REPORTAGE VIDÉO - Près de 250 gilets jaunes ont défilé pacifiquement dans les rues de Grenoble, ce samedi 2 février, à l'occasion de l'acte XII du mouvement. Une faible participation due à l'organisation d'un grand rassemblement régional à Valence, où beaucoup se sont rendus. Un hommage aux victimes de tirs de balles de défense et le soutien à France Bleu Isère ont marqué ce douzième samedi de mobilisation.
« S'ils augmentent les pensions et les salaires, on pourrait commencer à penser à rester chez nous au lieu de manifester. » C'est du moins ce qu'affirme l'un des gilets jaunes rassemblés une nouvelle fois, ce samedi 2 février, au pied de la tour Perret, parc Paul Mistral. Pour autant, ils ne sont guère nombreux à ce rendez-vous devenu hebdomadaire.
Et pour cause : la majorité d'entre eux sont à Valence où se déroule un grand rassemblement régional. Qu'à cela ne tienne, les gilets jaunes ont tout de même décidé de manifester leur présence en défilant dans les rues de Grenoble pour cet acte XII de leur mouvement.
Une manifestation sous le signe de la solidarité
Cette manifestation pacifique a ainsi rassemblé près de 250 gilets jaunes au plus fort d'un après-midi placé sous le signe de la solidarité. Solidarité avec les victimes de tirs de balles de défense par les forces de l'ordre – dont ils réclament par ailleurs l'interdiction. Mais aussi avec la radio France Bleu Isère, tout récemment victime d'un incendie d'origine criminelle.
Le cortège, modeste, a occasionné peu de perturbations sur le réseau de transports en commun et seulement quelques blocages ponctuels de la circulation.
« C'est vraiment un ras le bol généralisé du système »
Pourquoi manifester encore et toujours après douze semaines de mobilisation ? De fait, le gouvernement n'a pas eu l'heur de voir une majorité de gilets jaunes se satisfaire de son initiative de grand débat national. « Cette idée aurait du se mettre en place au tout début du mouvement, déclare un manifestant. Les annonces sont venues trop tard. Le mouvement de révolte avait pris trop d'élan. »
Et d'ajouter : « De toute façon, notre envie est insatiable. C'est vraiment un ras-le-bol généralisé du système ! » Sa solution ? « Une refonte totale des institutions. Il faut que le gouvernement lâche prise. »
Ce discours ne fait pas exception dans les rangs des gilets jaunes. Tous le répètent à l'envi, « c'est notre pouvoir d'achat qui est en cause. Le grand débat national ne règlera rien ! » Leur motivation semble intacte. Voire même renforcée par la polémique autour de « la répression policière » et les nombreux blessés par les tirs de balles de défense.
Dans le même temps, le mouvement se structure de plus en plus. Et les défilés, bien qu'empruntant encore des parcours hasardeux, sont de mieux en mieux organisés. Des personnes dédiées à la sécurité protègent ainsi désormais les carrefours et préviennent les débordements.
Restent toutefois les conflits internes au mouvement, propres à tout soulèvement populaire. Et si certains ont eu quelque velléités de dissidences, celles-ci ne semblent pas pour l'heure s'être suffisamment structurées pour s'affirmer au grand jour.
« Quand le peuple vient à vous, tout ce qu'il reçoit c'est des grenades lacrymogènes »
Concernant le grand débat national, les gilets jaunes se sont invités à la première soirée organisée par les parlementaires LREM de l'Isère. Notamment celle du vendredi 1er février qui se tenait à l'Ancien musée de peinture de la place de Verdun. Là, ils ont interpellé Émilie Chalas, la députée de la 3e circonscription qui, pour la circonstance, a essuyé les plâtres. « C'est bien que vous fassiez un débat ce soir ici […]. Mais quand le peuple vient à vous, tout ce qu'il reçoit c'est des grenades lacrymogènes », a lancé Cédric Trivella, l'un des leaders grenoblois.
En filigrane, les gilets jaunes soulignent l'impossibilité de rencontrer la députée à sa permanence lors des différents rassemblements. En cause ? Les cordons de police protégeant les locaux parlementaires et qui en ont défendu l'accès à plusieurs reprises à l'aide de lacrymogènes. « Vous dites, là, ce soir que vous êtes à l'écoute des citoyens mais vous ne venez jamais communiquer avec nous ! », a déploré Cédric Trivella.
On le voit, l'effet tampon espéré par le gouvernement est encore loin de se produire. Et laisse sans aucun doute augurer, pour samedi prochain, l'acte XIII de ce mouvement citoyen.
Joël Kermabon