REPORTAGE – Depuis quatre ans, Jean-Pierre Valverde organise chaque mercredi des distributions et des maraudes dans le centre-ville de Grenoble pour les sans-abris et les plus démunis. Avec son association Solidarité SDF Grenoble, il tente ainsi de répondre à une pauvreté croissante, accentué par la crise sanitaire.
Mercredi 12 mai, 18 h 30. Des bénévoles de l’association Solidarité SDF Grenoble s’activent devant la bibliothèque Centre-ville, dans une ambiance décontractée. Ils transportent, installent et rangent des produits de première nécessité : boîtes de conserve, lait, pain, et même des masques fabriqués à partir de chaussettes.
Derrière les barrières installées, des bénéficiaires font déjà la queue, impatients. Dès leur arrivée, ils se voient remettre des numéros. « Ça évite les chamailleries », explique Valérie, une bénévole aux cheveux rouges vif, habituée de la distribution.
Tous les mercredis à cette-heure-ci a lieu une distribution de denrées alimentaires à destination des plus démunis. « La plupart des bénéficiaires vivent dans des squats ou en tout cas ont un toit », explique Pierre Valverde, qui a créé l’association Solidarité SDF Grenoble, il y a plus de quatre ans. « Nos distributions englobent beaucoup plus de gens que seulement des SDF. La plupart sont démunis mais ils ont un toit. »
Une relation de confiance entre Jean-Pierre et les adhérents de son association
Fonctionnaire à la Direction départementale des territoires, Jean-Pierre Valverde déploie, depuis des années, une énergie folle dans l’aide aux plus démunis durant son temps libre. Ce jour-là, une équipe de scouts de Saint-Jean (Scouts et guide de France) est venue lui prêter main forte.
Elle a d’ailleurs pris en charge la totalité de la distribution, exceptionnellement gratuite pour les bénéficiaires, au lieu de la participation de 1,5 euros habituellement demandée.
Jean-Pierre bavarde avec les arrivants, les sans-abris, s’assoie avec eux, prend de leurs nouvelles. « Ce qui est intéressant, c’est qu’il construit un vrai rapport de confiance avec eux », constate le chef scout. Une relation amicale entre bénévoles et bénéficiaires, puisque certains sont des habitués. La plupart sont d’ailleurs à la fois derrière les tables pour aider, puis devant pour remplir leur panier. « Il y a un noyau dur d’environ quinze personnes qui viennent chaque semaine », explique Jean-Pierre.
200 kilos de nourriture distribués chaque semaine par Solidarité SDF
Chacun leur tour, chariot en main, ils font ensuite le tour des tables, avant d’être servis par les bénévoles qui arrivent au compte-goutte après leur journée de travail. En 45 minutes, tous les bénéficiaires ont récupéré leur lot de denrées alimentaires, qui proviennent majoritairement de la Banque alimentaire de l’Isère, parfois aussi de boulangeries de l’agglomération, du CCAS ou du Min de Grenoble. En moyenne, 200 kilos de nourriture, sur les 18 tonnes journalières que reçoit la Banque alimentaire de l’Isère, sont ainsi récoltés chaque semaine pour cette distribution.
Une quantité nécessaire pour répondre aux besoins croissants des plus démunis. Anne-Marie, habitante du quartier Saint-Laurent et membre d’ATD quart-monde, explique que sa maigre retraite ne lui suffit pas toujours à joindre les deux bouts. Alors, elle est venue sur les conseils de son amie Valérie. « On s’entraide entre précaires », assure cette dernière avec le sourire.
Un peu plus loin, Phoebe, 23 ans, vient elle pour la première fois. « Ça me permet d’avoir des produits frais que je ne pourrais pas acheter en temps normal », explique-t-elle.
Une précarité qui s’accroît avec la crise sanitaire
En janvier 2019, l’association Un toit pour tous et la Métropole de Grenoble recensaient lors de la Nuit de la solidarité environ 1 757 personnes en situation de grande précarité. Une pauvreté qui ne fait qu’augmenter avec la crise sanitaire. « Avant la pandémie, une quinzaine de personnes venaient à nos distributions chaque semaine. On est passé à trente aujourd’hui », estime Jean-Pierre Valverde.
En plus de ces distributions, il fait aussi partie d’un collectif de glanage. Il récupère ainsi dans les poubelles ce que les supermarchés jettent et qui est encore consommable. Une manière d’allier lutte contre la pauvreté et contre le gaspillage alimentaire.