Une quinzaine de CRS ont chargé sur les manifestants sur le cours Jean-Jaurès ©Anaïs Mariotti - placegrenet.fr

Mouvement lycéen : affron­te­ments, dégâts et une élève gra­ve­ment bles­sée à Grenoble

Mouvement lycéen : affron­te­ments, dégâts et une élève gra­ve­ment bles­sée à Grenoble

REPORTAGE VIDÉO – Le mou­ve­ment lycéen se dur­cit à Grenoble. Profitant de la colère sociale qui s’ex­prime en France, des groupes d’é­lèves ont décidé de faire entendre leur oppo­si­tion à la réforme des lycées et à la pla­te­forme d’ac­cès à l’u­ni­ver­sité Parcoursup. Plusieurs cen­taines de lycéens se ainsi sont ras­sem­blés ce mardi 4 et ce mer­credi 5 décembre pour mani­fes­ter dans les rues de Grenoble. Avec à la clé des débor­de­ments et des affron­te­ments avec les forces de l’ordre. Premier bilan : six inter­pel­la­tions, une lycéenne gra­ve­ment bles­sée au visage et deux poli­ciers légè­re­ment blessés.

Ce mardi 4 décembre au matin, le mou­ve­ment a débuté au lycée les Eaux-Claires, dont plu­sieurs dizaines de mani­fes­tants ont blo­qué l’en­trée à par­tir de 7 heures. L’objet de leurs reven­di­ca­tions por­tées par l’Union lycéenne natio­nale de l’Isère (UNL) ? La remise en cause de la réforme du bac et du lycée, ainsi que de la pla­te­forme d’accès aux études supé­rieures Parcoursup.

Le mouvement lycéen se durcit à Grenoble. Bilan : six interpellations, une lycéenne gravement blessée au visage et deux policiers légèrement blessés.

« Résistance », « Anticapitalisme », « Macron, t’es foutu la jeu­nesse est dans la rue », les mani­fes­tants clament divers slo­gans aux abords du lycée Vaucanson ©Anaïs Mariotti – pla​ce​gre​net​.fr

« On dénonce la poli­tique ultra-libé­rale du gou­ver­ne­ment, la mise en place de la sélec­tion à l’en­trée de l’u­ni­ver­sité, le ser­vice natio­nal uni­ver­sel, ainsi que la réforme du bac pro et de la voie géné­rale », témoigne Guillaume, le res­pon­sable fédé­ral de l’UNL Isère. Ce mou­ve­ment conteste donc plus lar­ge­ment la poli­tique menée par le gou­ver­ne­ment Macron. Le début d’une conver­gence des luttes avec les gilets jaunes ? Cette mobi­li­sa­tion n’est en tout cas pas un cas isolé : plus de 180 lycées ont déjà été blo­qués en France, le 3 décembre.

Une marche tein­tée de quelques dégradations

Aux alen­tours de 11 heures, le ras­sem­ble­ment devant le lycée les Eaux-Claires s’est trans­formé en mani­fes­ta­tion spon­ta­née. Les élèves se sont ren­dus au lycée Vaucanson pour invi­ter les autres lycéens à les rejoindre. Des cas­seurs ont alors pro­fité de l’a­gi­ta­tion géné­rale pour dégra­der du mobi­lier urbain et mettre le feu à quelques pou­belles dans le sec­teur des Eaux-Claires. Un pro­jec­tile a aussi été lancé en direc­tion du per­son­nel de l’é­ta­blis­se­ment Vaucanson, mais n’a tou­ché per­sonne. Le tout sans inter­ven­tion des forces de l’ordre.

Une pou­belle a été incen­diée devant le lycée Vaucanson, sous le regard du per­son­nel de l’é­ta­blis­se­ment © Anaïs Mariotti – pla​ce​gre​net​.fr

Après ces épi­sodes rela­ti­ve­ment agi­tés, la marche a conti­nué dans le calme en direc­tion d’Alsace-Lorraine et du centre-ville. Vers 12 h 30, le cor­tège a alors rega­gné le lycée Stendhal pour mobi­li­ser d’autres lycéens. S’en sont sui­vis de nou­veaux heurts en centre-ville, mais aussi dans les sec­teurs Berriat et Jean-Jaurès. À 15 h 45, des pierres ont été lan­cées sur des CRS. À 16 h 45, un maga­sin d’a­li­men­ta­tion en libre-ser­vice a été van­da­lisé et pillé, cours Jean-Jaurès.

