Sergi López © David Ruano

Sergi López : “Dans 30/40 Livingstone, je joue un mec qui ne se tait jamais, ce qui me res­semble un peu !”

Sergi López : “Dans 30/40 Livingstone, je joue un mec qui ne se tait jamais, ce qui me res­semble un peu !”

ENTRETIEN – Le public la plé­bis­cite. La cri­tique la couvre de louanges. La pièce 30/40 Livingstone, écrite, mise en scène et inter­pré­tée par Sergi López et Jorge Picó, mul­ti­plie les dates de tour­née en France comme en Espagne. Ce spec­tacle dro­la­tique aux allures de conte phi­lo­so­phique est pro­grammé ven­dredi 25 mars au Théâtre Jean Marais de Saint-Fons (Rhône)*. Un homme sur­volté y pour­suit une créa­ture chi­mé­rique mi-homme, mi-cerf… Explications de Sergi López.

Sergi López et Jorge Picó dans "30/40 Livingstone" © David Ruano

Sergi López et Jorge Picó dans “30÷40 Livingstone”. © David Ruano

En 2001, il a obtenu le César du meilleur acteur pour son rôle dans « Harry, un ami qui vous veut du bien ». Depuis, le cinéma a offert de si beaux rôles à Sergi López que sa car­rière théâ­trale en a été quelque peu éclip­sée. En réa­lité, le comé­dien cata­lan a débuté sur les planches et ne les a jamais quittées.

Avec « 30/40 Livingstone », pro­gram­mée au Théâtre Jean Marais de Saint-Fons le 25 mars, il démontre que sa place est, aussi, au théâtre. Et il est d’autant plus heu­reux de défendre la pièce qu’il n’y est pas seule­ment inter­prète. Il aime le rap­pe­ler. C’est le pro­jet dans sa glo­ba­lité qu’il assume ! De fait, il a aussi écrit et mis en scène la pièce, en col­la­bo­ra­tion avec son cama­rade Jorge Picó, avec qui il par­tage éga­le­ment le plateau.

En Espagne, com­ment se sont pas­sés vos débuts sur les planches ?

Au départ, alors que j’étais encore mineur, je fai­sais du théâtre en ama­teur. C’était ça l’école de théâtre en Catalogne ! Il y avait très peu d’écoles de théâtre offi­cielles quand j’étais jeune.

Ensuite, quand j’ai décidé de faire du théâtre mon métier, je suis allé à Barcelone dans une école d’interprétation et j’ai aussi suivi un cours d’acrobatie.

D’où votre jeu physique ?

Cette envie de bou­ger me vient peut-être de là. Mais ça me vient sur­tout de mon pas­sage par l’école du maître Jacques Lecoq. C’est elle la véri­table for­ma­tion de théâtre que j’ai sui­vie, plus tard, quand je suis allé à Paris. Cette école nous enseigne une méthode où l’on accède au théâtre via le mouvement.

On apprend à écrire direc­te­ment sur scène, dans l’espace. C’est pour ça qu’avec Jorge Picó [qui signe, avec Sergi López, l’écriture et la mise en scène de la pièce 30/40 Livingstone, ndlr], qui a suivi le même ensei­gne­ment, on par­tage cette vision d’un théâtre qui bouge beaucoup.

Sergi López et Jorge Picó dans "30/40 Livingstone" © David Ruano

Sergi López et Jorge Picó dans “30÷40 Livingstone”. © David Ruano

Au cinéma, vous avez débuté en France avec le réa­li­sa­teur Manuel Poirier dans le long métrage La Petite Amie d’Antonio, sorti en 1992, et dans le film Western qui a rem­porté un vif suc­cès en 1997. Comment s’est fait ce pas­sage du théâtre au cinéma ?

Ça a été com­plè­te­ment sur­réa­liste ! Je fai­sais mes études à Paris et j’ai vu une petite affiche qui disait : « Recherche acteur avec accent espa­gnol pour pre­mier long métrage de cinéma. » Ça m’a sem­blé extrê­me­ment exo­tique (rire). J’ai passé le cas­ting par curio­sité. J’étais à Paris depuis à peine deux mois et je par­lais très mal fran­çais. Mais on s’est tout de suite bien entendu avec Manuel Poirier.

Comment avez-vous fait pour par­ta­ger votre car­rière entre la France et l’Espagne, le théâtre et le cinéma ?

Ce qui est com­pli­qué, en fait, ce n’est pas de s’organiser entre le théâtre et le cinéma, c’est plu­tôt d’avoir régu­liè­re­ment du tra­vail dans le cinéma. On y dépend tou­jours du désir des autres. Quand tu as la chance que ça t’arrive comme c’est mon cas – et je ne com­prends tou­jours pas, c’est excep­tion­nel ! –, tu te débrouilles.

