REPORTAGE – Du 10 au 15 octobre, les habitants de plus de 16 ans votent pour le budget participatif et la votation citoyenne. En milieu de semaine, mercredi matin, une trentaine de Grenoblois se sont déplacés pour voter à la Maison des habitants Teisseire-Malherbe, l’un des lieux de vote de Grenoble.
Mercredi matin, à la MDH Teisseire – Malherbe, les électeurs arrivent au compte goutte. Des personnes plutôt âgées, des femmes, des hommes, des dames voilées, des couples, un papa avec sa petite fille…
« Des habitués de la MDH, et tous les jours aussi, des gens que l’on ne connaît pas. Mais aucun jeune… », constate Hervé Vittoz, directeur de la MDH Teisseire-Malherbe.
« Ce qui suscite le plus d’explication est la votation citoyenne »
Une dame dans la cinquantaine franchit le seuil de la MDH pour la première fois : « Je suis dans le quartier depuis 1961, je ne suis jamais venue ici. On m’a dit qu’il fallait que je vote, alors je viens voter… »
Dans le hall d’accueil, les deux urnes sont immédiatement repérables ; il y a celle du « budget participatif », qui contient les feuilles jaunes, et l’autre pour la « votation citoyenne », qui contient les bulletins bleus.
Élise, agente de développement locale, se tient près des deux urnes transparentes. Elle se charge d’enregistrer les prénoms et noms des électeurs, et vérifie leurs justificatifs de domicile.
Elle tapote ensuite sur son ordinateur portable, tout en commentant : « Mon logiciel est relié aux autres lieux de vote. La liste des électeurs qui ont voté, se met à jour instantanément. Personne ne peut voter deux fois. »
Ce matin, on ne peut pas dire que les électeurs affluent en masse. Toutefois, Élise ne demeure jamais inactive, car les habitants ne sont pas encore rompus à ce nouvel exercice démocratique. « Ce qui suscite le plus d’explication est la votation citoyenne », remarque-t-elle. Nombre d’électeurs s’embrouillent, par ailleurs, entre le « oui… contre » et le « non… pour ».
Budget participatif : les habitants privilégient leur quartier
Les motivations des électeurs sont très hétéroclites. Certains sont venus spécialement pour la votation et découvrent le budget participatif. « Quelques-uns ne votent parfois que pour la votation citoyenne », déclare l’agente de développement locale. D’autres personnes sont au courant des deux dispositifs participatifs, mais n’ont pas encore arrêté leur choix concernant le budget. Il est vrai que sur 26 projets, il faut en sélectionner sept. Le choix n’est pas toujours aisé…
C’est aussi pourquoi ce matin encore, Fouzia, agente de développement local habituellement basée à l’Abbaye, s’évertue à faire découvrir aux personnes intéressées les différents projets qui concourent au budget participatif. Fouzia constate : « Certains pensent de prime abord que ce sont des projets de la Ville. Ils sont agréablement surpris quand ils découvrent que ce sont des projets d’habitants ! Pour eux, cela ouvre le champ des possibles… »
Micheline, une dame d’un certain âge, tient la feuille jaune « budget participatif » entre les mains et dûment cochée. Elle a opté pour les projets qu’elle estime utiles, comme « Les toilettes publiques, les pigeonniers contraceptifs, l’Esplanade André Farcy… Et alors quelque chose de for-mi-da-ble, se réjouit-elle : des chai-ses ! »
Anne-Marie a un peu plus de difficultés pour se décider. Elle trouve que certains projets font « un peu doublon avec des choses existantes » et que, parfois, les explications manquent de « précisions ». Pour autant, elle parvient à établir sa liste et privilégie – comme d’autres électeurs croisés dans la matinée – les projets de son quartier ainsi que ceux qui ont trait à sa vie quotidienne.
Je lui ai dit au maire : « Plantez donc des pommes de terre… »
Du côté de la votation citoyenne, le choix est par nature plus restreint. C’est « oui » ou « non ». Cette ancienne membre du comité de liaison des unions de quartier (Cluq) n’a pas hésité une seule seconde. Elle a coché « oui ».
Et de s’en expliquer : « Ils [la majorité, ndlr] veulent se faire du fric ! [avec la hausse des tarifs de stationnement, ndlr] Je lui ai dit au maire : “Plantez donc des pommes de terre dans l’espace public et vendez-les pour vous faire des sous !” »
Dans l’autre camp, il y a Pierre, qui est venu pour voter « non ». Il a 36 ans et est sans conteste le benjamin de la matinée. « C’est déjà formidable d’avoir voix au chapitre !… Par rapport à la votation citoyenne, oui je défends le projet en cours parce qu’il est socialement acceptable et équitable », considère le trentenaire. Sur « la concertation », principal point d’achoppement entre le Cluq et la majorité ? « L’argument de la concertation est pas mal, juge Pierre, mais il y a tellement d’enjeux qu’on ne va pas perdre son temps avec ça… D’ailleurs, je trouve dommage que le thème de cette pétition porte sur ce sujet du stationnement ! »
Jean-François a voté « oui »… son épouse « non »
Si Micheline et Pierre savent parfaitement pour qui voter, Jean-François est bien plus indécis. Assis sur le banc, dans le hall de la MDH, il relit la profession de foi des deux camps, en occurrence le Cluq et la majorité municipale. Jean-François paraît pourtant bien au fait. Il lit la presse, semble avoir saisi les enjeux, mais sa décision n’est pas encore arrêtée… « Pas évident… commente-t-il à voix haute. Qui croire ? Il y a du bon et du mauvais des deux côtés », analyse-t-il.
Au final, Jean-François se décide pour le « oui ». « Parce que je pense que la Ville a été intransigeante et qu’une concertation permettra d’y voir plus clair ». Jean-François a voté « oui » et son épouse a voté « non ». Pas de quoi les empêcher de repartir bras dessus, bras dessous… avec le sourire !
Séverine Cattiaux