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Parents et enfants à l'entrée d'une école de la commune d'Eybens. DR

Lettre ouverte : « Comment faire de nos jours quand on est parent d’un enfant handicapé ? »

Lettre ouverte : « Comment faire de nos jours quand on est parent d’un enfant handicapé ? »

TRIBUNE LIBRE – Sarah Loraux-Chiffard, mère d’un enfant autiste Asperger, dénonce un manque d’as­sis­tance et d’ac­com­pa­gne­ment des parents d’en­fants han­di­ca­pés et une inef­fi­ca­cité des ser­vices pro­po­sés. Ce qui met en grande dif­fi­culté les familles.

La prise en charge d'un enfant handicapé en France. Photo © Marina B Photographie

Prise en charge de l’au­tisme en France. Photo d’illus­tra­tion. © Marina B Photographie

Être parent d’un enfant han­di­capé de nos jours en France… Voici le cas d’un petit gar­çon de 7 ans, autiste Asperger avec troubles de défi­cit de l’attention avec ou sans hyper­ac­ti­vité (TDAH).

Après une longue attente, il a inté­gré une classe Ulis en sep­tembre 2018. Une classe à effec­tif res­treint au sein d’une école clas­sique avec un ensei­gnant et une assis­tante de vie sco­laire (AVS) pour toute la classe, for­més au handicap.

Malheureusement, il s’avère que cet enfant ne peut plus sup­por­ter les jour­nées entières. Il souffre. Il fau­drait le sco­la­ri­ser uni­que­ment le matin… De l’avis de tous, pro­fes­sion­nels et parents, les jour­nées sont trop longues pour lui, les temps de récréa­tion et de can­tine non adaptés.

Pour le bien-être de l’en­fant… arrê­ter de travailler ?

Pour le bien-être de l’enfant, dans l’ur­gence d’une telle situa­tion, voilà les choix qui s’offrent aux parents :

Première solu­tion : faire une demande d’al­lo­ca­tion d’éducation de l’enfant han­di­capé et de pres­ta­tion de com­pen­sa­tion du han­di­cap, ainsi qu’une demande de ser­vice d’éducation spé­ciale et de soins à domi­cile (Sessad) : temps de trai­te­ment de toutes ces demandes envi­ron neuf mois.

Ceci néces­site de refaire un dos­sier à la Maison dépar­te­men­tale des per­sonnes han­di­ca­pées, déjà exis­tant, de revoir le psy­chiatre pour un énième cer­ti­fi­cat médi­cal (pour un coût de 140 euros, rem­boursé par la Sécurité sociale à 1,50 euros), de deman­der des devis pour les autres ren­dez-vous : psy­cho­logue com­por­te­men­ta­liste une fois par semaine (60 euros), groupe d’ha­bi­li­tés sociales une fois par semaine (même tarif). Délai d’attribution d’un Sessad au moins dix-huit mois, alors que ce serait la solu­tion la plus adaptée.

Rassemblement en soutien aux AESH devant le rectorat de Grenoble. © Joël Kermabon - Place Gre'net

Rassemblement en sou­tien aux accom­pa­gnants des élèves en situa­tion de han­di­cap (AESH) devant le rec­to­rat de Grenoble. Octobre 2018. © Joël Kermabon – Place Gre’net

Deuxième solu­tion : se mettre à mi-temps. Faire une demande de congé proche aidant à l’employeur (congé sans solde !) et une demande d’al­lo­ca­tion de pré­sence paren­tale auprès de la Sécurité sociale. Autant de demandes qui ne couvrent pas la perte d’un demi-salaire.

Pour cette der­nière, il faut un cer­ti­fi­cat médi­cal attes­tant de la gra­vité du han­di­cap de l’enfant, pour l’al­lo­ca­tion de pré­sence paren­tale, un cer­ti­fi­cat du méde­cin trai­tant. Temps de trai­te­ment de toutes ces demandes : des mois.

Troisième solu­tion : enga­ger une nou­nou spé­cia­li­sée han­di­cap (pour béné­fi­cier de la prise en charge de la Caf) ou un édu­ca­teur spé­cia­lisé. Temps de garde : six heures par jour + les tra­jets à l’école quatre jours par semaine. Coût total exor­bi­tant, les prises en charge ce cou­vrant pas la moi­tié des frais.

L'institut médico-éducatif Les Nivéoles à Voiron. Violences sexuelles, enquête, autistes, enfants.

Institut médico-édu­ca­tif Les Nivéoles à Voiron. © Patricia Cerinsek – Place Gre’net

Quatrième option : deman­der une place en ins­ti­tut médico-édu­ca­tif (IME). Mêmes dos­siers, mêmes délais d’at­tente : mini­mum trois ans.

Cinquième option : chan­ger l’en­fant d’é­cole pour qu’il soit près de chez sa mamie. Impossible, pas de classe Ulis en centre-ville à Grenoble et si chan­ge­ment d’é­cole, perte de la place en classe Ulis. Il faut refaire un dos­sier, avec un délai d’at­tente mini­mum d’un an.

Dernière solu­tion : arrê­ter de travailler…

Mais alors que faire ?

Que pro­pose-t-on dans l’ur­gence d’une telle situa­tion ? Comment font les parents qui n’ont pas les moyens d’ar­rê­ter de tra­vailler pour s’oc­cu­per de leur enfant ? Aucune solu­tion n’est pro­po­sée à moins de dix-huit mois de délai.

De plus, le reste à charge de la famille est très élevé, par­ti­cu­liè­re­ment pour les reve­nus moyens. Prendre soin d’un enfant han­di­capé de nos jours néces­site d’a­voir un compte en banque bien rem­pli, sauf à regar­der ton enfant souf­frir en silence !

Concernant les classes Ulis…

À la Ville de Grenoble : mettre en place des classes Ulis c’est bien, mais cela néces­site éga­le­ment de mettre en place le fonc­tion­ne­ment cor­res­pon­dant : qui dit autisme, dit pro­blèmes d’in­te­rac­tion sociale, sen­so­riels (ouïe ampli­fiée notam­ment), d’alimentation… impli­quant de déca­ler les temps de récréa­tion et de can­tine dans ces classes Ulis. Ils ont besoin de calme ! Cela implique un per­son­nel dûment formé.

Enfin, peu de centres de loi­sirs pour enfants han­di­ca­pés. Un seul à Grenoble, évi­dem­ment déjà saturé. La plu­part des MJC ne prennent pas les enfants avec han­di­cap, faute de moyens finan­ciers et humains. Comment gérer les vacances sco­laires quand on doit travailler ?

Sarah Loraux-Chiffard

Rappel : Les tri­bunes publiées sur Place Gre’net ont pour voca­tion de nour­rir le débat et de contri­buer à un échange construc­tif entre citoyens d’opinions diverses. Les pro­pos tenus dans ce cadre ne reflètent en aucune mesure les opi­nions des jour­na­listes ou de la rédac­tion et n’engagent que leur auteur.

Vous sou­hai­tez nous sou­mettre une tri­bune ? Merci de prendre au préa­lable connais­sance de la charte les régis­sant.

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