EN BREF – Un site web dédié à l’élection présidentielle, actualisé au jour le jour par quatre chercheurs en sciences politiques dont un professeur à Sciences Po Grenoble, est en ligne depuis mars 2022. Nommé Poliverse, ce site vise à informer les citoyens sur l’élection présidentielle en recentrant la campagne sur les débats de fond.
« Les élections jouent plusieurs rôles, notamment celui d’introduire un contrôle démocratique régulier des gouvernants », rappellent quatre chercheurs en sciences politiques1Simon Persico, professeur à Sciences Po Grenoble et membre du Laboratoire de Sciences Sociales – Pacte (UMR5194, CNRS / Université Grenoble Alpes), Emiliano Grossman, professeur à Sciences Po et membre du Centre d’études européennes et de politique Comparée (CEE, UMR8239, CNRS / Sciences Po Paris), Benjamin Guinaudeau, doctorant à l’Université de Constance (Allemagne) et Isabelle Guinaudeau, chargée de recherches CNRS au Centre Émile Durkheim (UMR5116, CNRS / Sciences Po Bordeaux / Université de Bordeaux). bien décidés à y prendre part sur leur site baptisé Poliverse, mis en ligne en mars 2022.
Ainsi, au moyen « de données construites suivant des protocoles scientifiques transparents » ont-ils dressé un bilan global de la politique menée par l’exécutif sortant, le gouvernement d’Emmanuel Macron, et en ont tiré les conséquences. Une contribution qu’ils jugent d’autant plus utile pour cette élection que « le débat rétrospectif est fortement réduit, non seulement par l’entrée en campagne tardive d’Emmanuel Macron, son refus de participer à un débat avant le premier tour, mais aussi par l’émiettement de l’opposition dont les critiques sont formulées en ordre dispersé ».

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Les élections ont également une fonction prospective. Or, estiment les chercheurs, les Français en sont privés en 2022 « par manque de débats sur les options et alternatives pour l’avenir permettant éventuellement à l’exécutif élu d’invoquer un mandat démocratique », rappellent-ils.
Et pour cause, « on traite la campagne comme une compétition sportive au détriment des enjeux. Le règne du “buzz” et des petites phrases, de l’hyper-médiatisation d’Éric Zemmour et de son obsession des questions migratoires ont laissé peu d’espace aux autres candidats et aux thématiques qui intéressent les Français ». Mais aussi, « du fait de la place prise par des événements dramatiques », ajoutent-ils. En l’occurrence, la pandémie et la guerre en Ukraine.
Deux tableaux de bord pour évaluer les programmes des candidats
Ainsi, face à ces constats, les chercheurs mettent-ils à disposition du public deux outils d’évaluation des programmes des principaux candidats à l’élection présidentielle. L’un permet de suivre depuis 2002, au fil des élections présidentielles successives, l’évolution des grands thèmes au sein des programmes. L’autre aide à identifier les grands enjeux de la campagne et à dégager des perspectives pour les cinq années à venir.

Importance des prises de parole pat thème. © Poliverse
On regrettera toutefois l’absence des programmes des quatre candidats les plus à la traîne dans les sondages mais qui ont pourtant obtenu le nombre de parrainages requis : le Nouveau parti anticapitaliste, Résistons, Lutte ouvrière et Debout la France. Une exclusion d’autant plus regrettable que, de l’aveu même des scientifiques, « cette campagne se déroule sur fond de défiance vis-à-vis des institutions. Les enquêtes montrent que les Français se sentent mal représentés et que le fossé se creuse entre la vie politique et institutionnelle, d’une part, et les citoyens, de l’autre ».
Le vote « jeune » existe-t-il ?
Un dernier tableau de bord est quant à lui dédié à l’évolution des intentions de vote dans les sondages, où l’on voit clairement la montée des extrêmes. Le site Poliverse met aussi à disposition des notes d’analyse rédigées par les chercheurs sur ce qui se joue en filigrane pendant la campagne. Parmi les questions explorées : à partir de quand les sondages pré-électoraux nous renseignent-ils sur la campagne ? Le vote « jeune » existe-t-il ? Mais aussi comment prévoir l’abstention à la présidentielle ? Et quelle est la “cause cachée” de sa montée ?

Évolution des intentions de vote pour l’élection présidentielle 2022. © Poliverse
Enfin, les chercheurs proposent des éclairages sur le fonctionnement général et le déroulement de l’élection présidentielle : la législation actuelle sur le temps de parole pendant la campagne, le financement de la vie politique, ou encore les pouvoirs du président.