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Des sachets d’herbe à l’ef­fi­gie d’Éric Dupond-Moretti : le deal à Grenoble entre humour, mar­ke­ting… et violences

Des sachets d’herbe à l’ef­fi­gie d’Éric Dupond-Moretti : le deal à Grenoble entre humour, mar­ke­ting… et violences

FOCUS – Alors que les poli­ciers gre­no­blois ont décou­vert des sachets d’herbe à l’ef­fi­gie du ministre de la Justice, le pro­cu­reur de la République note le sens de l’hu­mour des dea­lers de l’ag­glo­mé­ra­tion… pour mieux condam­ner leur acti­vité. Si le mar­ke­ting est bien maî­trisé par les tra­fi­quants, la vio­lence est en effet sou­vent au ren­dez-vous sur fond de concur­rence ou de règle­ments de comptes.

Des dea­lers gre­no­blois armés du sens de l’hu­mour ? C’est en tout cas la qua­lité que leur prête le pro­cu­reur de la République de Grenoble Éric Vaillant sur Twitter. Et ceci alors que la police natio­nale a révélé avoir saisi des sachets « d’herbe de can­na­bis » à l’ef­fi­gie.. du ministre de la Justice Éric Dupond-Moretti. Ou plu­tôt d’une cari­ca­ture du ministre, qui semble reprise d’un des­sin publié par le « média alter­na­tif » suisse 1dex.

Le sachet d'herbe à l'effigie du ministre Éric Dupond-Moretti provient d'un site de vente de pochons personnalisés. DR

Le sachet d’herbe à l’ef­fi­gie du ministre Éric Dupond-Moretti pro­vient d’un site de vente de pochons per­son­na­li­sés. DR

« Les dea­lers gre­no­blois ont de l’humour mais res­tent quand même des tra­fi­quants de stu­pé­fiants qui vendent des pro­duits illi­cites et dan­ge­reux, font vivre dans la peur les hon­nêtes gens des quar­tiers qu’ils dominent et exploitent la misère humaine (emploi de mineurs par exemple) », a ainsi déclaré le pro­cu­reur dans un mes­sage publié le dimanche 9 octobre. Soit quelques heures à peine après la tru­cu­lente décou­verte des policiers.

Le sens du mar­ke­ting des trafiquants

En vérité, l’hu­mour des tra­fi­quants gre­no­blois s’ins­pire de celui d’une pla­te­forme de vente en ligne. Les sachets en ques­tion sont en effet dis­po­nibles à l’a­chat sur un site de vente de « pochons per­son­na­li­sés ». Éric Dupond-Moretti y figure aux côtés de Pablo Escobar, du Joket ou de Mario et Luigi. Le sachet est « her­mé­tique et inodore », vante le site. Le prix ? 15 euros pour 100 pièces. Et le suc­cès semble au ren­dez-vous, puis­qu’un réap­pro­vi­sion­ne­ment est en cours.

Les sachets personnalisés étaient déjà employés par les dealers de l'agglomération grenobloise, comme ici quartier Mistral à Grenoble. DR

Les sachets per­son­na­li­sés ont déjà été employés par les dea­lers de l’ag­glo­mé­ra­tion gre­no­bloise, comme ici quar­tier Mistral à Grenoble. DR

L’affaire sou­ligne à nou­veau le sens du mar­ke­ting des dea­lers gre­no­blois. Dans le quar­tier Mistral en 2018, les reven­deurs offraient ainsi un album du rap­peur Rohff pour l’a­chat de dix grammes de can­na­bis, comme le révé­lait le média RapRNB. En 2018, les mêmes dea­leurs de Mistral ven­daient leur can­na­bis dans des sachets (déjà) per­son­na­li­sés, estam­pillés Mistral 38. Ceci après avoir orga­nisé une tom­bola via Snapchat quelques mois plus tôt.

Au-delà du mar­ke­ting, le mode de com­merce même évo­lue. À la faveur du confi­ne­ment, les livrai­sons à domi­cile sont deve­nues cou­rantes. Avec, là encore, l’u­ti­li­sa­tion des réseaux sociaux pour pro­cé­der aux com­mandes. De quoi inquié­ter le par­quet de Grenoble, qui annon­çait sa volonté de lut­ter contre le phé­no­mène en février 2021. Pas ques­tion, en somme, que « Uber shit » ou « Delivr’Weed » devienne une norme.

Des vio­lences dignes des films de gangster

L’inventivité des dea­leurs pour­raient faire sou­rire si elle ne s’ac­com­pa­gnait pas de vio­lences urbaines et de règle­ments de comptes, per­çus comme mon­naie cou­rante sur l’ag­glo­mé­ra­tion. De quoi ame­ner un jeune rap­peur à mettre en scène des dea­lers armés jus­qu’aux dents – dans une vidéo ini­tia­le­ment prise au sérieux – pour mieux scan­der « Grenoble c’est chaud, Grenoble c’est Chicagre ».

Lionel Beffre, (ancien) préfet de l'Isère et Fabienne Lewandowski, directrice de la DDSP de l'Isère, avaient mené une démonstration de force quartier Mistral suite à une vidéo exposant des dealers avec des armes de guerre. © Joël Kermabon - Place Gre'net

Lionel Beffre, (ancien) pré­fet de l’Isère et Fabienne Lewandowski, direc­trice de la DDSP de l’Isère, avaient mené une démons­tra­tion de force quar­tier Mistral suite à une vidéo expo­sant des dea­lers avec des armes de guerre. © Joël Kermabon – Place Gre’net

Les règle­ments de comptes prennent en effet bien sou­vent une dimen­sion par­ti­cu­liè­re­ment vio­lente. Le 15 juillet 2021, c’est un véhi­cule cri­blé de balles en train de brû­ler avec un homme mort à bord qu’on décou­vert les poli­ciers quar­tier Teisseire. Tandis qu’en août 2020, le récit d’un guet-apens sur la com­mune d’Eybens n’a­vait rien à envier à un film de gangster.

La vio­lence en Isère ne se mani­feste tou­te­fois pas seule­ment sur l’ag­glo­mé­ra­tion de Grenoble. À Villefontaine, au mois de juillet 2021, un jeune homme de 21 ans était laissé pour mort après un pas­sage à tabac près d’un point de deal. Lundi 11 octobre, la jus­tice indique avoir pro­cédé à l’in­ter­pel­la­tion d’une dizaine de sus­pects, au cours d’une opé­ra­tion mobi­li­sant 120 gen­darmes. La riva­lité entre tra­fi­quants semble la piste pri­vi­lé­giée par les enquêteurs.

Florent Mathieu

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