FOCUS – En amont de son inauguration officielle prévue le 4 juin, le musée Champollion de Vif a dévoilé ses coulisses à l’occasion d’une visite de son installation. L’occasion de découvrir l’esprit du musée au travers de trois salles, sur trois étages différents. Avec, en point d’orgue, le prêt du musée du Louvre au Département de 85 pièces de ses antiquités égyptiennes.
Dernière ligne droite pour le musée Champollion de Vif, dont l’inauguration officielle est prévue le vendredi 4 juin 2021. Dix jours avant la date tant attendue, les services du Département de l’Isère organisaient une visite pour mesurer le chemin parcouru depuis le lancement du projet. À savoir un musée aménagé dans une maison vieille de plusieurs siècles ayant fait l’objet de toutes les mises aux normes nécessaires. Avec, à la clé, quelques découvertes au fur et à mesure des travaux.
« Quand on visite un musée, tout est fini, tout est sous vitrine. Ça paraît simple, mais en fait c’est très compliqué ! », explique Aymeric Perroy, directeur de la culture et du patrimoine au Conseil départemental de l’Isère. Derrière les vitrines et les œuvres exposées, se cachent des conditions drastiques de conservation. Mais si le musée révèle aujourd’hui ses coulisses, l’objectif final est bien « que le visiteur ne voie pas tout ce travail », précise-t-il.
Une maison et un musée de famille
L’équipe du musée n’est pas au bout de ses peines, au regard du travail à accomplir avant son ouverture au public. Pas question pour l’heure d’une visite exhaustive, alors que la plupart des œuvres sont encore en attente d’être accrochées aux murs ou mise en sécurité derrière des vitrines. Mais Caroline Dugand, conservatrice du site, propose de parcourir trois salles emblématiques de l’esprit du musée.
Première salle au rez-de-chaussée, avec la reconstitution du salon de la maison Champollion, orné de nombreux portraits de famille. Avec, par exemple, les visages de Jacques-Joseph, frère aîné de Jean-François Champollion, et de son épouse Zoé Berriat. Mais aussi de neveux et nièces de l’égyptologue, notamment Aimé Champollion, ou du jeune Ali, prénommé ainsi en hommage aux recherches orientales de son oncle.
« Toutes les œuvres présentées dans ce musée ont été restaurées par des restaurateurs spécialisés », précise Caroline Dugand. L’occasion pour la conservatrice de rappeler l’importance du travail préparatoire ayant précédé la naissance du musée. Les œuvres appartenant au fonds de la maison Champollion ont alors été répertoriées et un grand nombre d’entre elles ont rejoint la réserve pour alimenter notamment de futures expositions temporaires.
Des apports et prêts d’autres musées
Si le musée Champollion s’appuie sur sa collection propre, il peut aussi compter sur les apports et prêts d’autres établissements. Une dimension marquante au premier étage du site, dans une salle reproduisant la façon dont l’Égypte a pu fasciner la population au début du XIXe siècle. Ce dans la foulée de la campagne d’Égypte de Napoléon Bonaparte. Une expédition accompagnée par près de 200 savants.
Tableau prêté par le Musée de Grenoble, animaux naturalisés “fournis” par le Muséum de Grenoble… « Nous avons été très aidés par les musées de la région Auvergne-Rhône-Alpes », souligne Caroline Dugand. La salle propose également des planches scientifiques établies au retour de la campagne d’Égypte, témoins d’une approche et d’une esthétique typique du XIXe, dont la salle s’inspire dans sa ligne muséologique.
Le musée du Louvre prête 85 pièces de ses antiquités égyptiennes
Mais l’événement que le Musée Champollion veut mettre en avant, c’est bien le prêt de 85 antiquités égyptiennes par le Musée du Louvre. Des œuvres qui seront exposées au deuxième étage de la maison, dans une salle dédiée au musée Charles X. Soit la première section d’égyptologie au sein du Louvre, ouvert en 1927 et dont Jean-François Champollion sera le premier conservateur, non sans faire preuve de modernité dans son approche.
La conservatrice en chef des antiquités égyptiennes du Louvre le revendique : le but est bien de parler de Champollion conservateur. « C’est aujourd’hui à Vif que l’on verra le mieux le musée Charles X. À Paris, vous en voyez les boiseries, mais il n’y a plus l’esprit du musée », juge Florence Gombert-Meurice. Qui souligne les qualités pédagogiques de la muséographie selon Champollion, jusque dans la composition des socles accompagnant les pièces.
De fait, les pièces qui seront exposées proviennent toutes du musée Charles X originel. Et répartis de manière très rigoureuse, en suivant les exigences mêmes de son premier conservateur. Pas question toutefois de reproduire l’apparat antique qu’avait le musée en 1827 et qui avait fortement déplu à Champollion. « On a mis quelque chose de moderne pour rentrer dans la manière dont Champollion pensait l’Égypte », souligne Florence Gombert-Meurice.
La conservatrice actuelle des antiquités égyptiennes ne cache pas son émotion. « C’est émouvant d’accompagner l’ouverture d’un nouveau musée, de voir que l’Égypte va vibrer aussi à Vif », explique-t-elle. Tout en se réjouissant qu’un hommage original soit rendu à Jean-François Champollion, dans la maison même où ses travaux furent menés. Et dont « l’esprit intime » a su être conservé, malgré toutes les contraintes contemporaines.