REPORTAGE – Pour interpeller le gouvernement et demander des engagements concrets contre la précarisation énergétique qu’ils subissent, des collectifs de locataires organisaient un rassemblement vendredi 31 mars à 13 h 15 devant la préfecture de l’Isère. Face à la hausse des loyers et l’explosion des charges locatives liées à l’augmentation du gaz et de l’électricité, les locataires qui ne peuvent plus honorer leurs factures s’inquiètent de voir les expulsions se multiplier dès le 1er avril qui marque la fin de la trêve hivernale.
Environ 200 personnes ont participé à un rassemblement organisé par des syndicats de locataires1Notamment Actis ensemble et Grenoble habitants. de l’Alliance citoyenne (AC) soutenus par le Dal 38, les activistes de Dernière rénovation, Alternatiba et Pas sans nous, vendredi 31 mars à 13 h 15 devant la préfecture de l’Isère. L’objectif de ce rassemblement ? Interpeller le gouvernement pour lui demander des engagements concrets afin de stopper la précarisation énergétique subie par les locataires.
« On ne peut plus payer ! », alertait ainsi une banderole tandis qu’une autre demandait « proprio bourgeois, rénove chez moi ! » En cause ? La hausse des loyers et l’explosion des charges locatives liées à l’augmentation galopante du prix des énergies qui grèvent le budget des locataires. Aussi, à la veille de la fin de la trêve hivernale les collectifs s’inquiétaient-ils de voir les expulsions des plus précaires se multiplier.
D’autres actions similaires se déroulaient simultanément en France, notamment à Lyon, Marseille,Strasbourg ou encore à Saint-Denis. « C’est vraiment un appel national des locataires contre la hausse des charges et celle, abusive, des loyers », explique Maureen Servignat de l’AC.
« Dans le privé, 25 % du parc de logements sont de véritables passoires thermiques, selon la jeune femme. Les locataires subissent le froid mais aussi des charges énormes et ils ne peuvent plus payer leurs factures. » Quant aux logements sociaux, « nous demandons qu’il y ait un bouclier tarifaire pour que les gens ne se retrouvent pas avec 80 % et jusqu’à même 105 % d’augmentation. Aujourd’hui, des familles qui ont peur de se voir expulsées doivent choisir entre manger ou se loger, et ça ce n’est plus possible ! », s’indigne-t-elle.
« J’ai peur de me voir expulsée avec mes cinq enfants »
Une situation critique corroborée sur place par de nombreux témoignages, comme celui de Sandrine, locataire du bailleur social Actis à Teisseire et membre du syndicat Actis ensemble. « Avec 150 euros d’augmentation de charges du jour au lendemain, je ne peux plus payer… J’ai peur de me voir expulsée avec mes cinq enfants », s’inquiète-t-elle.
Pas mieux du côté d’Antonin. « En hiver, on doit choisir entre se peler les miches ou ne plus pouvoir payer notre facture le mois suivant, alors que notre propriétaire, millionnaire, refuse de faire le moindre travail de rénovation de notre appartement », dénonce ainsi le jeune homme. Citons encore Hayet qui, en 2022, payait 660 euros de loyer pour son appartement. « Maintenant, c’est 780 euros par mois, soit 105 % d’augmentation et ce rien que sur les charges de chauffage ! », fait-elle savoir.
Également sur place, près d’une centaine d’étudiants de l’Ensag, l’école d’architecture de Grenoble, qui outre leurs propres problèmes, sont conscients du rôle qui sera le leur plus tard lorsqu’ils seront architectes. « C’est nous qui serons les concepteurs des logements demain, souligne Audoin, étudiant en première année. Tous les étudiants de l’Ensag intègrent ces notions de transition énergétique et de lutte contre la précarisation énergétique. C’est vraiment quelque chose que nous voulons changer, tout comme nos professeurs », assure l’étudiant.
Maureen Servignat approuve. « Le sujet des passoires thermique les concerne effectivement directement. Il ne faut pas faire les mêmes erreurs que par le passé, commente-t-elle. Les étudiants en architecture font partie de la chaîne de la construction. C’est important qu’ils s’emparent de ce thème et c’est aussi pour ça que nous menons cette action ensemble. »
Précarisation énergétique : tous les indicateurs au rouge pour les plus vulnérables
Que revendiquent les collectifs de locataires ? « Nous demandons un calcul de l’APL en fonction de l’inflation et des charges d’énergie, le gel des loyers pour les logements mal isolés et le renforcement des aides à la réhabilitation, détaille Houcine, président de Grenoble habitants. Et aussi qu’un bouclier tarifaire soit mis en place pour que les locataires de logements sociaux puissent continuer à vivre dignement ! »
À l’échelon national, pour les bailleurs sociaux, tous les indicateurs sont dans le rouge pour les ménages les plus vulnérables. Ainsi, après un sondage, l’Union sociale pour l’habitat (USH) a‑t-elle fait part de son analyse en décembre 2022. « Près de la moitié des organismes HLM enregistrent une hausse de plus de 10 % du nombre de ménages en retard de paiement de loyer de plus de trois mois par rapport au 31 décembre 2021, date de la précédente mesure », rapportait alors l’USH.
« Parmi les organismes qui enregistrent les plus fortes hausses en termes de ménages en retard de paiement de plus de trois mois, la part de ceux qui ont un chauffage au gaz est supérieure à la moyenne (près de 30 %, contre 25 % en moyenne sur l’ensemble des répondants) », précisait encore le regroupement de bailleurs sociaux.
Des manifestants sur le toit de la préfecture de l’Isère
Le rassemblement s’est achevé par une forme de revendication tout à fait inédite, en tout cas à Grenoble. Ainsi, vers 14 h 20, un drone utilisé par deux personnes a‑t-il survolé la place de Verdun. Ce alors qu’au même moment « les manifestants déployaient une banderole au milieu de la chaussée », rapportait ainsi, en fin de journée, la Direction départementale de la sécurité publique de l’Isère (DDSP).
Dans le même temps, poursuivait la DDSP, « un effectif en sécurisation autour de la préfecture signalait des individus sur le toit de la préfecture en train de déployer une banderole “Locataires en action contre la précarité » ». Les forces de l’ordre ont dans la foulée interpellé une personne qui descendait du toit, les deux pilotes du drone et, une heure plus tard, la deuxième personne présente sur la toiture. Quant aux suites, le rapport de police ne précise pas si les individus interpellés ont fait l’objet ou non d’un placement en garde à vue.
Une réflexion sur « Grenoble : des syndicats de locataires demandent des engagements au gouvernement contre la précarisation énergétique »
Quels syndicats alors que ce ne sont que des groupuscules ? Dont celui de l’Alliance pour la Citoyenne en burqini.