REPORTAGE VIDÉO - Plusieurs centaines de personnes se sont rassemblées ce dimanche 27 octobre à Grenoble pour protester "contre l'islamophobie ». En cause, la prise à partie par un élu Rassemblement national d'une femme voilée lors du conseil régional de Bourgogne-Franche Comté. Et en écho, la tribune publiée par 101 musulman(e)s, affirmant que « voiler les femmes stigmatise leur présence dans l'espace public ».
Un collectif* d'associations et de citoyens de l'agglomération grenobloise avait appelé à un rassemblement contre l'islamophobie rue Félix-Poulat ce dimanche 24 octobre à 15 heures.
Plusieurs centaines de personnes ont répondu à l'appel pour dénoncer les « dérives politiques et médiatiques observées ces dernières semaines ».
Ce rassemblement s'inscrivait dans le contexte national d'une « dynamique de dénonciation de l’islamophobie grandissante ». En cause, « l’agression contre une femme voilée » par un élu du Rassemblement national (RN). Ce alors qu'elle assistait, en tant qu'accompagnatrice de sortie scolaire, à une séance du Conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté.
Transformer un principe de liberté en un principe d’intolérance
Pour les militants, les médias sont les principaux responsables d'une stigmatisation rampante. « Suite à cette agression, 85 débats et 286 interventions ont eu lieu sur les plateaux télévision sans qu’aucune femme voilée ne soit présente ! », déplore le collectif. Qui nourrissait l'espoir que ce rassemblement dans l’espace public « viendrait contrer ce triste déséquilibre ».
« Trop d'entre nous se sont déjà fait sortir de l'eau sur la plage, dans des piscines municipales ou des villages de vacances. Quand elles subissent cette humiliation, c'est nous toutes qui sommes humiliées », a déclaré l'une des participantes au rassemblement, résumant l'état d'esprit général.
Dans leurs rangs, des femmes en majorité, dont beaucoup sont voilées. Mais aussi un fort contingent d'hommes venus là pour soutenir leur cause. Tous fustigent les propositions de responsables politiques nationaux relatives à l'élaboration éventuelle de lois d’exclusion. Des textes « pour interdire les femmes musulmanes voilées dans l’espace public ».
À ce titre, « le Défenseur des droits et l’Observatoire de la laïcité sont formels : ces positions détournent la laïcité pour transformer un principe de liberté en un principe d’intolérance », objectent les participantes. Autant d'instrumentalisations de la laïcité « à des fins électoralistes et sécuritaires mettant à mal le pacte républicain », estiment les femmes voilées.
Dénoncer "l'islamophobie" et "des postures dangereuses"
Ces femmes regrettent amèrement que les responsables politiques soient si peu nombreux « à dénoncer ces postures dangereuses ». C'est pourquoi, lance une représentante de Pas sans nous à la tribune, « il faut réagir et poursuivre le combat ». Et ce « avant qu'il ne soit trop tard, pour la paix et la justice sociale ».
« Voiler les femmes, c'est stigmatiser leur présence dans l'espace public »
L'attitude « provocatrice » du conseiller régional RN a provoqué moult polémiques et crispations dans la classe politique et la société civile. Le constat est sans appel, « l'affaire du voile » n'en finit pas de diviser.
Ces femmes voilées affirment qu'il relève d'une décision « personnelle et intime, qu'il soit porté par pudeur ou conviction religieuse ». Mais tel n'est pas l'avis des signataires de la tribune publiée dans l'hebdomadaire Marianne par 101 mulsuman(e).
« Le port du voile est le signe ostentatoire d'une compréhension rétrograde, obscurantiste et sexiste du Coran. Voiler les femmes, c'est stigmatiser leur présence dans l'espace public », clament ses signataires.
Une prise de position qui fait écho à la tribune des 90 parue dans Le Monde, demandant à Emmanuel Macron de « condamner l’agression d’une accompagnatrice scolaire voilée »
Toujours est-il que "l’Alliance citoyenne des femmes voilées et libres" entend bien continuer à protester contre ces « discriminations ». Et continue de faire pression en réclamant un rendez-vous avec Éric Piolle, le maire de Grenoble, concernant l'affaire des piscines.
Joël Kermabon
* Les premiers signataires de l'appel : Pas sans nous, Nous citoyennes, Coordination contre le racisme et l’islamophobie (CRI), Alliance citoyenne, Village 2 santé, NPA 38