ENQUÊTE (3|3) - Depuis trente ans, les politiques publiques ont échoué à sortir les quartiers Sud à Grenoble de leur isolement. Alors que violences urbaines et trafic de stupéfiants se diffusent dans toute la ville, l'État et les collectivités tentent de colmater les brèches. Mais après l'élan de rénovation urbaine, l'accompagnement social semble le grand oublié des politiques.
À l'Alma, quartier du centre de Grenoble situé à deux pas de l'hôtel de police, coups de filet et interpellations de dealers rythment ce haut lieu du trafic de drogue. Le 21 juillet, Hakim Lamouri, connu pour s'adonner au trafic de stupéfiants, était condamné à un an d'emprisonnement. Deux jours plus tôt, il avait jeté une pierre sur une ambulance. C'était sa 45e condamnation... Habitants du quartier et riverains posent ainsi un regard désabusé, voire désespéré, sur le manège qui se déroule sous leurs yeux.
Du reste, au-delà du trafic, impossible à endiguer comme le reconnaissent les policiers et les autorités judiciaires, son impact et ses dégâts collatéraux touchent toute la ville.
Une privatisation de l'espace public qui se diffuse
« Il y a une personne que l'on oublie là-dedans : c'est la victime », tient à rappeler Brice Gajean, policier à Grenoble et représentant du syndicat SGP. « Personne ne parle jamais des victimes. De ces gens, smicards, qui se font brûler leur voiture la nuit et qui n'ont pas pu se payer une assurance. Tous ces drames sociaux, on n'en parle jamais. On ne parle que des dealers et des policiers. »
À Grenoble comme partout, l'appropriation de l'espace public – privatisation disent certains – n'est pas un phénomène nouveau. Mais il se diffuse de plus en plus largement. En mai, des affrontements entre jeunes des quartiers Mistral et Saint-Bruno ont ainsi eu lieu jusque devant les grilles du collège, sur fond de guerre des territoires.
Un malaise auquel les politiques publiques n'ont pas su répondre ces trente dernières années. Ce n'est pourtant pas faute d'y avoir mis les moyens, financiers s'entend. Sur l'agglomération grenobloise, 450 millions d'euros ont en effet été injectés dans le programme de rénovation urbaine.
À Mistral, mais aussi à La Villeneuve de Grenoble, au Village 2 d'Echirolles, au quartier Bastille de Fontaine, à La Buisserate à Saint-Martin-le-Vinoux ou aux Îles de Mars au Pont-de-Claix. Sans résultats très probants, si ce n'est l'amélioration du bâti.
Le volet social de la rénovation relégué au second plan
Poursuivez votre lecture
Il vous reste 92 % de l’article à lire. Obtenez un accès illimité.
Vous êtes déjà abonné.e ? Connectez-vous