La colère lycéenne : sélec­tion avec Parcoursup, réformes du bac et du lycée

« À ceux qui veulent sélec­tion­ner les jeunes, résis­tance ! », scan­daient les mani­fes­tants sur l’a­ve­nue Alsace-Lorraine. Les lycéens font notam­ment réfé­rence à la pla­te­forme numé­rique Parcoursup. « Des mil­liers de bache­liers ne pour­ront pas avoir accès aux études supé­rieures. Ils vont se retrou­ver seule­ment avec le bac », estime une élève des Eaux-Claires. « Il y a déjà des inéga­li­tés sociales pour accé­der à l’en­sei­gne­ment supé­rieur. Par exemple, les enfants d’ou­vriers accèdent beau­coup moins aux études supé­rieures que les enfants de cadres », rap­pelle Guillaume, le res­pon­sable fédé­ral de l’UNL Isère.

« La sélec­tion avec Parcoursup ren­force donc ces inéga­li­tés. Avec la sélec­tion sur dos­sier, on peut voir de quel lycée vient l’é­lève. Et on sait qu’un 12/20 n’aura pas la même valeur dans chaque éta­blis­se­ment », pour­suit le jeune homme. Autrement dit, un élève issu d’un éta­blis­se­ment réputé a, selon lui, plus de chances d’être sélec­tionné qu’un autre issu d’un lycée popu­laire. Mais ce n’est pas tout… « Il va y avoir des classes de qua­rante per­sonnes, des sup­pres­sions de postes d’en­sei­gnants. Les profs disent qu’ils s’in­quiètent aussi pour notre ave­nir », ajoute une lycéenne.

Une élève gra­ve­ment bles­sée : les vio­lences poli­cières poin­tées du doigt

Au cours de cette jour­née, une ado­les­cente âgée de 16 ans, élève en pre­mière au lycée Jean-Jaurès, a été griè­ve­ment bles­sée au visage, rap­porte Le Dauphiné Libéré. Une bles­sure cau­sée par des tirs de flash-ball pro­ve­nant de l’u­nité de CRS, affirme la famille de la vic­time. Présentant de graves lésions à la mâchoire, celle-ci a dû être opérée.

Manif Lycéens 3 décembre 2018 © Florent Mathieu - Place Gre'net

Guillaume, le res­pon­sable fédé­ral de l’UNL Isère, décembre 2018. © Florent Mathieu – Place Gre’net

Cet évé­ne­ment concorde avec les récits de cer­tains mani­fes­tants, qui assurent avoir été témoins de vio­lences poli­cières devant le lycée Vaucanson. « Quatre élèves ont été bles­sés ce matin à cause des tirs de flash-ball », assure Guillaume, le res­pon­sable fédé­ral de l’UNL Isère. « Vers 10 heures, la Bac a gazé de par­tout. Des élèves ont reçu des flash-ball dans le ventre, dans le cou, dans les par­ties géni­tales », témoigne un élève du lycée Vaucanson.

Côté poli­ciers, les forces de l’ordre ont annoncé par com­mu­ni­qué avoir pro­cédé à six inter­pel­la­tions pour jets de pro­jec­tiles. D’autres mobi­li­sa­tions sont à pré­voir pour le reste de la semaine, explique le res­pon­sable fédé­ral de l’UNL Isère. « On ne compte pas lâcher et on espère que l’État réagira », assurent les mani­fes­tants à l’unisson.

Nouveaux débor­de­ments ce mer­credi 5 décembre

Le mou­ve­ment a repris ce mer­credi 5 décembre. Plusieurs ras­sem­ble­ments d’étudiants ont ainsi eu lieu devant divers éta­blis­se­ments de l’ag­glo­mé­ra­tion : les lycées Vaucanson, Louise Michel (200 mani­fes­tants selon la police), Marie Curie d’Échirolles (300 mani­fes­tants), Jacques Prévert à Fontaine (300 mani­fes­tants), Jean-Jaurès à Grenoble (200 mani­fes­tants). Et, encore une fois, celui des Eaux-Claires.

Un vieux monsieur, intrigué par le feu devant le lycée les Eaux-Claires, ce 5 décembre. ©Anaïs Mariotti - placegrenet.fr

Un vieux mon­sieur, intri­gué par le feu devant le lycée les Eaux-Claires, ce 5 décembre. ©Anaïs Mariotti – pla​ce​gre​net​.fr

Une cin­quan­taine de mani­fes­tants s’y sont réunis vers 9 heures. Un ras­sem­ble­ment beau­coup moins orga­nisé que la veille, puisque les lycéens n’a­vaient ni ban­de­roles, ni slo­gans, ni lea­ders. Et accom­pa­gné de dégra­da­tions, avec des pou­belles, embra­sées devant l’é­ta­blis­se­ment, qui ont dégagé une épaisse fumée noire.

Le groupe s’est rendu au lycée Vaucanson, puis au lycée Louise Michel. Sur place, d’autres pou­belles incen­diées mais aussi quelques rixes entre manifestants.

