FOCUS – L’union de quartier Championnet-Bonne-Condorcet-Hoche (CBCH) de Grenoble tenait sa réunion publique le mercredi 6 février, en présence de plusieurs élus de la Ville. Trois heures d’échange sur de nombreux sujets, au cours desquelles les habitants ont pu s’exprimer et poser leurs questions dans une ambiance relativement sereine, malgré les désaccords.
« On va voir si Lucille Lheureux reste jusqu’au bout », ironise un participant à la réunion publique organisée par l’union de quartier Championnet-Bonne-Condorcet-Hoche (CBCH) de Grenoble, le mercredi 6 février à la Maison des associations. Une pique en référence à une autre réunion publique, celle de l’union des habitants du centre-ville, au cours de laquelle l’adjointe aux Espaces publics de la Ville de Grenoble avait claqué la porte en avril 2018.
Pas de “clash” cependant lors de la réunion du quartier CBCH. Réunion à laquelle Lucille Lheureux n’était par ailleurs pas présente. Durant trois heures, les élus ont écouté les habitants leur ont répondu, dans un climat relativement serein, malgré certains points de désaccord. Il est vrai que la personnalité du président de l’union de quartier Michel Voilin, aussi affable que flegmatique, incitait plus au dialogue constructif qu’à la polémique de principe.
L’après fermeture du bureau de poste
Le quartier Championnet ne manque pourtant pas de sujets de préoccupation. Malgré une lutte de plusieurs mois, son bureau de poste a finalement fermé et aucun point-relais n’est encore disponible. Résultat ? Les usagers doivent se tourner vers le bureau de Chavant, ou même de Foch ou de Berriat selon les cas. Pas de quoi simplifier la vie des riverains et, plus particulièrement, des personnes âgées ou à mobilité réduite.
« Il y a eu un petit raté. La Poste n’a pas trouvé de commerçants vraiment volontaires », explique Michel Voilin. Il est vrai que la ferveur des opposants à la fermeture avait quelque peu refroidi les candidats lorsque La Poste prospectait pour trouver un commerçant partenaire. Le pari de l’entreprise ? Une fois la fermeture effective, la nécessité d’un point-relais s’imposerait d’elle-même.
De quoi agacer une habitante du quartier : « On s’essuie les pieds avec le service public. Soit on est des consommateurs, soit on est des citoyens ! » Un mécontentement que n’aura pas pu observer la directrice du réseau Anne-Marie Vassallo, pourtant invitée à la réunion… Quant à Michel Voilin, il déplore fortement la fermeture mais ne peut qu’être philosophe. « Faute de pouvoir le rouvrir, on cherche des solutions alternatives. Un moindre mal pour le quartier », conclut-il.
Des commerçants qui peinent
La situation des commerçants est un autre (gros) sujet de préoccupation. « Tout le monde est content du quartier… mais on n’y arrive plus », déplore Bernadette Henuset, commerçante et membre de l’union de quartier. Et de décrire certains commerçants qui peinent à maintenir leur chiffre d’affaires, quand d’autres observent des baisses de 10 à 50 %. Les raisons ? Sans doute les zones commerciales et les difficultés d’accès à la ville, juge-t-elle.
Une analyse que ne partage pas entièrement Pascal Clouaire. L’adjoint à la Démocratie locale l’affirme : des « relevés précis de fréquentation » effectués avec l’opérateur Orange démontrent que la ville n’est pas moins fréquentée qu’avant. « Ce qui ne veut pas dire que le comportement d’achat n’a pas changé », modère-t-il. Car les chiffres de la CCI révèlent bien des baisses de vente des produits culturels et vêtements. Tandis que les bars et restaurants se portent bien.
Pour ce qui est des centres commerciaux, Pascal Clouaire rappelle l’opposition des élus grenoblois au projet Neyrpic de Saint-Martin-d’Hères. Mais défend celui de l’extension de Grand” Place. Contradictoire ? « Le projet de Grand” Place, c’est 4 000 mètres carrés d’expansion par rapport à la surface d’aujourd’hui, et c’est lié à un projet urbain de centralité sud. Ça n’a rien à voir avec les 50 000 mètres carrés de Neyrpic ! », lance-t-il. Quitte à susciter quelques ricanements.
