FOCUS – Alors qu’un jeu de chaises musicales légal permet à Alain Carignon de revenir au conseil municipal, Matthieu Chamussy revient sur les municipales de 2014, alors qu’il était tête de liste UMP à Grenoble. À l’époque, l’ex-maire avait, quant à lui, fini à la neuvième place. Plus de cinq ans après, le chef de l’opposition révèle enfin les coulisses d’une investiture émaillée de rebondissements. Coulisses qui avaient par ailleurs alors fait l’objet d’une enquête sur Place Gre’net.
À l’époque des municipales de 2014, Matthieu Chamussy ne s’était guère exprimé sur les atermoiements qui avaient présidé à son investiture et sur le choix de ses colistiers.
Parmi eux, Alain Carignon allait finalement figurer en neuvième position. Une place qui lui permet, grâce à un jeu de chaises musicales légal, de revenir siéger le 16 décembre prochain au conseil municipal.
Après plus de cinq ans de mutisme, l’élu d’opposition revient donc sur cet épisode compliqué, émaillé de nombreux rebondissements de ces élections, bien décidé « à dire les choses ».
Pourquoi parler maintenant ? Le récent ralliement à Alain Carignon de sa camarade de banc Nathalie Béranger n’y est assurément pas pour rien. Tout comme les déchirements dans le camp socialiste grenoblois qui a vu certains de ses membre rejoindre Éric Piolle, tandis que d’autres se rangeaient sous la bannière Nouvel air d’Olivier Noblecourt. Autant de soubresauts qui traduisent selon Matthieu Chamussy un « délitement de l’esprit public » ainsi qu’il l’a exposé dans une récente tribune publiée sur Place Gre’net.
« Je l’ai pris en numéro neuf »
« En 2013, après qu’Alain Carignon ait fait capoter la tentative d’organisation de primaires, sans me demander mon avis, la commission nationale d’investiture (CNI) de l’UMP* m’a investi en me désignant des colistiers », commence par expliquer Matthieu Chamussy. « Dont Alain Carignon en numéro trois, poursuit-il. Ce que j’ai refusé au point que l’investiture m’a été retirée ».
Pourquoi ce refus ? « Il me semblait que, compte tenu de sa situation particulière, il ne pouvait être élu que si une majorité de Grenoblois le souhaitaient […]. Et non pas grâce à la particularité du mode de scrutin* ». Ce qui aurait eu pour effet de renvoyer Alain Carignon à la 14e place, « mais ce n’est pas ce qui s’est produit », se souvient l’élu.
In fine, après des semaines de tergiversations et de discussions, « je l’ai pris en numéro neuf », résume Matthieu Chamussy. Ce qui mécaniquement permet à l’ex-maire de Grenoble de revenir aujourd’hui siéger au conseil municipal. D’où une situation quasi cornélienne. « Aujourd’hui, certains me reprochent un bras de fer et d’autres me disent “s’il est là, c’est parce que vous l’avez accepté dans votre liste” »
« Si je n’avais pas accepté cette 9e place, Alain Carignon serait au conseil municipal »
« En réalité, qu’est-ce que je n’ai pas dit à l’époque des élections de 2014, considérant que ça donnerait une image assez épouvantable de la politique ? », enchaîne Matthieu Chamussy. « Puisque nous en sommes à ce niveau de délitement de l’esprit public, disons les choses ! »
« Il se trouve qu’un soir j’ai reçu un coup de fil de Jérôme Lavrilleux du cabinet de Jean-François Copé*** que la France a connu plus tard à l’occasion de l’affaire Bygmalion », retrace le conseiller municipal. Ce pour l’avertir que la CNI allait investir Nathalie Béranger comme tête de liste, avec pour numéro deux Alain Carignon s’il n’accepte pas sa présence sur sa liste.
« La vérité, c’est que je n’ai pas été forcé d’accepter Alain Carignon sur ma liste. J’ai dit oui, certes, mais pas n’importe quel oui. Pas celui du numéro 3, pas plus que pour les places 5 ou 7 mais bien celui de la 9e position », précise Matthieu Chamussy.
« Si je n’avais pas accepté cette neuvième place, Alain Carignon serait au conseil municipal. »
Pourquoi ? « Parce qu’une liste investie UMP avec un Carignon en numéro deux, aurait fait 10 % aux élections de 2014 », assure Matthieu Chamussy. « Voilà ce que je mets sur la table aujourd’hui et qui, au regard des événements, prend un sens tout particulier », conclut-il.
Joël Kermabon
* Le parti de l’Union pour un mouvement populaire (UMP) ne deviendra Les Républicains qu’en 2015 sous Nicolas Sarkozy après qu’il en soit redevenu le président.
** Scrutin proportionnel avec prime majoritaire
*** Le patron de l’UMP à l’époque