Les lycéens sont ensuite remon­tés par le cours de la Libération jus­qu’à Alsace-Lorraine, ralen­tis­sant par leur pré­sence le tra­fic des trams. Les rangs des mani­fes­tants ont alors grossi jus­qu’à atteindre une cen­taine de personnes.

Une quinzaine de CRS ont chargé les manifestants sur le cours Jean-Jaurès, le 5 décembre. © Anaïs Mariotti - placegrenet.fr

Une quin­zaine de CRS ont chargé les mani­fes­tants sur le cours Jean-Jaurès, le 5 décembre. © Anaïs Mariotti – pla​ce​gre​net​.fr

Accueillis par une quin­zaine de CRS qui les atten­daient sur les voies du tram cours Jean-Jaurès au niveau de l’a­ve­nue Alsace-Lorraine, les jeunes ont vive­ment réagi. Jets de pro­jec­tiles d’un côté, gaz lacry­mo­gène et flash-balls de l’autre…

Une scène de gué­rilla urbaine s’est ainsi dérou­lée sous les yeux des pas­sants et com­men­çants, pour cer­tains apeu­rés, pour d’autres curieux. Quelques gilets jaunes ayant rejoint les lycéens ont, quant à eux, essayé d’a­mor­cer un dia­logue avec les forces de l’ordre. Après avoir pré­venu les mani­fes­tants, les CRS ont fina­le­ment chargé sur le cours Jean-Jaurès et ainsi dis­persé la foule en une ving­taine de minutes.

Aucune nou­velle inter­pel­la­tion n’a eu lieu ce mer­credi mais deux poli­ciers de la Bac ont été bles­sés, au dos pour l’une et au bras pour le second, suite à jets de pro­jec­tiles, selon Direction dépar­te­men­tale de la sécu­rité publique.

Anaïs Mariotti

NB : Cet article a été mis à jour en fin d’a­près-midi, suite à un com­mu­ni­qué envoyé par la Direction dépar­te­men­tale de la sécu­rité publique.

AMa

Auteur

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

A lire aussi sur Place Gre'net

Merci, bonsoir ! repose sur un heureux mélange des genres artistiques, avec une grande importance donnée aux arts de la rue et aux concerts. Ici, le groupe Kumbia Boruka, lors de l'édition 2022. © Yassine Lemonnier
Arts de rue : 40 com­pa­gnies et 200 artistes atten­dus à Grenoble pour le fes­ti­val Merci, bonsoir !

ÉVÉNEMENT - Organisé par Mix'Arts et le Prunier sauvage, le festival d'arts de rue et de musique Merci, bonsoir ! qui accueille chaque année 30 Lire plus

Place Louis Maisonnat à Fontaine. Google Maps
Deux per­sonnes bles­sées par des armes à feu de type kala­sh­ni­kov à Fontaine

FOCUS - Deux personnes ont été blessées par des tirs d’armes à feu de type kalashnikov place Louis-Maisonnat à Fontaine, samedi 14 septembre, tard dans Lire plus

Maison de la vie associative et citoyenne, anciennement "maison des associations" rebaptisée en juin 2024, Grenoble © Séverine Cattiaux - Place Gre'net
Grenoble : la Maison des asso­cia­tions a laissé place à une « mai­son de la vie asso­cia­tive et citoyenne »

FOCUS - Exit la Maison des associations de Grenoble. Place à la "Maison de la vie associative et citoyenne", inaugurée assez discrètement en juin 2024. Lire plus

La société Vencorex (Pont-de-Claix) condamnée pour atteinte à la liberté syndicale et au droit de grève
Potentielle fer­me­ture de Vencorex : des élus isé­rois font état de leur vive inquié­tude au Premier ministre

FOCUS - Dans un courrier adressé au Premier ministre Michel Barnier, trois parlementaires et deux maires de l'Isère font part de leurs vives inquiétudes face Lire plus

Résidence Condillac: le Crous Grenoble-Alpes répond (vertement) aux alertes de la CGT concernant le nouveau directeur
Résidence Condillac : le Crous Grenoble-Alpes répond (ver­te­ment) aux alertes de la CGT concer­nant le nou­veau directeur

DROIT DE SUITE - Alors que la CGT a dénoncé la venue d'un nouveau directeur au sein de la résidence Condillac, la direction du Crous Lire plus

La Ville de Grenoble annonce mettre fin à sa convention avec la MJC Prémol
MJC Prémol : la fin de la conven­tion annon­cée par la Ville de Grenoble sus­cite de vives réactions

FOCUS - La Ville de Grenoble annonce mettre fin à la convention d'objectifs et de moyens qui la lie à la MJC Prémol, quartier Villeneuve. Lire plus

Flash Info

Les plus lus

Agenda

Je partage !