FOCUS – Le rapport issu des travaux de la Convention citoyenne pour le climat est désormais sur le bureau d’Emmanuel Macron. Outre ce qu’il en adviendra, le collectif des Citoyens pour le climat de Grenoble attend désormais du public qu’il s’empare des mesures préconisées. L’occasion, ce jeudi 25 juin 2020, d’une opération médiatique en présence de trois participantes à la fameuse convention.
Ce jeudi 25 juin 2020, les collectifs et association grenoblois Citoyens pour le climat, Alternatiba-ANVCop21 et Fridays for future donnaient rendez-vous place Saint-André à Grenoble.
L’occasion d’une rencontre informelle avec trois des quelque 150 personnes représentatives de la diversité de la société française ayant participé à la Convention citoyenne pour le climat (CCC).
En l’occurrence, une expérience démocratique inédite en France, fruit des conclusions du Grand débat national, d’une proposition du collectif Gilets citoyens et du Conseil économique, social et environnemental (Cese).
Ainsi, du 4 octobre 2019 au 21 juin 2020, ces citoyens tirés au sort ont-ils planché sur la définition d’une série de mesures permettant d’atteindre une baisse d’au moins 40 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici 20301Par rapport aux chiffres de 1990. Et ce, était-il bien précisé dans la lettre de mission du gouvernement, « dans un esprit de justice sociale ».
Un rapport de 600 pages compilant 149 propositions pour le climat
Le résultat de ces neuf mois de travaux ? Un énorme rapport de 600 pages fort d’un satisfecit de 95 % compilant 149 propositions remis ce 21 juin 2020 à la ministre de la Transition écologique et solidaire, Élisabeth Borne. Un « vrai projet de société » a estimé, quant à elle, Laurence Tubiana, directrice de la Fondation européenne pour le climat (ECF) et coprésidente du comité de gouvernance de la convention.
Il reste cependant que ce volumineux rapport n’est que le premier tome d’une suite restant à écrire. Désormais déposé sur le bureau d’Emmanuel Macron, il revient au président de la République de statuer sur son destin.
À cet effet, le chef de l’État recevra les 150 participants ce lundi 29 juin à l’Élysée, « afin d’apporter une première réponse à leurs propositions ».
De fait, s’inquiètent collectifs et associations, il y a péril en la demeure. « Les mesures ainsi préconisées doivent à présent nourrir l’action publique, tout comme celle du législateur. » Et ce d’autant plus que deux d’entre elles pourraient même faire l’objet d’un référendum, si toutefois le président le décidait. Pour autant, « soumettra-t-il “sans filtre” l’ensemble des propositions citoyennes au travail législatif ou référendaire, comme il l’a assuré ? », interroge le site d’informations en ligne Bastamag.
Après la convention, « chaque délai et chaque hésitation aggravent la crise »
Le collectif Citoyens pour le climat Grenoble (CPLC) de Grenoble ne dit pas autre chose : il faut que la mayonnaise prenne. « Il nous appartient maintenant de faire en sorte que ces propositions ne soient pas invisibilisées, édulcorées ou détricotées », explique-il dans un communiqué.
Et c’est d’ailleurs bien dans cet esprit qu’était organisée place Saint-André l’opération agrémentée d’une performance de l’artiste Myla Al Messa. L’objectif des organisateurs ? Que les participantes iséroises puissent répondre en direct aux questions du public, des internautes et des collectifs écologistes grenoblois.
« Il ne faut plus perdre de temps », alertent à l’unisson les défenseurs du climat. « Compte tenu du degré d’urgence climatique, chaque délai et chaque hésitation aggravent la crise. Dans ce contexte, rendre publique et médiatiser ces propositions, en débattre le plus largement possible est primordial pour notre avenir », expliquent les organisateurs. « Là, ils n’étaient que 150. Ce qu’on attend maintenant, c’est que chacun se saisisse de ce sujet », invite, quant à elle, Lorella du CPLC.
« Nous avons remis tout ça au gouvernement, maintenant c’est à eux de jouer »
« Nous nous sommes retrouvés embarqués dans une superbe aventure démocratique », nous confie Marie-Sylvie Dhénin, professeure des écoles à Méaudre, l’une des trois participantes venues témoigner. « Nous avons juste fait notre devoir de citoyens », ajoute-t-elle modestement, se défendant de tout militantisme.
Avec un petit bémol cependant. « Lors de nos premières sessions de travail, la question de notre légitimité revenait souvent », relate une troisième participante désirant rester anonyme.
D’ailleurs, enchaîne Christine Aranega, médecin à Theys, « nous avons fait le travail et remis tout ça entre les mains du gouvernement. Maintenant, c’est à eux de jouer », souligne-t-elle.
La balle est certes dans le camp de l’exécutif mais les participants à la convention souhaitent assurer le service après-vente. Ce « pour garder la force et la cohérence d’une voix collective quant aux suites de la convention », justifient-ils. Ce que devrait pouvoir faciliter la toute récente création d’une association fort opportunément baptisée… Les 150.
« Et là, la salle entière s’est levée ! »
Reste, pour toutes, le souvenir « d’une grosse charge de travail et d’une belle dynamique », quelque peu estompée par le confinement. Le tout assorti d’un immense sentiment de fierté. « Nous avons quand même participé à la première convention citoyenne en France, ce n’est pas rien ! », rappelle Marie-Sylvie Dhénin. « Le dernier jour, un animateur nous a demandé qui, dans la salle, a discuté avec quelqu’un avec qui il n’aurait jamais pu penser à discuter. Et là, la salle entière s’est levée ! », se souvient, non sans émotion, cette participante anonyme.
Joël Kermabon
1 Par rapport aux chiffres de 1990