FOCUS – Une nouvelle journée de mobilisation se tenait dans l’Éducation nationale mercredi 9 février à Grenoble. Alors que les syndicats avaient donné rendez-vous aux personnels devant le rectorat, des parents d’élève et enseignants de l’école maternelle de Villard-de-Lans faisait un arrêt par la Direction des services départementaux de l’Education nationale pour protester contre l’annonce de fermeture d’une classe. Une sur les 90 fermetures prévues à la rentrée 2022 en Isère.
« C’est un sentiment de tristesse qui m’habite aujourd’hui », confie le maire de Villard-de-Lans. Arnaud Mathieu accompagnait mercredi 9 février une délégation de personnels et de parents d’élève de l’école maternelle de sa commune, reçue par l’Éducation nationale suite à l’annonce d’une fermeture prochaine de classe. L’occasion d’un (petit) rassemblement dans la cour de la Direction des services départementaux de l’Education nationale (DSDEN), en parallèle de celui devant le rectorat de Grenoble, quelques mètres plus loin (voir encadré).
Conséquence de cette fermeture ? La grande section de maternelle resterait à 24 élèves, selon les règles établies par le ministère de l’Éducation nationale pour la rentrée de septembre 2021, mais la petite section pourrait atteindre les 29 élèves par classe. « On considère que ce ne sont pas de bonnes conditions de travail, surtout après les deux ans [de Covid] que les enfants viennent de passer ! », déplore la directrice, Sylvie Gargano.
Quatre-vingt-dix fermetures de classes prévues en Isère
Au sortir de l’entrevue, l’heure n’est pas vraiment à l’optimisme. « En résumé, on aurait dû perdre deux classes, on n’en perd qu’une. Donc on s’en sort bien, c’est le grand luxe ! », ironise Arnaud Mathieu auprès des personnels et parents d’élèves. Le sort de la classe sera décidé en commission jeudi 10 février. Mais le cas de Villard-de-Lans ne sera pas le seul à être étudié par les services de l’Éducation nationale.
Sur le seul plateau du Vercors, trois autres fermetures de classe sont en effet prévues. Mais ce ne sont pas les seules du territoire, ajoute Arnaud Mathieu. « Il y a une classe à Autrans-Méaudre, une à Lans-en-Vercors et une à Saint-Nizier… sur dix fermées sur la circonscription. C’est un territoire très pénalisé par l’Éducation nationale aujourd’hui », estime le maire de Villard-de-Lans. Pour qui les conditions d’accueil des enfants vont forcément se dégrader.
Quid du reste du département ? 90 fermetures de classes sont prévues pour la rentrée 2022, indique Catherine Blanc-Lanaute, co-secrétaire départementale du Snuipp-FSU, présente pour sa part devant le rectorat. Et la syndicaliste d’évoquer un autre territoire particulièrement touché, à savoir le Nord-Isère. Sur la seule commune de Villefontaine, ce sont ainsi quatre classes qui sont promises à la fermeture.
Déshabiller Pierre pour habiller Paul ?
Pourtant, précise Catherine Blanc-Lanaute, « nous avons en Isère une dotation positive de 23 postes ». Des postes qui viennent renforcer des dispositifs ministériels comme le plafonnement des effectifs à 24 élèves de la grande section maternelle au CE1, ainsi que la stratégie de dédoublement de classes dans les zones d’éducation prioritaire. Ce au détriment des autres classes ou des autres secteurs ?
Personne ne remet en cause le principe des dédoublements, mais pour les personnels concernés par les fermetures, l’impression persiste que l’on déshabille Pierre pour habiller Paul. « Contrairement à ce que l’on peut penser, il y a aussi des classes et des écoles difficiles dans les zones rurales ou de montagne », s’agace au demeurant Marc Desplanques, enseignant à Villard-de-Lans. Et de reprendre : « Ce n’est pas parce qu’on est dans la montagne que nous n’avons que des petits anges à l’école ! »
« On sait très bien que, pour les conditions d’apprentissage, la baisse des effectifs est essentielle », estime de son côté Catherine Blanc-Lanaute. Qui constate qu’en Isère, les ouvertures de classes ne se font que si des fermetures s’organisent ailleurs. Un principe de vases communicants qu’un parent d’élève de Villard-de-Lans interprète comme « un nivellement par le bas ». Arnaud Mathieu, lui, résume en une phrase sa pensée : « Clairement, l’État gère la pénurie. »
Nouveau rassemblement devant le rectorat de Grenoble »
Le personnel est complètement essoré. Les difficultés scolaires s’accroissent, les inégalités scolaires augmentent, on a besoin de moyens ! » Devant le rectorat de Grenoble, les enseignants et personnels de l’Éducation nationale ont eux aussi (re)donné de la voix mercredi 9 février. Au micro, les témoignages d’enseignants se succèdent, guère différents des messages entendus précédemment, à de nombreuses reprises.
Dans le viseur ? Les suppressions de postes, « alors qu’il faudrait en créer », et le gel du point d’indice qui ne fait rien pour attirer de futurs enseignants. « Ceux qui rentrent dans le métier sont à 1,12 % du Smic. Comment veut-on recruter dans l’Éducation après cinq ans d’étude ? », interroge au micro une syndicaliste FSU. Les classes surchargées sont également dénoncées. « On n’est pas des sardines », affiche ainsi la pancarte d’un manifestant.
« C’est notre ministère et notre gouvernement qui portent la responsabilité complète de la dégradation de l’éducation, des dénonciations de travail pour nous et des conditions de travail des élèves », conclut l’enseignante. Tout comme pour les parents d’élève de Villard-de-Lans, une délégation d’une quinzaine de personnes a été reçue par les services du rectorat. Mais pas, comme c’est souvent le cas, par la rectrice en personne.