En 2007, vous avez joué le one-man-show Non Solum, mis en scène par Jorge Picó. Qu’est-ce qui vous avait donné envie d’être seul en scène et de pas­ser par l’humour ?

Avec Jorge Picó, l’humour fait par­tie de nous. Quand on écrit, on ne peut pas s’en empê­cher. On aime bien faire rire. Et puis le spec­tacle tout seul, c’était sur­tout parce que c’était très com­pli­qué pour moi de réin­té­grer une com­pa­gnie avec d’autres acteurs, à cause du cinéma. C’était trop dif­fi­cile de faire coïn­ci­der les emplois du temps de chacun.

Mais j’avais aussi envie d’essayer de faire quelque chose tout seul parce que j’avais beau­coup d’idées qui s’accumulaient et qui avaient à voir avec un homme seul qui se cherche. Comme d’habitude !

Comment pré­sen­tez-vous l’étrange pièce qu’est 30/40 Livingstone ?

Jorge Picó dans le rôle de la créature légendaire et muette. © David Ruano

Jorge Picó dans le rôle de la créa­ture légen­daire et muette. © David Ruano

Comme le titre, la pièce est énig­ma­tique. On n’arrive pas à l’expliquer. Mais je peux dire que c’est drôle…

On rit d’une idée anthro­po­lo­gique qui a l’air très sérieuse : regar­der l’être humain comme si on ne savait pas ce que c’était. Un être humain un peu par­ti­cu­lier car il a des bois de cerf et il joue au tennis.

C’est un peu sur­réa­liste et absurde. Heureusement, c’est plus facile à voir qu’à expliquer !

Mais c’est vrai qu’il y a un mon­sieur en cos­tume cra­vate avec des bois de cerf et un autre qui passe toute la pièce à essayer de com­prendre. Et, visi­ble­ment, ça fait rire !

Comment vous êtes-vous dis­tri­bués les rôles avec Jorge Picó ?

Dès le départ, on a écrit la pièce à tra­vers des impro­vi­sa­tions. Et déjà, Jorge jouait le cerf. Même si on ne le veut pas, on finit par mettre de nous invo­lon­tai­re­ment dans les per­son­nages. Je joue un mec qui ne se tait jamais, ce qui me res­semble un peu ! Et Jorge bouge très bien, joue au ten­nis. Ce qui lui res­semble un peu aussi.

Et très vite, on a trouvé l’idée de don­ner un rôle muet à Jorge. Puisque l’autre parle tout le temps, on s’est dit que ce serait bien que lui ne dise rien. On sen­tait qu’on avait besoin de trou­ver deux êtres qui n’étaient pas exac­te­ment sur la même planète.

La presse parle de « fable anthro­po­lo­gique et huma­niste », de « conte féroce ». Est-ce impor­tant pour vous que le théâtre, sous cou­vert de diver­tis­se­ment et d’humour, ait un sens plus profond ?

Oui, je trouve que le théâtre doit ser­vir à quelque chose. Je ne pense pas que le théâtre serve à oublier ses pro­blèmes mais qu’au contraire il doit nous aider, peut-être, à pen­ser autre­ment à nos pro­blèmes, à avoir des points de vue dif­fé­rents, ser­vir à quelque chose de col­lec­tif. Ça doit être utile.

Vous avez beau­coup tourné en France et en Espagne. Est-ce que la récep­tion de la pièce est la même dans les deux pays ?

30/40 Livingstone © David Ruano

“30÷40 Livingstone”. © David Ruano

Au début, la pièce était en cata­lan. Ensuite, on l’a jouée en fran­çais puis en espa­gnol. Lors de la toute pre­mière, les cri­tiques n’étaient pas bonnes du tout. Mais c’est aussi parce que la pièce n’était pas telle qu’elle est aujourd’hui. On a eu la chance de pou­voir réécrire. La pièce a fait tout un voyage. Et c’est vrai que quand elle est arri­vée en France, au Festival d’Avignon [dans le off du Festival en 2014, où elle a rem­porté un grand suc­cès, ndlr], on l’avait déjà jouée 150 fois.

C’est tou­jours la même pièce, mais main­te­nant c’est une bombe alors que lors de la pre­mière, le public a eu beau­coup de mal à ren­trer dedans. Donc les débuts étaient dou­lou­reux pour nous. Heureusement qu’on a sur­monté cette douleur.

Propos recueillis par Adèle Duminy

Infos pra­tiques

Théâtre Jean Marais

59 rue Carnot à Saint-Fons (Rhône)

04 78 67 68 29

30/40 Livingstone

Vendredi 25 mars 2016 à 20 h 30

Plein tarif : 15 euros / Tarif réduit : 12 euros / Tarif enfant : 6 euros

* Initialement pro­grammé le 22 mars au Grand Angle de Voiron, ce spec­tacle a été annulé, du fait d’un nombre insuf­fi­sant de places vendues.

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