabilitation de vieux alignements. 184 autres ont été coupés pour des chantiers d’urbanisation tandis que 462 l’ont été pour des raisons sanitaires et sécuritaires. En effet, la présence de champignons ou de maladies fragilisent les arbres qui menacent dès lors de tomber sous l’effet de vents violents ou d’autres fortes intempéries.
La pétition est en cours d’instruction par les services de la Ville. Le collectif Grenoble le changement ne se fait guère d’illusions quant à ses chances d’être agrée « par ceux dont elle conteste la décision ». L’occasion de tacler la municipalité. « Nous ne pouvons pas savoir ce qu’il en sera avec nous [de la pétition, ndlr] mais nous sommes certains de ne pas bénéficier de la prise en charge des frais d’avocats si nous voulons contester sa décision. » Une référence à peine voilée à récente délibération donnant droit à cette prise en charge à Raymond Avrillier.
Joël Kermabon