FOCUS – Le mouvement féministe Nous toutes organise le 24 novembre dans toute la France une « déferlante féministe ». Avec un objectif : rassembler des milliers de personnes « pour en finir avec les violences sexistes et sexuelles ». Dans cette perspective, des dizaines de comités locaux se constituent dans tout l’Hexagone et notamment à Grenoble où s’est déroulée, ce 24 octobre, une première réunion.
Ce 24 octobre sur le coup de 18 h 30, le restaurant Ici Grenoble situé rue du Vieux Temple s’anime. Près de soixante-dix personnes ont en effet fait le déplacement, à l’invitation du comité local du mouvement féministe Nous toutes, lancé au cours de l’été. Des femmes en très grande majorité, seuls cinq ou six hommes ayant répondu présent.
Objectif de cette première réunion publique d’information et de sensibilisation sur les violences faites aux femmes : les inviter à s’engager pour soutenir le mouvement ou encore à agir en son sein.
Autre enjeu : préparer la marche de grande ampleur prévue samedi 24 novembre à Grenoble comme dans beaucoup d’autres villes en France. Une « déferlante féministe pour en finir avec toutes les violences sexistes et sexuelles », espère le mouvement, qui se déroulera la veille de la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes.
Un mouvement dans lequel toute personne peut s’impliquer
Assises derrière une table faisant face à l’assistance, cinq jeunes femmes : le noyau dur du groupe grenoblois. Claire, Coline, Margot, Pauline et Chloé vont tour à tour prendre la parole pour se présenter. Toutes ont suivi des parcours très différents avant de se rencontrer dans le cadre de la Plateforme des droits des femmes de Grenoble.
« J’ai voulu participer à ce comité local parce que j’ai 23 ans. J’ai subi moult violences sexistes dans ma vie. J’en ai marre que l’impunité existe encore ! », résume Pauline.
Quant à Margot, 26 ans, c’est « la petite pilule rouge du féminisme » avalée dix ans auparavant qui lui a fait prendre conscience des problèmes du sexisme.
« Le mouvement Nous toutes intervient un an après la vague de libération de la parole #Metoo. Là, nous allons repasser à l’action afin de nous organiser pour mettre fin à toutes ces violences », commence par expliquer à l’auditoire Coline, étudiante à Sciences Po. « Pour ça, notre première grosse action c’est la marche du 24 novembre et nous ferons tout pour qu’elle soit réussie ! », enchaîne à son tour Margot.
Nous toutes, un groupe fermé ? Pas du tout. « C’est un mouvement à la fois citoyen et composé d’associations qui se retrouvent dans les valeurs du féminisme et dans lequel toute personne, femme ou homme, peut s’impliquer. Que ce soit au niveau national ou sur Grenoble », s’empresse de préciser Margot.
Structurer le comité local pour plus d’efficacité
Pour autant, pas si simple d’organiser une marche de l’ampleur souhaitée. « Ça coûte de l’argent, il faut que le mouvement soit financé », souligne Coline. D’où la campagne de financement participatif lancée sur la plateforme Kisskissbankbank qui a déjà réuni, à l’heure de rédaction de cet article, plus de 90 % de son objectif.
Sa finalité ? Pouvoir financer les flyers, les affiches, les cars pour véhiculer les participants éloignés ou encore rémunérer les personnes travaillant à temps plein sur l’opération. Des missions que seule la structuration du comité local peut permettre de mener à bien, ce que les intervenantes ont expliqué en détail au public.
À chacune sa partie donc, avec quatre groupes. Un groupe communication qui, outre la diffusion de communiqués de presse, va largement s’appuyer sur les réseaux sociaux (Facebook, Twitter, WhatsApp). La partie réseau incombe, quant à elle, à un deuxième groupe chargé de travailler avec les associations, les syndicats et les partis politiques « au niveau des revendications à élaborer », indique Coline. Un groupe action est prévu pour les collages d’affiches et les distributions de flyers, tandis que le groupe animation s’occupera du déroulé des réunions et de la motivation des troupes, assure Claire.
« Vous voulez que ça change ? Nous aussi ! »
Après diverses interventions de personnes du public, un quizz « pédagogique » a porté sur les chiffres des violences envers les femmes. L’occasion de faire d’inquiétants et douloureux constats…
L’assistance a ainsi pu apprendre que 254 femmes sont victimes de viols ou de tentatives de viol chaque jour en France mais que seulement 1 % des viols sont condamnés. Ou bien encore qu’un tiers des femmes ont subi du harcèlement sexuel au cours de leur vie professionnelle.
Là ne s’arrête pas cet impressionnant décompte. Ainsi 16 % de la population a subi des maltraitances sexuelles dans son enfance, 80 % des femmes en situation de handicap ont subi des sévices, tandis que 59 % des lesbiennes ont dû supporter discriminations et violences au cours de ces deux dernières années…
« Il faut que vous ayez ces chiffres en tête, que quand vous rencontrez quelqu’un vous puissiez lui dire “mais tu te rends compte ? », lance Claire à la cantonade. Cette dernière en est persuadée, il faut faire passer le message et convaincre d’autres femmes et d’autres hommes pour les rallier à la cause.
« Vous voulez que ça change ? Nous aussi ! » C’est en tout cas ce qu’affirme avec force le mouvement Nous toutes sur les tracts qui seront prochainement distribués en amont de la manifestation.
Joël Kermabon