FOCUS – Trois acteurs du terrain social – l’Association des bailleurs sociaux de l’Isère, Un Toit pour tous et la Fédération des acteurs de la solidarité Auvergne-Rhône-Alpes – livrent les propositions issues d’une série de webinaires organisée fin 2020. Cinq items adressés aux acteurs politiques locaux et nationaux pour relancer et transformer la dynamique du logement social en Isère.
Comment favoriser le logement des plus vulnérables en Isère ? Suite à une série de “webinaires” organisée fin 2020, l’Association des bailleurs sociaux de l’Isère (Absise), Un Toit pour tous et la Fédération des acteurs de la solidarité (Fas) Auvergne-Rhône-Alpes adressent cinq propositions clés. Leurs destinataires ? La Métro, le Pays voironnais, le Grésivaudan, le Département ou la Région. Sans oublier la préfecture de l’Isère et la DDETS.
La date retenue pour se livrer à cette interpellation n’est pas le fruit du hasard. « C’est évidemment le moment de le faire, [quand] des exécutifs se mettent en place. Au moment où un nouveau Département s’installe, une nouvelle Région s’installe et où un nouveau préfet arrive », explique Isabelle Rueff, présidente d’Absise. Quand bien même les résultats des urnes n’ont guère changé la donne politique, en Isère comme sur la région Auvergne-Rhône-Alpes.
Construction, maintien dans le logement et « bienveillance »
Les propositions en question ? La première, sans doute la plus importante, concerne la construction de nouveaux logements, plus particulièrement pour les ménages les plus démunis. Autrement dit, des logements très sociaux. Si Isabelle Rueff insiste sur la dimension « généraliste » du logement social et la nécessité d’instaurer une certaine mixité, les besoins n’en sont pas moins criants… et les programmations à la baisse.
En deuxième lieu, les partenaires appellent à une continuité accrue entre l’accès au logement… et le maintien dans celui-ci. Tout n’est en effet pas réglé une fois la personne logée, rappelle Isabelle Rueff. La troisième proposition appelle, pour sa part, à « repositionner » l’accompagnement social. Par exemple en mutualisant les moyens des divers dispositifs et en s’adaptant au caractère évolutif de la situation des ménages suivis.
Quatrième proposition : « donner un rôle plus actif aux locataires »… le tout dans un climat de « bienveillance » accrue. En clair, résume Isabelle Rueff, « arrêter d’avoir un regard dur sur les personnes en situation de fragilité, de considérer que tout demandeur d’aides est un fraudeur en puissance ». Enfin, les partenaires appellent à mesurer l’impact de la crise sanitaire (et sociale) de la Covid-19 sur les publics vulnérables.
Des choix politiques déterminants
Pour les acteurs du logement et de l’accompagnement social, tout est question de choix politiques. « La crise sanitaire a montré que ce que nous réclamons depuis des années, que nul ne soit contraint de vivre à la rue, est devenu possible : des moyens ont été mis par l’État et les chiffres du 115 ont fortement diminué », note Francis Silvente, vide-président de la Fas. Qui souhaite aujourd’hui que les moyens mis en œuvre soient redéployés sur le logement social.
Mais l’État n’est pas seul à assumer des compétences dans le domaine. Le Conseil départemental gère un pan très important de la politique sociale, tandis que la Métro a un rôle prépondérant à jouer en matière de logement. Ainsi que les maires des communes qui la composent. Des élus qui, in fine, décident ou non d’accorder des permis de construire, certains voulant limiter le nombre de logements sociaux, d’autres l’étalement urbain et l’artificialisation des sols afin de préserver la biodiversité.
Est-ce là, entre autres, que le bât blesse ? « Il y a une espèce de vague. La construction est remise en cause depuis quelques années », note Michelle Daran, présidente d’Un toit pour tous. Qui assume d’être en faveur de la « densification » des zones urbaines. « Il faut construire en hauteur : on ne peut pas faire que des R+2 pour loger les 15 000 demandes en attente de logement social ! », s’agace-t-elle. Avant de pourfendre « l’idée que le dernier arrivé ferme la porte derrière lui ».
Un enjeu de communication auprès des électeurs
Le changement politique doit-il aussi passer par le changement des mentalités ? « Nous avons un enjeu de communication auprès des élus, mais aussi des électeurs », souligne Francis Silvente. Un « travail de conviction au quotidien [pour] arriver à changer l’image que certains peuvent avoir du logement social », enchérit Isabelle Rueff. Et cela, ajoute-t-elle, pour que le logement ne soit pas réservé au secteur privé.
Au contraire, estime la présidente d’Absise, le logement social devrait relever aujourd’hui de « l’intérêt général ». Et même, ajoute Francis Silvente, figurer en bonne place dans les projets soutenus par le plan France Relance. « S’il y a un secteur non délocalisable, c’est bien le bâtiment ! », peste ainsi le vice-président de la Fas Aura. Reste à savoir quelles réponses les institutions apporteront aux propositions des acteurs du terrain social.