FOCUS – Alors que le projet de loi « anti-casseurs » inspiré de la droite sénatoriale doit être voté le 5 février, en Isère, un collectif d’associations et de partis politiques de gauche s’élève contre la montée des répressions en tous genres. Et réclame notamment la création d’un observatoire des violences policières.

En Isère, un collectif réclame la création d’un observatoire des violences policières. © Joël Kermabon – Place Gre’net
En Isère, un collectif d’associations et de partis politiques de gauche réclame la mise en place, dans le département, d’un observatoire des violences policières et de solidarité avec les victimes*. Alors que les députés examinaient, ce mardi 29 janvier, le projet de loi « anti-casseurs », le collectif est monté au créneau, dénonçant dans une déclaration commune les répressions et violences en tous genres.
La violence “visible” mais aussi la violence sociale envers les plus démunis. « Il y a une véritable demande d’égalité sociale, a souligné Stéphane Garac de La France insoumise. Or, la seule réponse de l’État, c’est une répression policière et judiciaire et un grand débat ! La réponse est totalement dérisoire. »
Dans leur texte, la Ligue des droits de l’Homme, la CGT, le Centre d’information inter-peuples, le collectif de soutien aux réfugiés politiques algériens, le réseau de lutte contre le fascisme, Solidaires, Sortir du nucléaire, Europe Écologie – Les Verts, La France insoumise, le NPA 38, le parti communiste, le parti de gauche mais aussi l’Unef et l’UNL pointent les « manifestations empêchées », « les dispositifs policiers démesurés » ainsi que « les humiliations » comme la multiplication des perquisitions et des gardes à vue. Tous revendiquent la liberté de manifester alors qu’en parallèle les textes de loi portant atteinte à la liberté d’expression et aux libertés collectives se multiplient.
Un projet de loi « anti-manifestants » et non « anti-casseurs » pour le collectif
« Ce sont des textes initiés pour des motifs de circonstance, que ce soit le terrorisme ou l’immigration, souligne Denis Fabre, le président de la Ligue des droits de l’Homme.
« Mais, au bout du compte, ces textes sont extraordinairement banalisés et visent tout un chacun. »
Dernier en date ? Le projet de loi « anti-casseurs » porté par le Premier ministre Édouard Philippe et inspiré de la droite sénatoriale par la voix de Bruno Retailleau. Un projet de loi « anti-manifestants » pour le collectif isérois.
Mercredi 31 janvier, au terme de deux jours d’examen du texte et de ses multiples amendements, l’Assemblée nationale a donné son feu vert à une disposition particulièrement controversée du projet de loi. Si elle est validée telle quelle lors du vote le 5 février, cette mesure permettra aux préfets de prononcer des interdictions de manifester. De quoi ouvrir la voie – aux côtés des interdictions judiciaires jusque-là seules permises – aux interdictions administratives préalables. Ce sur la base « d’actes violents » commis précédemment.
« Une atteinte grave à la séparation des pouvoirs »
La mesure inquiète le collectif. « Normalement, c’est la justice qui peut condamner à une interdiction d’aller à une manifestation, souligne Joëlle Vernet du syndicat des avocats de France. Cela fait partie des peines alternatives possibles. Là, en empêchant avant la manifestation, c’est une atteinte grave à la séparation des pouvoirs ! On est en train de tout mélanger pour empêcher la liberté de manifester ! Depuis 2015, toutes les lois successives ne sont que des lois de répression. L’arsenal est déjà énorme. »
Le collectif n’entend pas seulement dénoncer ce projet de loi. Il réclame également l’abandon des poursuites et l’amnistie des manifestants et des militants condamnés, la fin de l’impunité des violences policières et la recherche des responsabilités dans la chaîne de commandement. Il demande aussi l’interdiction des flash-balls, des lanceurs de balles de défense (LBD) et des grenades de désencerclement. Des dispositifs que peu de pays en Europe autorisent encore.
Le 7 mars, le groupe Communiste, républicain, citoyen et écologiste déposera d’ailleurs au palais du Luxembourg une proposition de loi visant à interdire l’usage des LBD dans le cadre d’opérations de maintien de l’ordre. Les sénateurs réclament également que soit accessible au public le fichier de suivi de l’usage des armes (TSUA) créé en 2012 ainsi qu’un rapport détaillé sur les stratégies de désescalade.
Patricia Cerinsek
* Une réunion publique devrait être organisée en mars prochain où la parole sera donnée à des victimes des mouvements sociaux.