La « transformation de la ville »
Quid des loyers trop chers, qui favorisent l’implantation de grandes chaînes au détriment de commerces indépendants ? Pascal Clouaire prévient : « Les moyens d’action de la Ville sont très relatifs. Et celui-ci d’annoncer un plan de la Métro comprenant l’acquisition via une société patrimoniale de locaux sur des secteurs précis. Ceci afin de gérer la « destination commerciale ». D’ici quelle échéance ? « C’est un plan entre maintenant et dix ans », précise encore l’élu.
Pascal Clouaire note encore deux raisons pouvant expliquer la baisse de chiffres d’affaires de certains commerçants : la crise et « les fins de mois difficiles », d’une part. Et les nombreux travaux en ville, d’autre part. « La ville se transforme comme elle n’a jamais été transformée », vante ainsi l’élu. Avant de décrire un véritable pari sur l’avenir, avec de futurs « espaces de convivialité où il fait bon flâner et donc acheter ».
« L’ultra centre-ville n’est pas fait pour les voitures »
Flâner… mais pas rouler ? La question des voitures en ville est revenue tout au long de la soirée, suscitant des réactions plus ou moins hostiles des habitants. La municipalité revendique pleinement sa position : « On est dans l’ultra centre-ville d’une métropole de 500 000 habitants : ce n’est pas fait pour les voitures ! Il y a d’autres mobilités, d’autres façons d’avoir accès à la ville », estime ainsi Pascal Clouaire.
Et tandis que les habitants s’inquiètent du nombre de places de parking dans les nouvelles constructions annoncées, l’adjoint à l’Urbanisme Vincent Fristot assume également. « Dans le PLUI [Plan locale d’urbanisme intercommunal, ndlr], les normes vont évoluer et être encore réduites. L’idée c’est qu’on ait moins d’obligations à construire des places de parking et d’assurer une mobilité avec différents moyens de transports : la marche à pied, le vélo, les transports en commun… »
Qu’en est-il des embouteillages observés depuis la mise en place de Cœurs de ville, cœurs de métropole (CVCM) ? L’élu de secteur Antoine Back dit observer une stabilisation. « L’apocalypse qu’on nous avait promise n’a pas eu lieu ! », s’amuse-t-il. Si quelques « points durs » subsistent, l’élu joue la carte de la patience… et de l’anthropologie. « Ce qui est long chez nous, les humains, c’est la culture. Une fois qu’on a pris des habitudes, on met du temps à en changer. »
Une « clarification » à venir pour la place Championnet
Le changement, c’est aussi ce que certains habitants réclament, notamment place Championnet. Une riveraine en plaisante même : « Qu’est-ce qu’on a fait à la mairie pour avoir une place Championnet répugnante ? Vous nous en voulez ? », lance-t-elle à l’intention du maire de Grenoble Éric Piolle.
De quoi raviver le sens de l’humour d’Antoine Back, qui promet une place plus attractive, après quelques travaux pour « faire durer cette malédiction quelque temps de plus ». Ceux-ci doivent commencer le 1er juin pour se conclure à la mi-novembre.
Pas de gros travaux toutefois, mais une clarification de la vue, une évacuation des bosquets « disgracieux », le déplacement des arceaux à vélos et un passage plus large pour les piétons. Sans oublier la pose d’un banc inédit, en forme de ruban rouge, dont le président de l’union de quartier confie qu’il est déjà source d’inquiétudes.
Des craintes restent en outre bien réelles concernant l’avenir du bâtiment bientôt vide de la CCI, mais Michel Voilin conclut le chapitre des aménagements sur la question du square Silvestri. Un an auparavant, le numéro 2 de l’union de quartier Frédéric Champavier disait redouter une « privatisation » de l’espace. Bilan ? « Notre union de quartier a toujours regretté de ne pas avoir été associée, mais nous reconnaissons que c’est un succès », concède Michel Voilin. Preuve qu’il est encore possible de se faire confiance ?