FOCUS – Dans le cadre de l’événement isérois Paysage>Paysages, le musée de l’Ancien Évêché expose les « Calligraphies alpines » de l’artiste naturaliste Éric Alibert. Des œuvres, qui au-delà de leur esthétisme, font prendre conscience de la fragilité d’une nature vivante, sauvage et mystérieuse.

Eric Alibert présentant son exposition « Calligraphies alpines » au musée de l’Ancien Evêché © Corentin Bemol – Place Gre’net
« Ce n’est pas tant la nature qui m’intéresse que les forces de la nature. » Cette citation de Paul Cézanne, l’artiste Éric Alibert l’a faite sienne dans ses tableaux qui ornent désormais les murs du musée de l’Ancien Évêché.
Une exposition organisée dans le cadre de l’événement isérois Paysage>Paysages, qui se tient depuis la mi-juillet jusqu’au 15 novembre 2020.
Ces forces mystérieuses, presque mystiques, sont les marionnettistes de cette nature en perpétuel mouvement. Croquis ornithologiques, paysages, chamois… L’artiste met en scène toute la diversité de la vie alpine. Au total, soixante œuvres pour représenter la grande fragilité du milieu montagnard.
Dans ces œuvres, rien n’est laissé au hasard. Les peintures représentent des formes, des « tâches » animalisées. Une impression de mouvement continu donnant naissance à une faune éphémère, fragile. La volonté de l’artiste ? Rendre abstrait le réel, la nature, pour les élever au rang de symboles. Avec, pour représenter la fragilité, le choix de l’encre et de l’aquarelle, procédés qui s’évanouissent face aux intempéries et au temps.
Un certain rapport au temps
De temps qui passe, il en est beaucoup question entre les lignes, avec les mouvements qui traversent les paysages qu’Eric Alibert immortalise. « Il y a cette idée dans ces œuvres, que nous ne sommes qu’une virgule, un mouvement de pinceau. Nous, comme les animaux, sommes plus un souffle qu’une entité. Cette idée me bouleverse », explique-t-il.

« La forêt » d’Eric Alibert @ Corentin Bemol – Place Gre’net
Une idée du temps également développée dans des peintures de paysages jouant sur la dualité ombre/lumière. « Quand on peint la nature, on évoque l’idée du temps ». Une aquarelle d’une forêt de nuit, répond ainsi à une autre peinture, une forêt de jour. La neige semble en feu… mais ce dernier disparaît avec le crépuscule. « J’ai voulu montrer ces paysages qui s’enfoncent dans la nuit et me demander ce que la nuit garde du jour et qu’est ce qu’elle apporte. L’énergie qui circule dans ces images nous dévoile certaines choses et nous en cache d’autres ».
Une écriture imperceptible

« Quatres tétras-lyres » d’Eric Alibert © Corentin Bemol – Place Gre’net
Pourquoi « Calligraphie » ? Pour Eric Alibert, la réponse est évidente. Il ne s’agit pas seulement de peintures, mais avant tout, d’une autre manière d’écrire. « Si l’on prend ce tableau des trois chamois, Il y a un jeu aérien de ces animaux qui, pour moi, correspond à une écriture éphémère. Comment les animaux communiquent ? Le corps de l’animal est une parabole sur ce que la nature est en train de nous dire ».
Une écriture donc intime, mystérieuse, qui laisse songeur Jean-Pierre Barbier, président du département de l’Isère : « Je n’ai pas pris la peine de lire les textes car les œuvres parlent d’elle-même. Cette exposition me correspond car elle est constituée de symboles », affirme t‑il.
Ces œuvres constituent au total trente années de la vie d’Eric Alibert. Un morceau de vie mis à l’honneur par le musée de l’Ancien Évêché. « Si mes œuvres permettent au public de ressentir le sauvage et de s’imbiber des mystères de la nature, alors je serai comblé » conclut-il.