ENTRETIEN – L’écrivain isérois Naëm Bestandji, fondateur du comité grenoblois de « Ni putes ni soumises », interviendra à la conférence sur la laïcité organisée par Émilie Chalas, députée LREM de l’Isère, ce jeudi 17 février 2022, à la Plateforme, à Grenoble. Prévu initialement le 9 décembre 2021, à l’occasion de la Journée de la laïcité, l’évènement avait dû être reporté en raison de la situation sanitaire. Celui qui se définit comme « militant laïque et féministe universaliste » a publié, le 4 novembre 2021, Le linceul du féminisme – Caresser l’islamisme dans le sens du voile, aux éditions Seramis. Un premier livre qui éclaire et décrypte sa conception du port du voile islamique.
[Article publié initialement le 22 décembre 2021 et mis à jour le 15 février 2022]
Place Gre’net – Comment votre parcours personnel vous a‑t-il conduit à militer contre le port du voile et, plus globalement, à vous engager dans les débats sur l’islamisme et la laïcité ?
Naëm Bestandji - Pour être précis, je ne milite pas contre le port du voile mais contre le sexisme et le patriarcat dont le voile est la traduction matérielle, tout en étant un instrument identitaire et politique. La différence peut sembler subtile, mais elle existe. Je l’explique dans mon livre.
J’ai grandi dans un quartier populaire de la banlieue de Grenoble, dans une famille d’origine maghrébine et de confession musulmane. Et j’ai travaillé dans le secteur socio-culturel. J’ai vu l’apparition de l’islamisme dans ma vie privée, dans mon quartier, dans mon travail.
Cela s’est manifesté à travers différentes choses, en particulier les relations entre filles et garçons. Le baromètre, c’était le port du voile, qui s’est développé très progressivement dans les années 1990, avec un coup d’accélérateur au début des années 2000.
Était-ce aussi le cas dans votre famille ?
Dans ma famille, la pratique assidue par le prisme de « savants » extrémistes est apparue aussi au fil des années 1990. En fait, plus l’affirmation extrémiste de l’islam se manifestait, plus ma fibre féministe et laïque grandissait. Ce qui a fini par créer des tensions et devenir tabou avec le temps.
J’ai essayé de leur expliquer que le concept du voile n’est pas une prescription religieuse et qu’il n’y a que les islamistes qui en parlent. Mais même ça, c’était déjà tabou. Pour nous, le lien familial est plus important que tout. Il y a des sujets qu’on préfère alors éviter. Je n’ai jamais essayé de convaincre les femmes de ma famille de retirer leur voile. Elles n’ont pas essayé d’empêcher ma lutte féministe et laïque.
Selon vous, le port du voile n’est donc pas une obligation religieuse ? Mais plutôt un outil au service du patriarcat pour les islamistes ?
Ce sont les islamistes eux-mêmes qui le disent. Quand ils rentrent dans les détails, la justification du port du voile ne se fait qu’à travers le sexe et le prisme du patriarcat. Ils considèrent la femme comme une proie et l’homme comme un prédateur par nature. Et ils prennent souvent le même exemple en comparant l’homme au loup. Son désir sexuel serait donc incontrôlable car instinctif.
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