REPORTAGE – Ce vendredi 29 mars a été marqué par la deuxième grève des lycéens grenoblois mobilisés face à l’urgence climatique. Ils étaient près de 200 à défiler dans les rues de la ville tout l’après-midi. Bien loin des 3 000 manifestants décomptés lors de la première grève lycéenne du vendredi 15 mars, mais toujours aussi motivés. Au sein du mouvement, les divisions s’accentuent cependant quant aux revendications et méthodes d’actions.
À Grenoble, des centaines de lycéens se reconnaissent dans le mouvement de contestation international Fridays for future (FFF), lancé par la jeune activiste suédoise Greta Thunberg. Cette dernière invite les jeunes à sécher les cours chaque vendredi pour manifester en faveur du climat. La première marche grenobloise pour le climat, vendredi 15 mars, avait réuni près de 3 000 personnes dans la rue. Cette fois, ils étaient un peu moins de 200.
« Je m’attendais à un peu plus de monde », reconnaît Mathieu Kuntz, élève en terminale au lycée Argouges et membre actif de FFF. « La jeunesse ne se mobilise pas assez », regrette de son côté Lola Terrier, qui tient une banderole sur laquelle on peut lire « Ils coupent les arbres, on coupera les têtes ».
Parmi les manifestants ce vendredi, se trouvent surtout des lycéens comme Mathieu ou Lola, mais aussi quelques étudiants venus « pour faire du nombre et soutenir le mouvement », déclare l’un d’eux, en troisième année de licence d’Histoire. Peu nombreux, les manifestants font en tout cas preuve de motivation. Les slogans fuseront tout au long des deux heures de déambulation en ville.
Un mouvement déjà en proie aux divisions internes
À peine la tête de cortège entonne son slogan « On est plus chauds que le climat ! » que, derrière, des manifestants répondent « On est plus chauds que le Fouquet’s ! », en référence au restaurant parisien de luxe détruit lors de l’acte XVIII des Gilets jaunes. Une reprise qui pourrait s’apparenter à une plaisanterie mais qui s’avère révélatrice de scissions entre manifestants.
Depuis le 15 mars, ils sont tous là pour crier leur inquiétude face au dérèglement climatique, mais divergent sur la façon de s’y prendre. Quand certains exigent des réformes gouvernementales, d’autres remettent en cause le système économique et politique dans son ensemble.
Guillaume François, responsable fédéral de l’UNL Isère, ne cache pas sa déception : « On voulait jouer la carte de l’unité mais le collectif Fridays for future ne joue pas le jeu. Vendredi dernier, les syndicats ont organisé une action de blocage du McDonald’s et FFF n’est pas venu. L’UNL, l’Unef, on est quand même là aujourd’hui mais je suis déçu de voir que, même entre jeunes, on se bouffe le nez… »
« On se veut apartisans », déclare de son côté Mathieu, l’un des élèves moteurs du groupe Fridays for future à Grenoble. « On n’est pas contre les syndicats. Ils peuvent nous rejoindre, mais on ne partage pas toutes leurs revendications. Ils ne sont, par exemple, par forcément en faveur de la non-violence. » Derrière lui, un slogan le confirme : « Crame un ministère, ça sauvera les ours polaires ! »
« Les marches ne vont pas changer le monde »
Le deuxième point de désaccord entre Fridays for future qui organise les marches et les syndicats grenoblois, c’est la place accordée aux revendications sociales dans le mouvement. « FFF refuse la dimension sociale, regrette Guillaume François. Pourtant, l’écologie et le social c’est bien un seul combat, celui contre le système capitaliste. »
Élargir les revendications ne semble cependant pas au programme du collectif FFF, comme l’explique Mathieu Kuntz : « Si l’on veut être efficace, il faut garder une unité dans le message de base. On manifeste pour l’écologie. »
Malgré les divisions d’ordre idéologiques, les jeunes étaient bien tous ensemble dans la rue, ce vendredi. Ils se rejoignent d’ailleurs unanimement sur un point : « Les marches ne vont pas changer le monde. » Alors après l’arrivée du cortège au parc Paul Mistral vers 16 heures, certains se sont réunis pour discuter des suites à donner au mouvement : blocages, actions coups de poing, pédagogie… De nombreux moyens d’actions évoqués lors de cette assemblée générale improvisée et dont les jeunes ont bien l’intention de se saisir.
Jules Peyron