REPORTAGE PHOTO – Défendre les services publics et tout particulièrement le monde de la santé, tel était le mot d’ordre de la manifestation organisée mardi 7 mars à Grenoble, en marge du grand rassemblement se tenant à Paris. Ce sont environ 300 manifestants qui ont ainsi défilé dans les rues de la ville.
« La Sécu, on s’est battus pour la gagner, on se battra pour la garder ! » L’heure était à la mobilisation mardi 7 mars à Grenoble. En marge de la grande manifestation organisée à Paris, les syndicats FO, CGT et Solidaires avaient en effet appelé les Isérois à venir battre le pavé grenoblois. Environ 300 personnes ont répondu présentes et bravé la pluie battante de la place Félix-Poulat à celle de Verdun.
La santé au cœur de toutes les revendications
Si la manifestation avait pour but de défendre l’ensemble des services publics, c’est bien le monde de la santé qui était au cœur de toutes les revendications. Au micro ou au mégaphone, les militants syndicaux dénonçaient ainsi une « privatisation du système », les nouvelles règles de gestion des établissements, et accusaient le gouvernement de se désengager de la Sécurité sociale au profit des mutuelles.
« Poids de l’industrie pharmaceutique », « conditions de travail inacceptables », « dérèglement du temps de travail », « perte de sens et souffrance du personnel »… Les propos étaient durs et les revendications tenaient, pour leur part, en quelques mots : revalorisation et amélioration des conditions de travail des personnels de santé, autour d’un « vrai dialogue social ».
« Les soignants et les médecins s’épuisent »
Infirmiers anesthésistes, kinés en colère… parmi les manifestants, le même constat est partagé. Infirmière hospitalière retraitée, Cécile travaille aujourd’hui en indépendante auprès des personnes âgées. En dix-sept ans, elle affirme avoir vu les conditions de travail se dégrader. « Nous n’avons plus l’occasion d’être auprès des gens, nous sommes obligées de courir. On a besoin de personnel et de moyens matériels : sans sous, on ne peut rien faire ! »
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« Je suis très inquiète pour la santé de tous les citoyens, enchérit Claire, kinésithérapeute. Les soignants s’épuisent, les médecins aussi. La mutualisation des moyens, qui pourrait être positive, s’avère catastrophique : les groupements hospitaliers achètent à des centrales d’achat du matériel de mauvaise qualité. Les soignants ne sont pas en nombre suffisants, ne sont pas remplacés en cas d’absence… Il faut que les citoyens soient avertis ! »
« C’est la vie des patients qui est mise en danger »
« Nous avons des témoignages de psychiatres qui nous disent n’avoir jamais accueilli autant de fonctionnaires en situation de burn-out », affirme Béatrice Vincent, secrétaire Force ouvrière Lycées et collèges. Sa camarade Herminia Moreno décrit pour sa part une « pression qui n’est plus vivable », derrière laquelle se cache « l’économie de moyens ». Et toutes deux d’établir volontiers un parallèle entre la situation des personnels de santé face aux patients, et celle des enseignants devant leurs classes.
Les patients, c’est la préoccupation première d’Émilie et de Sarah, deux jeunes infirmières en service traumatologie du CHU de Grenoble. « Quand nous sommes fatiguées, c’est la vie des patients qui est mise en danger. Et que les patients souffrent, c’est cela qui nous dérange ! »
Et les deux jeunes femmes de raconter combien leurs « valeurs et leurs idéaux de bienveillance » se heurtent à la réalité de l’hôpital. « On ne peut pas faire notre travail comme il faut. On ne nous écoute pas, on ne nous demande pas notre avis. Nous avons des responsabilités énormes qui ne sont pas prises en compte. On adore notre métier et on veut continuer à le faire, mais dans de bonnes conditions. Sinon, on va finir en vieilles infirmières aigries ! »
Quelques élus dans le rassemblement
Parmi les quelque 300 manifestants qui auront bravé la pluie, beaucoup de professionnels de santé en tenue de travail, des Atsem adeptes du vuvuzela, des drapeaux noirs de la Confédération nationale du travail, des bibliothécaires en colère et quelques écharpes tricolores. Des élus venus apporteur leur soutien au mouvement, tels que la sénatrice Annie David, l’adjoint grenoblois Bernard Macret qui fera un bref passage dans le cortège, ou encore le Fontainois Brice Di Gennaro.
« Je suis venu parce que cela fait plusieurs fois qu’il y a une casse des services publics en France, explique l’adjoint à la culture de Fontaine. Les personnels salariés sont en souffrance et il y a nécessité à remettre à plat le système, de financer la santé, le social, et j’ajouterai l’éducation et la culture. Parce que c’est cela qui forge le vivre-ensemble de la société, et qu’aujourd’hui tout cela est mis à mal. »
Malgré les averses successives, le cortège ne désemplira pas et marquera un arrêt symbolique devant la Cité administrative Dode, rue Joseph Chanrion, qui accueille notamment la Direction départementale de la cohésion sociale. Avant de rejoindre la place Verdun où les manifestants, souriants, se disperseront enfin dans un calme aussi humide qu’olympien.