DÉCRYPTAGE – Le 22 mars dernier, le Vog, centre d’art contemporain de la ville de Fontaine, a fait savoir qu’il annulait l’exposition dédiée à l’artiste Philippe Perrin, initialement programmée à partir du 14 avril. Pourquoi donc ? Décision du maire de Fontaine. Cas de censure ? Éléments de réponse.
Une exposition consacrée à l’œuvre de Philippe Perrin devait être montrée au Vog, centre d’art contemporain de la ville de Fontaine le 14 avril prochain. C’était avant que le maire de Fontaine n’en décide autrement. Censure ? Difficile d’utiliser un autre terme… Encore que l’élu ait finalement fait volte-face devant un début de grogne sur les réseaux sociaux. D’aucuns s’étaient en effet émus de cette ingérence de la municipalité dans la programmation du centre d’art.
Toutefois, si Jean-Paul Trovero, maire de Fontaine, permet désormais que se tienne l’exposition, c’est seulement à certaines conditions, jugées « inacceptables » par l’artiste. De fait, certaines œuvres, estimées provocantes, devraient être tout simplement retirées. Et il s’agirait d’obturer les vitrines du Vog avec des rideaux, entre autres conditions…
Provocantes les œuvres de Philippe Perrin ?
Nous n’avons pas pu prendre connaissance de l’ensemble des œuvres incriminées. Mais en consultant le site de l’artiste, on constate qu’il développe un certain tropisme à l’endroit des armes et de la violence en général.
Cependant, son iconographie guerrière semble plutôt inviter à une réflexion, pourquoi pas salutaire, sur la manière dont cette imagerie envahit notre quotidien, via les écrans notamment. Étrange de la recevoir aussi littéralement que semble le faire la municipalité de Fontaine.
Sans doute le climat actuel invite-t-il à tant de précautions. Mais n’est-ce pas dans ces circonstances que l’art se doit d’être le plus propice aux questionnements ?
Une réflexion dont on ne peut faire l’économie dans un climat de suspicion tel que l’on estime la moindre reproduction de revolver à même de troubler l’ordre public…
Notons au passage que l’artiste Philippe Perrin expose depuis trente années déjà. Sans avoir eu à subir, jusqu’à maintenant, la moindre censure. Et ses expositions sont passées par Cuba ou par la Russie, entre autres contrées éprises de libertés…
« Éviter les amalgames ou les troubles à l’ordre public »
Le maire de Fontaine a, de son côté, réagi par communiqué de presse, ce jeudi 7 avril :
« L’exposition proposée par Philippe Perrin devait reprendre une partie de ses œuvres marquées par la scénarisation et la représentation de l’univers des armes, des codes de la violence urbaine et des scènes de crime. En parallèle de la préparation de cette exposition, le contexte national et international a été endeuillé par des crimes de sang d’une ampleur inédite et par le risque terroriste.
Plus localement, depuis plusieurs semaines, le quartier qui accueille le Vog a été marqué par des violences urbaines et des actes criminels. Soucieuse d’éviter les simplifications, les amalgames ou les troubles à l’ordre public, l’équipe municipale s’est donc interrogée sur la pertinence de maintenir l’exposition. »
« J’accuse ! »
Dire que Philippe Perrin ne comprend pas cette décision relève de l’euphémisme… Il se plaint notamment de n’avoir reçu aucun courrier officiel rendant compte de l’annulation de l’exposition de ses pièces. Et n’a pas manqué d’exprimer sa colère sur les réseaux sociaux, dans un post qui a précédé l’envoi du communiqué de la ville de Fontaine. Nous lui laisserons ici le dernier mot. Vif, pour le moins.
Adèle Duminy