FOCUS – Ce jeudi 20 février, près d’une centaine de salariés en grève du CEA de Grenoble ont bloqué, une heure durant, l’une des entrées du site grenoblois. En cause ? Les salaires qui n’ont pas évolué depuis une décennie et le gel de la valeur du point qui sert de base à leurs calculs. L’intersyndicale dénonce également des salaires démarrant en-dessous du Smic et réclame la revalorisation des carrières des ouvriers et techniciens.
Ce jeudi 20 février entre 8 et 9 heures du matin, près d’une centaine de salariés du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) en grève ont bloqué l’une des entrées du site grenoblois.
Une mobilisation surprise et très matinale, à l’initiative d’une intersyndicale CFDT, CFE-CGC, Unsa, CFTC et CGT, « pour contrer la déflation en marche au CEA ».
La raison de cette opération coup de poing ? Les personnels réclament une hausse « légitime » de leurs salaires, alors même que la valeur du point permettant de les calculer reste obstinément gelée à 5,55 euros depuis 2009.
Une grille de salaires qui démarre en-dessous du Smic
« Les salaires ont décroché de 23 % par rapport à l’inflation, dont 12 % ces dix dernières années », indique l’intersyndicale. Qui dénonce également les augmentations individuelles « ridicules » des non-cadres et une grille de salaires démarrant en-dessous du Smic. « Pour maintenir le salaire de base des CAP, BEP et Bac au-dessus du salaire minimum légal, le CEA a mensualisé le 13e mois », précise-t-elle encore.
Une situation jugée insupportable et non sans conséquences sur l’attractivité du CEA. En effet, « avec une telle grille de salaires, certains techniciens ou ingénieurs préféreront se tourner vers d’autres entreprises », regrettent les syndicats.
Une augmentation pour tous et une indexation sur l’inflation
Que revendiquent les salariés du CEA ? En premier lieu, une augmentation de 60 points, pour tous « pour compenser 10 ans où nous n’avons rien eu », appuie Patrick Le Gallo de la CFE-CGC. Ensuite, pour s’aligner sur le coût de la vie, l’intersyndicale réclame une indexation de la valeur du point sur l’inflation. Et, concernant la grille des salaires, les personnels du CEA appellent de leurs vœux la revalorisation des carrières des Annexes 2 (ouvriers et techniciens).
« À la fin du mois dernier, nous avions exigé l’ouverture de négociations avec une direction qui n’en voulait pas », rappelle Christophe Ratin, secrétaire de la CGT CEA Grenoble. De ce fait, le 30 janvier dernier, les salariés n’avaient pas hésité à interrompre l’assemblée générale du CEA pour interpeller leur direction régionale et exposer leurs revendications.
« Aujourd’hui, des négociations s’ouvrent mais, pour l’heure, la direction ne nous propose que des miettes », déplore le syndicaliste. Soit une prime de 20 % pour quelques salariés et la reconduction de la prime Macron.
Le tout assorti, précise Christophe Ratin, de conditions qualifiées de « chantage inacceptable », toutes refusées en bloc par l’ensemble des salariés du CEA de Grenoble.
Pour le syndicaliste, le constat est clair. « Il y a un refus de nos ministères de tutelle de débloquer de l’argent pour revaloriser les salaires. Aujourd’hui, nous exigeons l’ouverture de vraies négociations sur nos revendications », déclare Christophe Ratin.
« Des salariés sont débauchés par d’autres entreprises »
« La balle est dans le camp du gouvernement puisque notre direction générale n’a pas le pouvoir de négocier », enchaîne Florence Gilliot, déléguée CFE-CGC. « Quels sont les objectifs que l’on fixe au CEA ? Réindustrialiser la France et assurer la sécurité. Pour cela, nous avons besoin de salariés travaillant dans de bonnes conditions, en effectifs et moyens suffisants avec des salaires corrects », explique-t-elle.
« Ces conditions salariales nuisent à la qualité de la recherche », argumente à son tour Laurent Ulmer, secrétaire de la CFTC au CEA.
« Nous avons des salariés qui sont débauchés par d’autres entreprises. Ces postes sont difficiles à pourvoir car nous ne sommes plus attractifs. Nous ne parvenons plus à recruter au même niveau scientifique qu’il y a quelques années », poursuit-il.
« C’est un coup dur pour la recherche française, qui baisse d’année en année. » De plus, ajoute Gilles Ratel, secrétaire de la CFDT, « le gouvernement cherche, au titre de la loi de programmation pluriannuelle de la recherche (LPPR) – dont le CEA est exclu – à augmenter les salaires au CNRS. C’est 118 millions d’euros qui vont être ainsi donnés ».
Pour le syndicaliste la pilule est dure à avaler. « Nous, nous demandons 60 points pour tout le monde, ce qui correspond à 135 millions pour le CEA. Tout ceci n’est pas normal ! »
Joël Kermabon