EN BREF – Mathis Druelle a remporté, ce mardi 21 mai, la finale d’Eloquentia Grenoble, concours d’éloquence qui a pour but de promouvoir l’art de la parole dans sa diversité. Il a conquis le jury par sa présence sur scène et sa force d’écriture, dans une salle René Rizzardo quasiment pleine. Une victoire sur le fil !
La finale de cette troisième édition d’Eloquentia Grenoble ne s’est jouée à rien. Des 52 candidats initialement en lice pour le concours d’éloquence, il ne devait en rester qu’un.
Pourtant, lors des délibérations, les membres du jury n’arrivaient pas à trancher. C’est en tout cas ce qu’a confié Véronique Pédréro, en coulisses, à l’issue du verdict.
L’artiste aux multiples casquettes (conteuse, sculptrice de céramique…) l’affirme, sans en rajouter : « Nous ne voulions pas les départager. Pendant les délibérations, nous avions même pensé à les faire gagner tous les deux. »
« Faut-il vaincre pour gagner ? »
Deux gagnants mais pas de vainqueur. C’est également l’option que défendait Mathis Druelle dans son discours sur le sujet « Faut-il vaincre pour gagner ? » Ironie du sort, c’est bien lui qui a remporté le concours Eloquentia, à seulement 19 ans.
À la clef, un titre, celui du meilleur orateur de la compétition, mais aussi une demi-finale internationale qui se jouera pour Mathis à Marseille, en octobre.
« Malheureusement, il n’y a qu’une place pour la prochaine étape. Nous voulions qu’ils y participent à deux. » Véronique Pédréro insiste. S’il n’y avait pas eu cet enjeu, Soheyl Sari Alsani aurait été récompensé lui aussi.
Sans aucun tremblement dans la voix
Le jeune homme déclare s’être inscrit après avoir vu le film À voix Haute (2016, Stéphane de Freitas, Ladj Ly). « J’ai trouvé ma plume très tôt, confie Soheyl Sari Alsani. J’ai toujours baigné dans un milieu artistique riche. Ma mère a fait du théâtre pendant très longtemps. » Entre deux alexandrins, il se met à ciseler son élocution. Jusqu’à déclamer. Soheyl est aussi rappeur.
Les deux finalistes sont rivaux sur scène mais complices en coulisses. Preuve de leur habileté à jouer avec les mots et de leur amitié naissante, ils en viennent même à reprendre et imiter les discours de l’autre.
Le tout sans aucun tremblement dans la voix, devant la salle René Rizzardo de la MC2 Grenoble qui accueillait ce soir-là environ 400 personnes.
« Beaucoup de réécriture et beaucoup de nuits blanches »
C’est peut-être avec un texte un peu plus fort que Mathis l’emporte. L’étudiant de Sciences Po Grenoble, après quelques jeux de mots bien sentis, parfois osés, capture le public. Il s’adresse à sa sœur dans la salle et confie sa peur d’affronter les autres difficile à surmonter. L’émotion est palpable dans la salle.
Lui, jusqu’à ce jour, n’était toujours pas satisfait de son texte. Il a pourtant surpris le jury par la maturité de son écriture et son efficacité. « J’ai eu du mal à rajouter du fun dans mon discours. Il y a eu beaucoup de réécriture et beaucoup de nuits blanches. »
S’il est aussi critique à propos de sa prestation, c’est qu’il affirme avoir beaucoup travaillé sur lui et mûri en participant à cet exercice. Il n’exclut d’ailleurs pas de faire de l’art oratoire et théâtral son métier.
« Une très belle finale »
Pour ce qui est de la petite finale, c’est Lauren Viguier qui l’a emportée sur Jean-Corentin Poisson. Pourtant plusieurs, fois sur scène, elle a avoué chercher son texte. Le jury ne lui en a pas tenu rigueur. Mais peut-être s’agissait-il d’une mise en scène.
Ce qui différenciait la « suffragette des temps modernes » du « charmeur », selon le jury ? La première incarnait son personnage, l’un et l’autre étant indissociable.
Auxane Menezo, cofondatrice de la déclinaison iséroise de ce concours international, se félicite en tout cas de cette « très belle finale […] pour la première fois à la MC2. D’ordinaire, nous étions plutôt sur des lieux étudiants comme Eve sur le campus. »
Si Auxane ne se chargera pas de la prochaine édition pour poursuivre des objectifs professionnels, le public, lui, sera sûrement au rendez-vous l’année prochaine. Devant des candidats qui redoubleront d’effort. Croyez-les sur parole.
Antoine Beau