FOCUS – Après l’audience du 18 avril 2023, la Cour des comptes a rendu son arrêt, le 11 mai, concernant les anciens dirigeants d’Alpexpo soupçonnés d’avoir commis diverses fautes de gestion. Les magistrats financiers ont condamné l’ancienne directrice Catherine Calmels à 3 500 euros d’amende. L’ex-élu grenoblois Alain Pilaud et le conseiller municipal Claus Habfast, PDG successifs de la société, ont quant à eux été relaxés. Mais le parquet général près la Cour des comptes a annoncé, jeudi 20 juillet 2023, qu’il interjetait appel de la décision de la chambre du contentieux. Quant au procès devant le tribunal correctionnel, prévu le 13 juin 2023, celui-ci a été renvoyé au 2 mai 2024.
[Article publié le 2 juin 2023 à 14 h 56 et mis à jour le 20 juillet 2023 à 20 h 06 avec ajout encadré sur l’appel du parquet général] Dans un arrêt rendu le 11 mai 2023, la chambre du contentieux de la Cour des comptes a relaxé les PDG successifs d’Alpexpo Alain Pilaud et Claus Habfast, respectivement ancien élu et actuel conseiller municipal de la Ville de Grenoble, suspectés d’avoir commis diverses fautes de gestion. L’ex-directrice Catherine Calmels, soupçonnée notamment d’avoir utilisé la carte bancaire de la société pour des dépenses personnelles, a, elle, été condamnée à 3 500 euros d’amende.
Les trois anciens dirigeants d’Alpexpo avaient comparu le 18 avril 2023 devant la Cour des comptes, saisie par son procureur général, pour le volet « administratif » de cette affaire. Laquelle avait démarré à la suite de la publication, en 2019, d’un rapport de la Chambre régionale des comptes (CRC) épinglant la gestion de la société d’économie mixte (Sem) Alpexpo entre 2009 et 2017.
Pas de « préjudice financier significatif »
Cinq infractions potentielles étaient reprochées à Alain Pilaud et Claus Habfast : « des défaillances dans l’exécution du contrat » liant Alpexpo et la société de management de transition employant Catherine Calmels, « le défaut de surveillance des agissements » de cette dernière, « le désordre constaté dans la conservation de documents comptables, voire la tenue de la comptabilité », « l’absence de diligence » à recouvrer la dette de l’ancienne directrice, et enfin « le non-respect de certaines dispositions réglementaires en matière de commande publique ».
Les juges financiers n’ont finalement pas suivi les réquisitions du procureur général, qui avait demandé des peines d’amende contre les deux élus. Ils ont en effet estimé que « le préjudice financier et son caractère significatif » n’étaient « pas établis. Ainsi, tous les éléments constitutifs de l’infraction ne sont pas réunis », a jugé la Cour des comptes, qui a donc relaxé les deux anciens PDG d’Alpexpo.
Un billet d’avion pour son mari payé avec la CB d’Alpexpo
La chambre du contentieux a en revanche condamné Catherine Calmels, mise en cause pour avoir signé des contrats de travail et des commandes à des entreprises extérieures alors qu’elle n’était que directrice de fait d’Alpexpo, étant employée par une société de management de transition qui la mettait à disposition de la Sem. Mais aussi pour ses « dépenses indues », ayant utilisé la carte bancaire d’Alpexpo pour des « dépenses personnelles de loisirs ».
La Cour des comptes cite ainsi dans son arrêt « l’achat d’un billet d’avion1pour les États-Unis au bénéfice de son mari pour un montant de 3 149 euros en janvier 2014, l’achat d’une prestation auprès d’un opérateur de tours de golf pour un montant de 1 725 euros en octobre 2014 et la réalisation de dépenses en doubles paiements relatives à des achats de voyages en train et taxi entre [son] domicile et Grenoble pour des montants respectifs de 10 180,20 et 2 342,80 euros ».
Le parquet général près la Cour des comptes fait appel de la décision
En relaxant Alain Pilaud et Claus Habfast dans son arrêt rendu le 11 mai 2023, la chambre du contentieux de la Cour des comptes n’avait pas suivi les réquisitions du procureur général qui avait demandé, lors de l’audience du 18 avril, des peines d’amende à l’encontre de l’ex-élu et de l’actuel conseiller municipal de la Ville de Grenoble.
Le parquet général près la Cour des comptes a donc annoncé, ce jeudi 20 juillet 2023, dans un communiqué, son choix d’interjeter appel de la décision relative à l’affaire Alpexpo. Ce recours porte sur deux points distincts.
« En premier lieu, sur le fait que l’avantage à soi-même puisse être poursuivi pour des faits antérieurs à l’entrée en vigueur du nouveau régime de responsabilité financière des gestionnaires publics le 1er janvier 2023″, explique le parquet général. Mais aussi, « en second lieu, sur l’appréciation du préjudice financier et son caractère significatif ».
Les trois prévenus comparaîtront aussi devant le tribunal correctionnel
Dans un communiqué daté du 12 mai, la Ville de Grenoble « se félicite que les imputations de fautes de gestion, avancées par la Chambre régionale des comptes à la suite de son contrôle d’Alpexpo, aient été rejetées par la plus haute juridiction financière ».
La municipalité, poursuit-elle, « s’attend maintenant à ce que la procédure engagée par le procureur de la République devant le tribunal judiciaire de Grenoble, sur la base de ce même rapport de la CRC, confirme cette appréciation ».
Les trois anciens dirigeants n’en ont en effet pas encore fini avec la justice. Ils sont maintenant convoqués devant le tribunal correctionnel de Grenoble, le 13 juin 2023, dans le volet « pénal » de l’affaire Alpexpo. Alain Pilaud et Claus Habfast sont ainsi prévenus respectivement de complicité de favoritisme et favoritisme. Une dernière qualification retenue également pour Catherine Calmels, poursuivie en outre pour abus de biens sociaux.
Le procès devant le tribunal correctionnel renvoyé au 2 mai 2024
Alain Pilaud, ancien adjoint de Michel Destot, et Claus Habfast, conseiller municipal d’Éric Piolle, tous deux PDG successifs d’Alpexpo étaient convoqués devant le tribunal correctionnel de Grenoble ce mardi 13 juin 2023, tout comme Catherine Calmels, ex-directrice générale de fait de la société. Les trois prévenus doivent en effet répondre de favoritisme ou complicité de favoritisme, ainsi que d’abus de biens sociaux pour cette dernière.
Mais ceux-ci ont sollicité le renvoi de l’audience, à la demande notamment du conseil de Claus Habfast, Me Denis Dreyfus, attendu devant la cour d’assises de la Drôme au procès de Gabriel Fortin. L’avocat grenoblois défend en effet le mari et des filles de la conseillère Pôle emploi assassinée par celui que les médias ont surnommé « le tueur de DRH ». Le tribunal correctionnel de Grenoble ayant logiquement accepté la requête, l’affaire Alpexpo sera donc jugée dans un peu moins d’un an, le 2 mai 2024.