TROIS QUESTIONS À - « Les risques sismiques dans le bassin grenoblois ». C’était le thème de la journée d'étude2organisée par l’Institut des Sciences de la Terre (ISTerre) et la Ville de Grenoble, en collaboration avec le Parn et l’Irma mardi 8 mars 2022 à l’attention des professionnels et des élus. Objectif ? Mettre à jour leurs connaissances sur les séismes à la lueur des derniers événements, dont le séisme du Teil en Ardèche qui a causé d’importants dommages matériels et déjoué les pronostics des experts. Quel enseignement faut-il en tirer ? Et surtout, est-on suffisamment armé contre les séismes à Grenoble ? Il semble que ce soit loin d’être le cas. Le point avec Philippe Gueguen, docteur en sismologie et directeur de recherche à l'Université parisienne Gustave Eiffel et à l'ISTerre.
Place Gre’net - Quelle est la réalité du risque sismique dans la région grenobloise? Peut-on savoir à l'avance si un séisme va se produire ?
Philippe Gueguen : Grenoble est située dans l'une des zones les plus sismiques de France Métropole. C'est une région à risque en matière de séismes. On sait qu'il y a des tremblements de terre dans les Alpes. Grenoble fait partie avec Nice des deux grosses métropoles exposées en France à un niveau d'aléas importants et qui présente un niveau de risque élevé, étant donné sa forte concentration de biens et de personnes dans un espace réduit. Mais on n'est ni en Californie, ni au Japon. Pour donner un ordre d'idée, dans le Sud-Est de la France, on a environ un séisme supérieur à une magnitude 5 tous les trente ans. Si de tels séismes, survenaient, par exemple à Belledonne, cela pourrait occasionner de lourdes conséquences à Grenoble.
Pour mémoire, comme séisme important dans la région, on a eu le séisme de Corrençon dans le Vercors en 1962, qui a fait des dommages physiques dans tout le Vercors et dans le sud de Grenoble, alors que la concentration urbaine était moins importante à cette date. Il y a eu aussi le séisme d'Annecy en 1996, avec 60 millions d'euros de dommages. Un séisme de magnitude de 5,2 particulier car il était superficiel, peu profond.
On est incapable de dire quand aura lieu le prochain séisme sur la région grenobloise mais, sur la région, il y a un séisme de magnitude 5 tous les 70 ans. À quel stade en est-on de cette période ? On ne sait pas non plus. On surveille les tremblements de terre, on les enregistre, on les détecte, mais on ne peut pas les anticiper. Toutefois, à partir de là, on construit des modèles qui nous permettent d'évaluer la probabilité d'avoir un séisme d'une certaine magnitude autour de Grenoble sur les 50 ou les 100 prochaines années. On mesure désormais aussi d'autres processus qui se passent avant les tremblements de terre. Il y a des nouveaux résultats qui sortent. Mais on est très loin de faire de la prédiction.
Place Gre’net - Le cas du séisme du Teil a ravivé les inquiétudes car il n'était pas attendu à cet endroit. Le lien a été fait avec l’activité d'une cimenterie à proximité. Qu'en est-il ? Dans une bien moindre mesure, une secousse s'était produite à Engins en 2020 dans le Vercors, là aussi, non loin d’une carrière. Peut-il y a avoir un lien de cause à effet ?
Philippe Gueguen : Le séisme du Teil avait deux caractéristiques particulières. La première est qu'il était sur une faille repérée, mais qui n'avait pas été cartographiée comme étant une faille active, c'est-à-dire pouvant générer des petits séismes. Deuxième caractéristique, c'était un séisme très superficiel. Il est impossible de repérer toutes les failles sur le territoire. Dans les Alpes, il y a une quantité de failles considérable. Il y a, d'une part, les grandes failles que l'on a identifiées et il y a, d'autre part, une quantité d'autres failles. On ne sait pas dans quel état elles sont.
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