DÉCRYPTAGE - Alors que la guerre en Ukraine se prolonge, de nombreuses inquiétudes se font jour au sujet du risque nucléaire. Ce qui soulève, depuis début mars 2022, des interrogations sur la possibilité d'acquérir de l'iode stable, destiné à prévenir l'accumulation d'iode radioactif par la glande thyroïde en saturant celle-ci. Qu'en est-il à Grenoble, qui abrite notamment sur son territoire métropolitain le réacteur à haut flux de l'Institut Laue-Langevin (ILL) ?
Depuis début mars, soit juste après la menace nucléaire brandie par le président russe Vladimir Poutine dans le cadre de la guerre en Ukraine, la demande en pastilles d'iode explose. De ce fait, il est très difficile de se procurer en pharmacie ces comprimés d'iodures de potassium destinés à prévenir l'accumulation d'iode radioactif par la glande thyroïde (cf. encadré). À Grenoble, comme ailleurs.
En temps normal, l'iode stable sous sa forme concentrée est distribué dans le cadre des Plans particuliers d'intervention des installations nucléaires (PPI Nuc). Ce afin de limiter les conséquences sanitaires en cas d'accident dans l'une des dix-huit centrales nucléaires présentes dans l'Hexagone. Il s'agit, selon la préfecture de l'Isère, "de campagnes régulières animées par le ministère de l'Intérieur en lien avec l'opérateur concerné (EDF en général)".
La préfecture de l'Isère avait lancé une campagne dans ce cadre, en 2019, auprès des Isérois habitant dans un rayon de 10 à 20 kilomètres autour des centrales de Saint-Alban-du-Rhône ou du Bugey. Mais le retrait des pastilles d'iode se faisait alors dans une pharmacie partenaire, sur présentation d'un justificatif de domicile, et de nombreux habitants n'étaient alors pas venus les retirer… La campagne qui s'est déroulée en 2021 a donc consisté en une distribution directe de pastilles. "C'est ensuite le préfet qui, sur recommandation de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN), décide de la prise d'iode en cas d'accident", précisent les services de la préfecture.
Intérêt de la consommation d'iode en cas d'accident nucléaire
Le rejet nucléaire comprend le plus souvent de l’iode radioactif, sous forme de gaz et d'aérosols, comprenant trois isotopes : I131, I134 et I135 . Or, la thyroïde, lors d'une exposition, absorbe et fixe l’iode. Si l'iode stable sature la thyroïde, celle-ci ne peut ainsi plus absorber l'iode radioactif, ce qui lui évite l'irradiation.
Si elle absorbe l'iode radioactif, la thyroïde est irradiée tant que celui-ci n'est pas éliminé. Le risque de la radioactivité, au-dessus de certaines doses, est de contracter un cancer de l'organe irradié. C'est pourquoi, aux alentours des centrales, la préfecture organise la distribution des comprimés d'iode. Ceux-ci sont à prendre dans l'heure suivant l'accident nucléaire, sur demande du préfet. Par ailleurs, dans la mesure où cela nécessite une réelle saturation de la thyroïde, peu souhaitable pour le corps, et que l'iode est éliminée rapidement, il ne sert à rien de les prendre en prévention.
Qu'est-il prévu si un accident majeur de type Tchernobyl survient en Ukraine ou si un missile nucléaire est envoyé sur la France ?"Toute gestion de crise d'une autre ampleur relève du niveau national", affirme-t-elle. Ce cas de figure, selon la préfecture, est lié "au plan départemental de distribution d'iode", qui "ne relève pas d'une décision locale" mais d'une activation du Premier ministre.
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